QUAND PCT ET SASSOUISME RIMENT AVEC PESTE  ET MEDIOCRATIE

Il n’y a pas pire malédiction pour le Congo que le règne cinquantenaire monopartite  du Parti congolais du travail (PCT) et son corolaire, la dictature quarantenaire de Sassou-Nguesso. Le parallèle entre ces deux assertions rend compte de l’étroitesse de la corrélation entre ces deux phénomènes politiques. Qu’importent, cependant, la formulation de la problématique et les réponses probables, le fait est que la prolifération de bévues de la nomenklatura politique ces derniers temps inspire un véritable dégoût du pouvoir de Sassou-Nguesso qui tend  à friser des proportions de paroxysme de la médiocrité avec l’accomplissement des actes aussi félonnes que l’aliénation parcellaire du territoire national.

Il est essentiel de lever préalablement une équivoque susceptible de résulter d’un glissement d’interprétation, par tout lecteur non pondéré, de certaines affirmations ici soutenues. Ce papier, expression d’une certaine colère citoyenne justifiée, dénonce sans ménagement l’absolutisme d’un système partisan piloté par le PCT dont  l’absurdité commence à compromettre le destin de toute une nation devant laquelle le silence et la passivité seraient purement assimilable à une attitude de résignation et de complicité du mal. Il se veut être une autopsie du déclin progressif de notre nation orchestré par une caste de politicards dont le cynisme a favorisé la substitution volontaire de la vertu par le vice et de l’efficience par l’inefficacité ou, mieux, de l’excellence par la médiocrité.   Notre démarche consiste dans une démonstration simpliste de l’abrutissement de notre société par l’exaltation de la médiocrité à travers des processus ou comportements sociaux reportés dans un langage stigmatisant tantôt teinté d’une certaine vulgarité mais véhiculant de vrais dogmes dont la combinaison forme un véritable système idéologique contre-productif. Dans ce système, le médiocre, c’est-à-dire ce « qui est très au-dessous de la moyenne, qui est insuffisant » est élevé au rang d’étalon  de mesure de performance. Erigé en norme de gestion de la société, ce système devient une médiocratie, autrement dit un gouvernement de médiocres.

La primeur de la dénonciation de la médiocrité des dirigeants congolais peut être attribuée à Fulbert Youlou qui avait averti ses détracteurs de l’antipatriotisme et de la cupidité des aspirants au pouvoir qui manigançaient son renversement. Il ne pointait évidemment pas Alphonse Massamba-Débat, son successeur immédiat dont le patriotisme, l’intégrité morale et l’efficacité managériale de l’économie nationale sont légendairement reconnus mais faisait allusion à cette race de fossoyeurs qui se profilaient dans l’ombre et allaient ultérieurement évincer ce  dernier : les pseudo-révolutionnaires communistes qui s’organisèrent autour de cette formation maléfique du PCT.  La dénonciation la plus sévère émana, toutefois, trente ans plus tard, d’un contemporain de Fulbert Youlou, Claude-Antoine Dacosta qui, peu après sa démission en juin 1993 du poste de Premier ministre du gouvernement de Pascal Lissouba, fustigea le personnel politique issu du sérail du PCT en ces termes : « C’est mon pays ; je suis né ici  mais j’ai dû le quitter parce que des êtres médiocres ont accédé aux combines du pouvoir. J’ai dû quitter ce pays pour sauver ma vie parce que des êtres médiocres en accédant aux combines du pouvoir ont mis en péril la vie de cadres formés au niveau le plus  élevé de  l’université qui sont rentrés au pays pour se mettre au service du pays et qui ont dû fuir en face de ces êtres   médiocres. Vingt-cinq après, je rentre au pays  et je trouve en face de moi les mêmes êtres et prêts à dicter au peuple toujours la même médiocrité, toujours le même goût du crime ; et ça, c’est insupportable ».

Le défunt Premier ministre faisait certainement allusion immédiatement à Mbéri Martin et autres apparatchiks de l’UPADS, complices des crimes politiques des années 1960, et qui sous le premier régime post-transition démocratique de 1992 avaient pris en otage le pouvoir de Pascal Lissouba. Cependant, cette critique s’adressait tout autant à Sassou-Nguesso, Ambroise Noumazalaye et autres caciques du PCT qui, en réalité, manipulaient l’UPADS par l’entremise de Martin Mbéri et Victor Tamba-Tamba. En effet, ces derniers contrôlaient quotidiennement, pour le compte du PCT, la présidence de Pascal Lissouba à travers leurs taupes féminines, Claudine Munari et Arlette Nonault, aujourd’hui madame Soudan. Toutefois, si Dacosta mettait en exergue la barbarie sanguinaire de ces bourreaux, il était autant inquiété par leur effarante médiocrité qui n’allait révéler toute sa plénitude que trois décennies plus tard à travers la dégradation du niveau du personnel politique, la mesquinerie de son esprit, son arrogance, son ridicule et sa félonie.

