« Le Crépuscule de la presse écrite libre du Congo » est le titre d’une récente étude sur le paysage des médias écrits au Congo. Cet excellent travail, documenté dont l’auteur est monsieur Roger Yenga, dresse un tableau nuageux et apocalyptique qui s’est abattu sur le paysage des journaux privés, et cela en dépit de la Constitution de 2002, qui garantissait la liberté de la presse.
Même la nouvelle Constitution imposée par la force ,après le viol de la conscience des populations et le vol de leur vote lors de la récente présidentielle de mars dernier, reconnait pourtant la liberté de l’expression journalistique pluraliste au Congo. Mais dans les faits, le Conseil supérieur de la liberté de communication, organe supposé garantir et réguler l’exercice de la liberté de l’information et de la communication s’est en réalité transformé en une police politique des médias, plus précisément des journaux privés dont les lignes éditoriales échappaient au pouvoir politique.
Par le biais d’une pratique orientée vers des décisions répressives constantes et non éducatives et pédagogiques à l’endroit des patrons de presse, le Conseil supérieur de la liberté de la communication a suspendu plusieurs titres de la presse écrite privée tels que <<La Glaive>>, <<Sel Piment>>, <<La Verité>>, etc. Cette pratique digne de la période du monopartisme du Parti Congolais du Travail (PCT) a fini par avoir raison de la pluralité de l’expression journalistique dans le pays, legs de la Conférence nationale souveraine. Conséquemment cela a fait disparaitre la quasi-totalité des titres de la presse écrite privée et indépendante, qui jadis, offraient au public congolais une autre lecture de l’actualité nationale, bien loin de celle officielle que des journaux et autres médias audiovisuels d’Etat et privés alignés sur les vues du gouvernement de Brazzaville. A l’instar des Dépêches de Brazzaville, de la Nouvelle république, du Choc, du Troubadour et de toute une flopée de titres de la presse écrite et en ligne, appartenant et/ou animés par des mercenaires de la plume, rémunérés par le trésor public congolais, à travers les services du pouvoir de facto de Brazzaville.
Pour étayer son argumentaire sur le caractère nocif à la liberté de la presse au Congo des délibérations du Conseil supérieur de la communication, le chercheur Roger Yenga, juriste de formation et membre de l’Institut International des Droits de l’Homme de Strasbourg en France met les pieds dans le plat, en prenant des exemples de suspension de parution des journaux qui n’avaient pas, selon le Conseil, respecter les articles 1, 3 et 4 alinéa 4 de la loi n° 8-2001 du 12 novembre 2001 sur la liberté de l’information et de la communication. Une illustration.
Le 6 mars 2013, la délibération du Conseil supérieur de la liberté de la communication numéro 002-2013/CSLC-CM concernant la décision de suspendre le journal <<La Vérité>> prouvera de façon claire l’esprit partisan de cet organe de régulation. Le titre <<Vérité>> sera suspendu de parution pendant six mois pour <<refus répété d’obtempérer et de répondre à l’interpellation du Conseil, après publication d’articles mensongers et séditieux, propagation de fausses nouvelles et manipulation de l’opinion>>. Et l’auteur fait observer que, <<nulle part, dans cette délibération, les membres du Conseil supérieur de la liberté de la communication ne visent explicitement une disposition du cahier des charges qui aurait été transgressée par un ou les articles de ce journal >>. Et vlan!
Poursuivant son observation et l’analyse qu’il fait de cette décision, le chercheur. Roger Yenga fini par constater que le Conseil supérieur de la communication n’avait pas respecter l’article 20 de la loi organique qui stipule: << le Conseil supérieur de la liberté de la communication ne peut pas valablement siéger que si les deux tiers de ses membres sont présents>>. Or sur les onze (11) membres qui composent ce Conseil supérieur seulement cinq (5) avaient siégé ce jour-là et signé la délibération qui sanctionnait le journal << La Vérité>>. Le tiers des membres du Conseil aurait été sept (7). Et non cinq (5). Encore vlan!
