Quelle politique carcérale au Congo-Brazzaville?

Dans le cadre d’une opération de contrôle des salaires des agents de la fonction publique congolaise initiée par le gouvernement en février 2010, l’observatoire congolais des droits de l’homme(OCDH), et l’association pour les droits de l’homme et l’univers carcéral(ADHUC), exprimaient leur vive préoccupation en condamnant le décès, le 9 septembre 2010, à la Maison d’arrêt et de correction de Brazzaville de notre compatriote, Ferdinand MBOURANGOU.

Les explications approximatives et confuses du directeur général de l’administration pénitentiaire, Paul MOROSSA, quant à cette tragédie, laissent penser que tout est à faire s’agissant de la chaîne pénale en général, du recrutement, de la formation du personnel pénitentiaire, des conditions de détention, des droits et devoirs de la personne détenue.

Les prisons doivent être gérées dans un cadre éthique soulignant l’obligation de traiter les détenus avec humanité, tout en respectant la dignité inhérente à tout être humain.

En principe, l’administration Pénitentiaire est rattachée au Ministère de la Justice. Elle contribue à l’objectif général de sécurité publique en assumant deux missions: surveiller les personnes qui lui sont confiées par l’autorité judiciaire, et favoriser leur réinsertion sociale. Dès lors, confier la surveillance des détenus à des gendarmes est une aberration qui mérite d’être soulignée. Pour éviter toute confusion, il faut clairement identifier les fonctions qui font le pouvoir d’un État pour une meilleure efficacité. On reconnaît la fonction de faire la loi(pouvoir législatif); d’exécuter la loi(pouvoir exécutif); et de sanctionner la violation de la loi(autorité judiciaire). La séparation des pouvoirs permet ainsi d’éviter la tyrannie et le totalitarisme.

Les gouvernants congolais n’ignorent pas que la notion État de droit concerne tous les citoyens. L’article 16 de la déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dispose que »toute société dans la quelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». La Constitution est donc le premier segment de État de droit. Aussi, plusieurs principes fondamentaux de droit pénal ou de procédure pénale encadrant l’administration pénitentiaire sont inscrits dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

L »article 7 pose le principe de la légalité de la détention; l’article 8 pose le principe de la légalité des délits et des peines. Aucune infraction n’est punissable, ni aucune peine n’est prononçable si la loi ne les a pas préalablement définis. Est également posé le principe de la non-rétroactivité de la loi. L’article 9 pose le principe de la présomption d’innocence et de la stricte nécessité de la détention provisoire qui est l’exception, et la liberté demeure la règle.

Le bon ordre dans une prison doit être maintenu par le personnel de surveillance, recruté par concours, suffisamment formé, et disposant de moyens pour mettre en adéquation la théorie à la pratique. Ce personnel doit en toute circonstance se comporter et accomplir ses missions de telle manière que son exemplarité exerce une influence positive sur les détenus et suscite leur respect.

Si la prison n’est pas une fin en soi, il n’en demeure pas moins vrai que son but est double: protéger la société; et faire comprendre aux détenus le sens de leur peine. Si le but de la politique est « d’apporter des solutions aux problèmes quotidiens de la population », la responsabilité de nos gouvernants est de mettre en place des moyens et des outils pour favoriser la réinsertion dans la société des détenus une fois leur peine exécutée. Nous devons tous comprendre que la réinsertion « est le développement de la personne à travers l’apprentissage des Règles, du travail, de l’éducation et de l’enseignement par le biais de l’accompagnement du soutien familial afin de favoriser l’intégration dans la société pour vivre libre ».

C’est ainsi qu’une « réforme » morale et intellectuelle s’impose pour montrer que nous sommes capables de nous gouverner nous-mêmes. On juge une Nation par l’état de ses prisons, et « pour qu’une locomotive arrive à sa gare de destination, il faut en premier lieu l’aiguiller sur la bonne voie ».

A moins d’être des citoyens inutiles, notre démarche a pour vocation de susciter la réflexion et le débat. Si la « politique est l’ombre et la lumière », sortons notre pays de l’ombre pour le conduire vers la lumière du mieux-être!

 

Alexis Bouzimbou

Membre du Cercle de réflexion pour des idées nouvelles

www.congo-liberty.org

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