Le fossoyage de notre pays tant redouté par Fulbert Youlou et Claude-Antoine Dacosta, accompli tout au long du règne de Sassou-Nguesso semble parachevé aujourd’hui par des absurdités que ces deux prophètes n’avaient certainement point imaginées et qui doivent les faire retourner dans leur tombe. La déliquescence planifiée de la société par le PCT et son noyau précurseur  entamée avec l’élimination physique de l’élite universitaire formée en Occident évoquée par Dacosta s’est poursuivie des décennies durant avec le renoncement de l’Etat à la rigueur administrative et la destruction totale du  système éducatif. L’abandon de la compétence et son remplacement par la camaraderie partisane associé à  l’affinité tribale sont les premières causes responsables du gangrénement progressive de l’Etat. Trois phénomènes d’apparence anodine voire amusante mais viscéralement gangréneux illustrent assez parfaitement ce processus.

Le premier est celui des « yaka noki-noki », cette pratique qui consistait, dans les années 1970 et 1980, pour les leaders déviationnistes du PCT ayant abandonné l’orthodoxie idéologique de ses fondateurs au profit de la logique  tribale du favoritisme, à faire venir d’urgence leurs parents semi-analphabètes des régions nord du pays pour leur confier des postes dans l’administration et dans les entreprises publiques ou mixtes. Ces campagnards sans éducation  formelle étaient conviés à se rendre à l’aéroport le plus proche de leur localité pour emprunter un vol de la compagnie aérienne nationale d’alors, Lina Congo, pour se rendre à Brazzaville. Ils voyageaient de manière rocambolesque, soit, comme très souvent, sans titre de transport censé être régularisé à destination, soit avec un billet éventuellement transmis au passager semi-clandestin par l’équipage de l’avion.  Pour mémoire, à l’époque où le téléphone fixe couvrait insuffisamment le territoire, les messages étaient  véhiculés par voie de communiqué à la radio nationale. Ainsi entendait-on souvent des individus interpellés aux communiqués de 10h30 ou de 16h00 sur les antennes Radio-Congo (RTC), dans la fameuse émission « Mayebisi ya motindo na motindo », la formule : « Yaka noki-nkoi awa na mboka Brazzaville. Tike na yo ekofutama tango okokoma na libanda ya pepo ya Maya-Maya » ou « Tike na yo ezali na maboko ya bakumbi pepo ».

Il faut signaler que la génération « Yaka noki-noki » a fait piètre carrière dans l’administration en cinq décennies. Elle est de ces fonctionnaires incompétents qui, faute  de formation qualifiante et d’éthique fonctionnariale, a introduit la corruption dans l’appareil d’Etat. Elle a atteint la limite d’âge de  la retraite mais refuse de la prendre pour des raisons purement saugrenues. Elle falsifie l’âge à la baisse pour se maintenir en fonction au détriment de l’efficience et de la productivité. De  ce fait, elle a  assuré une gestion calamiteuse de l’Etat sur le fondement  de principes irrationnels comme « Ebonga, ebongate, toujours  meilleur » [soit avancer vaille que vaille] scandé en chanson par les apologistes de l’orchestre nationale SBB dans les années 1970.  Le leitmotiv le plus récemment forgé du « Ledza, lenwa…sima letonga ndako » [ou buvons, mangeons et dansons d’abord pour construire après] et son corolaire « mikolo nionso feti ne feti » [ou la fête au quotidien] de l’ère Sassou-I participent de ce paradigme. Tous ces leitmotivs ne sont pas de simples slogans folkloriques mais, bien au contraire, de véritables dogmes aiguillonnant tout un schéma de penser, l’expression d’une culture réelle de la consommation sans production, de la fainéantise, de la négligence, de l’incompétence, de l’irresponsabilité, de la gabegie, de l’impunité, de la mondanité et de l’insouciance du lendemain érigées en principes de gouvernement de la société.

