LES MOTS POUR EN FINIR AVEC LA FORCE , Par Benjamin Toungamani

Au début de l’année 1991, Denis Sassou NGuesso était président de la République Populaire du Congo. Ce pays dit ‘’marxiste-léniniste’’ avait ressenti, avant le « discours de la Baule, les chocs de l’effondrement du mur de Berlin et de celui de l’Empire soviétique.

Le pouvoir de Sassou 1er n’avait enregistré que des échecs, dont celui du 1er Plan Quinquennal. Entouré seulement de quelques parents et de mêmes caciques,  interchangeables, du PCT  à la tête de ministères, l’incompétence des uns et des autres l’avait mené à l’impasse la plus totale. Déjà « tigre de papier », son pouvoir « château de cartes » ne pouvait qu’être balayé au premier souffle de vent démocratique. Incroyablement, sans la moindre rafale de Kalachnikov, son régime s’effondra pour laisser hurler le mécontentement du peuple à la Conférence Nationale. Ces loups, qui aimaient à s’entourer de bruits de bottes et de cliquetis d’armes automatiques, se transformèrent immédiatement en agneaux apeurés face à des tribuns en colère. Cette révolution manquée ne fit rouler aucune tête, ni du monarque déguisé, ni de ses sbires. Le pays avait soif de démocratie et il en a été très mal servi par la suite.

Sassou revint au pouvoir, non sans faire couler abondamment le sang que la Conférence Nationale Souveraine avait sagement épargné.

Curieusement, un peu plus de quatorze années après, l’Histoire se plairait à se répéter et à reproduire une situation identique à celle qu’il avait connue au début 1991 : l’essoufflement de son pouvoir de plus en plus pesant et plombé d’erreurs reproduites voire amplifiées. Le mécontentement est général,  malgré une situation financière incroyablement bonne. Le nouveau gouvernement qu’il vient de nommer ce 25 septembre ne déroge pas à la règle trentenaire. L’homme est toujours entouré des mêmes hommes incompétents ou presque. La nature ayant ses propres lois, même soignés dans des luxueux  hôpitaux parisiens, il ne se passe pas de mois que l’un d’entre eux ne rentre au pays dans un cercueil pour y être inhumé. Du coup le cercle initial s’étiole. Ces places laissées vacantes se retrouvent  dans la ligne de mire des rejetons du monarque déjà solidement agglutinés autour des  ressources du pays. Ces apprentis despotes ont progressivement mis la main sur toute l’activité financière de notre République et tentent d’en régenter la vie politique. Du coup, les armées de partisans et de courtisans, à qui l’on n’a distribué que des miettes, commencent à se poser des questions sur la pérennité du système mafieux qui s’est instauré et sur sa capacité de les protéger lorsqu’il faudra nécessairement rendre des comptes.

De nombreuses « souris » commencent à se désolidariser du navire, d’autres se demandent bien comment elles vont pouvoir le quitter. Une preuve récente et flagrante nous en a été donnée le 4 mars dernier. Dès la première explosion, les barons de ce « Second Régime » ont fait leurs bagages. A la seconde explosion, ils détalaient tous en ordre dispersé, pendant que la Garde Présidentielle abandonnait Denis Sassou NGuesso dans son palais. Ce n’était pas un coup d’Etat car il eut suffi de seulement quelques hommes décidés pour mettre le président, deux fois putschiste, hors d’état de nuire. Même le Prince héritier désigné, Denis Christel dit « Kiki » s’était réfugié avec son épouse et sa progéniture françaises à l’Ambassade de France.

L’Histoire est un éternel recommencement et tout dans la situation actuelle ressemble bien à cette période clef du début 1991. Le Roi est nu, malgré ses milliards d’Euros et de dollars accumulés tout au long de son second règne de kleptocrate. Il le sait si bien qu’il commence même à douter de ceux qui hier ont fait le coup de feu avec lui. Ses « souris » ne voudront pas mourir pour lui. Toutes savent qu’au premier souffle, qui se fera sentir, l’édifice construit par l’incompétence généralisée, la sienne et celle de ses sbires, s’effondrera comme un autre château de cartes.

Sassou NGuesso, et ses très nombreux rejetons députés ou pas, ne mériteront pas comme en 1997 que le sang congolais coule pour eux. Ses « souris » prendront le large. Il est important que les « souris », repenties ou pas, sachent que leurs miettes ne vaudront pas une autre division comme celle infligée en 1997. Le Roi sera nu, plus nu qu’il ne l’a été en 1991, parce qu’il a été au bout de sa démence prévaricatrice avec sa famille et son tout petit clan de corrompus et de grands délinquants.

Oui, il faut quitter le navire pendant qu’il est encore temps. Le ver est dans le fruit qui, de jour en jour,  accélère sa putréfaction.

Ceci est une main tendue pour une sortie honorable et pacifique de la longue nuit.

L’Etat de droit peut encore renaître autour d’une table, dans le dialogue et même, et surtout, les « souris » pourraient en être des éléments  de sa reconstruction. L’avancée nécessaire du Congo dans le futur ne saurait s’établir sans la connaissance et les témoignages de certains éléments troubles du passé.

2012 sera 1992 et nous avons vingt années de retard dans le progrès réel à combler.

 

Toungamani Benjamin
Animateur d’EXODUS le retour

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