« Accréditation des journalistes professionnels exerçant pour le compte des organes de presse étrangère en république du Congo. Le ministère des affaires étrangères persiste dans la violation de la loi depuis dix ans »
C’est le titre d’une deuxième étude qui complète le premier travail de monsieur Roger Yenga sur les difficultés d’opérer une entreprise de la presse écrite privée et libre au Congo.
Observant et passant en revue la forme et le contenu du décret numéro 2006 du 16 février 2006, fixant les modalités d’accréditation des journalistes professionnels exerçant pour le compte des organes de presse étrangère en république du Congo, cette étude amène le lecteur à conclure sur le caractère scélérat de cette loi d’une part et surtout la mauvaise foi du ministère des affaires étrangères à qui revient l ‘autorité d’accréditer les journalistes qui travaillent pour le compte d’organes étrangers, d’autre part.
Aussi, l’auteur de cet essai interpelle-t-il les membres du Conseil supérieur de la liberté de la communication à qui revient le devoir non pas de légiférer ou d’exécuter, mais plutôt de réguler les libertés dans les métiers de l’information et de la communication au Congo. Mais le constat que l’étude a pu faire est simple: Il y’a manifestement comme une connivence, sinon une collusion entre le Conseil supérieur de la communication et le pouvoir exécutif. Ce que le chercheur n’affirme pas, tout observateur de la vie politique congolaise, conclura assurément que ce n’est pas étonnant que le Conseil supérieur de la communication fonctionne comme une structure affiliée au gouvernement.
En effet, le président de ce conseil, monsieur Phillip Mvouo, est membre du comité central du Parti Congolais du Travail, le parti au pouvoir. Bien d’autres membres de ce conseil sont eux aussi des partisans déclarés du parti au pouvoir ou de ses alliés. << Les membres de ce conseil devraient avoir le courage de défendre toutes les attributions qu’ils tiennent de la loi, contre les empiètements ou les interférences du ministère des affaires étrangères. Même le désir de défendre ou de conserver leurs fonctions ne saurait justifier une collusion-silencieuse mais frauduleuse-avec le ministère des affaires étrangères, en vue de la violation de la loi>>, écrit le juriste.
Monsieur Yenga ne critique pas pour critiquer. Il propose aussi des pistes pour améliorer les textes, en commençant par <<faire diligence dans l’abrogation du décret numéro 2006-57 du 16 février 2006, pour selon lui, revenir au strict respect de la loi organique numéro 4-2003 du 18 janvier 2003>>, afin dit-il, de sauver la face. Allusion certainement faite aux membres du Conseil supérieur de la communication qui louvoient les prorogatifs que la loi confère à l’institution pour laquelle ils travaillent.
Par Balièle Mathieu Bakima
Quelque citations de Thomas Jefferson, un des Présidents et pères fondateurs des Etats Unis d’Amérique sur la presse et le gouvernement.
- « La presse qui est libre de mener des investigations et de critiquer le gouvernement est absolument essentielle à une nation qui exerce un gouvernement du peuple par le peuple, et est par voie de conséquence utile à l’engagement des citoyens »
- « La base de notre gouvernement est l’option du peuple, et le premier objectif doit être de garder cela; et si je devais décider entre un gouvernement sans presse et une presse sans gouvernement, je n’hésiterais pas un seul instant de choisir le dernier. Aussi je crois que tout homme doit recevoir ces journaux et être en mesure de les lire ». Thomas Jefferson parlant à Thomas Cooper, le 29 novembre 1802.
- « La seule sécurité de tous est dans la liberté de la presse. Nul ne peut résister à la force de l’opinion publique quand elle est autorisée de s’exercer librement ». Thomas Jefferson s’adressant à Lafayette, 1823.