Les conséquences de cette politique irrationnelle des deux premières décennies du pouvoir du PCT devaient se manifester notamment en 1997 avec le  fossoyage de l’expérience démocratique issue de la Conférence nationale souveraine de 1991 dont les nostalgiques du PCT conduits par Sassou-Nguesso ne s’étaient jamais accommodés. Ce retour manu militari de la junte sassoviste aux affaires orchestré par la mafia pétrolière de Total-Elf et exécuté par le véreux Jacques Chirac qui avait toujours considéré la démocratie comme un luxe pour les Noirs de la Françafrique devait marquer le rétablissement de l’ordre militaro-politique qui sévit encore aujourd’hui avec tout son lot de désastres et de scandales. C’était la substitution de la démocratie par la médiocratie dénoncé avec tant de véhémence par Claude-Antoine Dacosta.

Aujourd’hui, une légion de médiocres sur la scène politique congolaise justifie bien l’effarante alerte prémonitoire de notre défunt Premier ministre. La barbarisation de la société avec le phénomène « koulouna » ou l’instrumentalisation politique d’une jeunesse déscolarisée à dessein est une illustration typique de cette médiocratie. Aussi scandaleux, sinon plus dangereux parait le « koulounage » de la sommité politique du pays avec, d’un côté, l’engagement dans la course à la députation de candidats  semi-analphabètes à peine capables de s’exprimer correctement dans la langue officielle du pays ou encore des députés et ministres en exercice brandissant de faux diplômes et, de l’autre, des caciques exaltant l’impunité du crime et une conception absolutiste du pouvoir. Dans le premier cas l’on peut ranger un certain Fabrice Silwey Brinsky MOTYKE, candidat aux élections législatives, tête de liste PCT de la  circonscription Impfondo commune, dans la Likouala, dont l’affiche de campagne qui a fait la ronde des réseaux sociaux parade le message : « Je ne suis pas venu s’en servir de vous, Mais pour vous servir », « Votons tous la liste du PCT ».

Par ailleurs, l’élimination physique de cadres compétents par l’embryon du PCT dans les années 1960 et leur évitement par le régime actuel a créé un vide  comblé à dessein par de hauts-fonctionnaires de l’Etat porteurs de faux titres académiques. Le Congo connaît aujourd’hui un boom de faux diplômes officiellement avoué dès 2017 par l’ancien ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’Alphabétisation aujourd’hui Premier ministre, Anatole Collinet Makosso, en des termes clairs : « Des gens se permettent de trafiquer des diplômes, surtout qu’ils savent qu’il n’est plus évident de passer par le circuit informatique, ils se plaisent maintenant de falsifier les diplômes et quand vous les voyez, il n’y a pratiquement pas de différence avec le vrai diplôme ». A ce titre, un député de la majorité présidentielle de la circonscription de Lékana, département des Plateaux, Ghyslain Millet Galibali, recruté sur la base d’un faux diplôme d’ingénieur en développement par le Fonds routier, une société publique, a été condamné, le 18 mai dernier, par la Haute Cour de justice à trente ans d’emprisonnement et de travaux forcés pour faux et usage de faux et escroquerie de salaires pour faire semblant de combattre le fléau.

La troisième catégorie de médiocres engendrée par le système PCT est celle de diplômés sans personnalité intellectuelle toujours prêts à se déculotter pour flagorner le grand manitou. Les dernières déclarations de Bruno Itoua sont révélatrices de ce personnage de renard vantant la beauté du plumage du corbeau pour lui arracher le fromage accroché au bec : « C’est quand on le croit faible qu’il devient fort ; c’est quand on le croit mort qu’il est encore plus vivant que d’habitude. Nous n’avons pas encore fini de développer ce pays. Nous n’avons pas encore fini de développer nos localités. Nous n’avons pas encore fini de faire de ce pays un pays émergeant. C’est ce que veut le Président de la République. Et donc, tant qu’on n’a pas fini, « tokotika te », tant qu’on n’a pas fini « tokotika pe te » [soit, nous ne lâcherons pas] ». Par ces mots, Bruno Itoua non seulement divinise la personne de Sassou-Nguesso  mais encore proclame l’éternité,  l’exclusivité et l’accrochage au pouvoir du PCT ovationné par une foule de militants en liesse psalmodiant l’infaillibilité de leur formation. « Nous irons jusqu’au bout du monde, le PCT ne faillira pas », chante-t-elle. L’ironie du sort est que les militants du PCT ne s’aperçoivent pas que leur hymne de campagne emprunte son air aux « Chevaliers de la table ronde », une  chanson de dégustation de bon vin exaltant l’ivrognerie. A propos, forte parait la coïncidence avec le dogme « Ledza, lenwa » quin’a pas l’air fortuit. Elle est plutôt l’expression d’une conscience de caste définie par la gabegie, la corruption, l’impudence, la dilapidation et surtout l’irrationalité comme principes cardinaux.

