L’AIR DU TEMPS, par l’écrivain congolais Dina Mahoungou

C’est un passage à vide innocent, pour éprouver un homme qui songe : on le bouscule brusquement, on le dérange peut-être ?

« Dis-nous tonton Michel ! Comment c’était en ces années-là ? »

Je n’avais pas tout à fait 22 ans, je déménageais de la maison des étudiants congolais sis au 20, rue Béranger Paris 3ème. Aujourd’hui, bâtiment vendu par les amis du général Président à des spéculateurs immobiliers.

Un aîné avait laissé libre son studio dans le boulevard Bineau à Neuilly sur Seine, Faustin Missanou pour ne pas le citer.

En plein automne 1977, nous déménagions mon ami Samba Anicet Médard et moi pour les Hauts-de-Seine, dans une petite habitation bien aménagée, dans les combles au 9ème étage, côté service sans ascenseur avec toilettes sur le palier.

Au dixième étage, nous avions comme voisin N’Gatali Naphtal alias le N’Gantsié, Bemba Léopold alias Longal, et Corneille de la famille Kanza Siloé.

A quelques encablures des Champs-Elysées, adolescents, nous découvrions, tous sans exception Paname, la ville lumière.

Tout le long de l’année, nous étions tous à l’étude à la bibliothèque Sainte-Geneviève, souvent l’après-midi.

Raph Maboundou était à Villetaneuse, René Loubayi sortait de l’institut Catholique de Paris pour Nanterre, Roland Biyoudi, Nyokas Zalamou Patrick, Rufin N’Kouka étaient étudiants à l’ILERI, dans le 6ème arrondissement de Paris, section Sciences Politiques.

N’Zaba François, Michel Mahoungou, Massengo Nicolas, Médard Samba Anicet étaient à Vincennes et suivaient les enseignements sur Gramsci, de la célèbre Maria Antonietta Macciochi. Nous découvrîmes « les maîtres penseurs » de Glucksman.

Polycarpe Loubayi et Sita Hypolite étaient en Droit à Assas.

 

Depuis déjà 1975, nous avions un professeur atypique, originaire du Congo Brazzaville qui nous enseignait la « Machémologie », la science des luttes, dans le corpus : Histoire des idées politiques.

Etions-nous heureux … Nous n’avions rien : absurde, n’est-ce-pas ?

Pour l’essentiel, l’évidence s’était imposée à moi, les éditions St-Germain des Prés venaient de publier mon premier opus « Le mémorial juvénile » fin 1979 début 1980.

A ce moment-là, la difficulté de vouloir devenir écrivain devenait une absolue priorité.

 

Au milieu des années 80, j’étais étudiant aux langues orientales en Sorbonne Nouvelle à Paris III, mon deuxième opus « La superbe de l’émotion », venait de paraître à ce moment-là.

Le goût à l’écriture prenait son chemin.

En ces années-là, des écrivains congolais comme Sony Labou Tansi, Caya Makhélé, Mukala Kadima N’Zuji responsable à Présence Africaine, Patrice Dakeyo éditeur et homme de lettres d’origine camerounaise étaient dans tous les débats, forums et vernissages, la solution était déjà esquissée : les écrivains du bassin du Congo rêvaient déjà d’un auditoire plus large.

Jeunes et plein de projets, la mesure du temps pouvait s’affiner d’une manière presque indolente, les beaux jours étaient devant nous.

Le temps passait, on ne le sentait ni ne le mesurait, alors qu’il avance souvent dans la finitude et dans la mort.

A la racine première des choses, nous avions chacun de nous un maître, et ne doutions point que la littérature ait été créée au commencement par des érudits. Relisez le poète Maxime N’Débéka dans « Les signes du silence » et « L’oseille et les citrons » parus chez P.J OSWALD. Quelle majesté, quel caractère !

A la parution chez Hatier de « Jazz et vin de Palme » d’Emmanuel Dongala, mon ami François Bikindou et moi avions couru dans tout le quartier latin, à la recherche de « A love Supreme » de John Coltrane.

Notre jeunesse vivait dans toute son innocence cette vérité des choses simples, avec félicité et assurance.

Il faut se souvenir, dire les choses comme elles étaient pour la providence, sinon notre nature d’écrivain et son histoire tomberaient dans la nuit.

C’est une nouvelle vie qui s’ouvre devant soi lorsqu’on devient écrivain, une véritable renaissance, en son perpétuel mouvement.

 

Dina Mahoungou, écrivain et journaliste free lance. Arpajon, le 4 janvier 2012.

Dernier ouvrage paru chez l’Harmattan : « Agonies en Françafrique » dans la collection Ecrire l’Afrique.

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Une réponse à L’AIR DU TEMPS, par l’écrivain congolais Dina Mahoungou

  1. JE SUIS UN JEUNE GABONAIS DE 30ANS J.AIMERAIS AVOIR UNE AMITIÉ AVEC VOUS DU FAITE QUE TROUVE UNE PERSONNE QUI A LE MÊME NOM QUE MOI .TRÈS RAVIS DE FAIRE CONNAISSANCE JE TRAVAIL DANS UNE SOCIÉTÉ DE LA PLACE COMME ÉLECTRICIEN .J.AI 02 ENFANTS ET NON MARIE.MERCI

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