- Je suis pour la liberté de la presse, et contre toutes les violations de la Constitution de garder sous silence par la force et non par la raison les complaintes ou les critiques justes ou injustes de nos concitoyens contre la conduite de ceux qui les gouvernent » 1779.
- L’art d’imprimer les nouvelles nous préserve contre le rétrogradation de la raison et de l’information. Thomas Jefferson parlant à Pierre Paganel, 1811.
Il y’a plus de deux cent (200) ans, un homme politique qui posait avec d’autres les jalons d’un Etat-Nation, d’une démocratie comprenait les bienfaits d’une presse libre pour l’intérêt des institutions de son pays. Au Congo, un homme usé par plus trois décennie de pouvoir ne comprend pas l’intérêt qu’une presse libre et plurielle peut avoir dans la santé des institutions du pays.
De l’auteur.
49 ans et natif de Pointe-Noire, monsieur Roger Yenga est détenteur d’une maîtrise en droit privé de l’Université Marien Ngouabi. Fonctionnaire, il est aussi membre de l’Institut International des Droits de l’Homme de Strasbourg, France.
P.S.: Je recommande vivement à mes compatriotes du pays, et surtout ceux de la diaspora la lecture de cette étude que l’on peut se procurer facilement en ligne ou auprès de l’éditeur. Non seulement je salue la qualité de son travail, mais surtout j’admire le courage dont a fait preuve ce jeune frère, qui ose mener une telle étude, dans un pays ou la violation des droits des citoyens est quasi quotidienne.
Cette presse se meurt mais c’est aussi le reflet d’une société civile peu engagée dans les affaires du pays!
Les antipatriotes au firmament de la haute trahison narguent le petit peuple besogneux qui trime et les plus grands cerveaux se prostituent sur le trottoir de la dictature comme BAKABADIO, MODOUDOU ONDONGO ou encore ADADA.
Mais il n y a qu’à regarder l’économiste M-OSSO MBA NIQUÉ OSSO bredouiller des explications empruntées et confuses depuis que se convaincre que la presse demeure un pouvoir après la dénonciation du scandale AERCO par Ghys Fortuné DOMBE BEMBA.
CHEVALIERS DE LA PLUME ! CONTINUEZ A MONTER LE VRAIS VISAGE DE CE POUVOIR PRÉDATEUR!
De quoi s’étonne t-on? N’est-ce pas contradictoire déjà, de dire/proclamer la liberté d’expression, puis de donner existence à un Conseil supérieur de la liberté de la communication. Ou la loi ne garantie pas exactement cette liberté, et donc le fameux conseil vient en appui, ou le conseil supérieur triche en se disant « conseil supérieur de la liberté…Ce qui montre que les juristes eux-mêmes sont dans des postures incroyables surtout quand ils ont la charge de rédiger une telle loi…Le conseil supérieur à quoi? en apparence au moins, à la liberté; ce qui montre bien que dans l’esprit des gens au pouvoir, la liberté est assujettie à l’avis de ce conseil…C’est trop compliqué… je voulais dire que c’est trop idiot, surtout de la part des juristes qui ne sont pas capables de suivre leur logique. Ne soyons pas surpris que la presse soit censurée; ce qui a fait que même La Semaine Africaine est au pas…
Continuez toujours à croire ces gens là… On vous dit que pour eux, la loi, le droit, c’est du pipi… leur humeur est la loi, le droit.
A mwangou, je suis tout a fait de ton avis que la pègres qui sert de dirigeants aux Congolais et qui s’est maintenue au pouvoir par le vol et la force brute est la loi et le droit à la fois. Bien triste. Un peu comme du temps de Louis XIV qui disait en son temps que « la loi c’est moi ». Au Congo la loi c’est monsieur Sassou Nguesso. Mais sur le bien fondé d’avoir un organe de régulation dans le domaine de la communication, je pense que vous faites fausse route lorsque vous écrivez ce qui suit: « De quoi s’étonne t-on? N’est-ce pas contradictoire déjà, de dire/proclamer la liberté d’expression, puis de donner existence à un Conseil supérieur de la liberté de la communication… »
Non je mon cher compatriote, je ne pense pas que ça soit contradictoire le fait d’avoir un conseil supérieur de la Communication. Je ne suis pas juriste, et donc ma connaissance du droit est très très limitée. Mais je pense que toute Constitution ne donne que des grands principes. Les textes de loi sont pris pour l’application de la loi dans certains domaines. Bref.