Enfin, le comble de l’absurdité ressort aussi du discours de Christel Sassou-Nguesso qui, s’imaginant déjà dans une posture présidentielle, débite des insanités réaffirmant le principe constitutionnel de l’impunité des crimes politico-financiers proclamé par son père et auquel il croit pouvoir rallier audacieusement tout un peuple averti. « Je suis tout de même au regret de vous dire que le Congo que je veux demain ne passe pas nécessairement par le fait de mettre en prison ceux qui auraient détourné les fonds des générations futures et autres ». Oh quelle effronterie ! J’espère seulement que l’Afrique et le monde entier ne commettront pas l’imprudence d’imputer les absurdités de ce politicard à tous les Congolais. Cet imposteur comme son père et leurs idolâtres ne représentent nullement l’opinion congolaise car ils ne sont pas crédibles et ne jouissent d’aucune légitimité populaire. Ainsi s’explique, d’ailleurs, le bradage de notre territoire au Rwanda.  

Avec la cession des portions de notre territoire au Rwanda, Sassou-Nguesso vient d’exhiber le comble de sa médiocrité en tant que dirigeant politique et de friser le paroxysme de son antipatriotisme exacerbant. Il ressuscite, de ce fait, le doute perpétuel sur ses origines réelles. Sassou-Nguesso, est-il un Congolais de souche ? Tout par sa manière de gérer le pays incline à répondre par la négative car un digne  citoyen affiche naturellement un minimum de loyauté vis-à-vis de son pays natal ou de celui dont il porte la nationalité indépendamment du mode d’acquisition de celle-ci. La loyauté citoyenne consiste  pour tout homme assumant une fonction ou des charges publiques à ne point agir à l’encontre des intérêts de son pays. Il en va ainsi de toute abstention de céder, à quelque titre que ce soit, tout ou partie du territoire de son pays  à quelconque entité étrangère, fusse-t-elle étatique ou privée.

A propos, il parait opportun de citer à titre d’illustration l’exemplarité de l’attitude de Mette Frederiksen,   l’actuelle Première ministre danoise, qui, en 2019, réagissant à  la proposition du président des Etats-Unis d’alors, Donald Trump, d’acheter au Danemark l’île du Groenland,  répliqua patriotiquement : « Nous ne sommes pas prêt à vendre ». Il va sans dire que dans les mêmes circonstances, Denis Sassou-Nguesso, en antipatriote invétéré, aurait pris le contrepied de la patriote Mette Frederiksen qui, ce faisant, a relégué le bradage de territoire national au rang de pratique surannée, en tout cas pas impropre aux usages diplomatiques du XXIè siècle. Il convient toutefois de rappeler que peu avant le cas danois, en 2009 à Paris, notre griot national, Youss, dont l’opposition au pouvoir congolais est ouvertement déclarée, avait interloqué Christel Sassou-Nguesso au moyen d’une chanson satirique improvisée dans laquelle il rappelait clairement le principe de l’inaliénabilité du continent africain : « Mon Afrique n’est pas à vendre ». Il faut s’appeler Sassou-Nguesso ou être militant du PCT pour ne pas l’entendre de cette oreille.  

Ceci dit, le salut du Congo passe par une condition sine qua non : destituer Sassou-Nguesso et dissoudre le PCT. Tel est le défi que nous, Congolais, devons nous atteler à relever dans la concorde pour sauver notre nation mise en péril par des dirigeants illégitimes et antipatriotes car si le PCT est une peste dont le Congo doit se soigner en urgence, son président, Sassou-Nguesso est un obstacle au bien-être social ou au progrès du pays et sa doctrine, le sassouisme, est l’illustration typique de la médiocratie.

David NTOYO-MASEMBO

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Une réponse à QUAND PCT ET SASSOUISME RIMENT AVEC PESTE  ET MEDIOCRATIE

  1. Samba dia Moupata dit :

    Le PCT est un parti excessivement Mbochi. Sassou à signer l’acte de décès de la République du Congo . Un projet initié par Marien Ngouabi et achevé par Sassou Dénis .Notre impératif c’est rétablir la république du Congo en désavouant la légitimité de Sassou de continuer à incarner le Congo, or il est président des Mbochis .

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