Les Etats Unis d’Amérique et la France, par exemple, deux des plus vielles démocraties républicaines du monde ont des organes qui régulent le domaine de la communication.
The Federal Communications Commission of the United States of America (www.fcc.org). En France, le Conseil supérieur de la liberté de communication (CSA) pour l’audiovisuel. La presse écrite française elle a le Conseil supérieur des messageries de presse. En Angleterre, une monarchie démocratique il y’a aussi des organes qui régulent et veillent à une bonne pratique, mais veillent aussi aux intérêts des consommateurs des produits médiatiques (OFCOM, MEDIA STANDARDS TRUST)…
Pour terminer, je problème au Congo, c’est ce bien ce que tu as bien dit: un groupe de dirigeants de faits qui ne respectent pas la loi. Même les lois qu’ils ont eux-mêmes pris quand ça les arrange pas ils ne respectent plus. Le plus récent exemple est la constitution de 2002.
Merci pour ces infos…Mon unique regret est que chez nous, la mauvaise foi est telle qu’on doit éviter des mots trop vagues dans nos constitutions, tellement vagues qu’il faille attendre des prises de position appelées loi, supplémentaires pour avoir une version définitive de l’ébauche fondamentale… La mauvaise foi est telle que ces prises de position supplémentaires n’arrivent que très lentement…Et c’est souvent là que nos dirigeants trouvent des portes pour se dérober de la loi… Oui, souvent, les lois attendues pour que la loi fondamentale prenne tout son sens, n’arrivent jamais…C’est pour cela que nous n’avons jamais dénoncé l’absence totale d’élections municipales depuis 2002, ayant permis à sassou nguesso de faire diriger les municipalités créées par des administrateurs maires qui fonctionnent « bancalement », ne pouvant prendre aucune vraie décision pour leur municipalité…Situation que ces derniers ne peuvent dénoncer, car se serait scier la branche (1000.000 de francs par mois de salaire) sur laquelle ils sont si confortablement assis pour des gens dont les professions d’origine ne leur permettaient qu’un minable salaire de 150.000 frs maxi.
La constitution à la française pose problème dans son application dans nos pays…le principe de l’indivisibilité qui le guide est mue par un autre principe essentiel, celui de la causalité, un peu comme un droit d’ainesse entre les rubriques ou titres…Le titre I est la cause du titre II, qui lui ne peut être qu’une conséquence du titre qui est avant. Même le préambule qui déclare, déclare sa causalité pour le reste de cette loi fondamentale… Ceci, nos juristes ne semblent pas bien le comprendre, surtout nos magistrats.
Lorsque, au titre I par exemple, on affirme que la liberté est fondement de notre société, cela ne souffre plus de la moindre contrariété; rien ni même le président de la rép. ne peut s’en affranchir. Tout individu qui y contrevient, en empiétant sur la liberté de l’autre, la liberté le sanctionne; c’est le rôle de la justice. Cette règle fondatrice fait que dans les pays que vous citez comme de vieilles démocraties, le président, les gendarmes, les policiers, les magistrats, tout le monde est passibles de justice…Ce qui n’est pas le cas chez nous, car la rédaction des lois, peu claire, tend à créer une situation où le président de la rép. par exemple, se trouve au-dessus des lois… Surtout avec ce concept juridiquement fallacieux d' »immunité »….
De ce fait, on peut crier contre un acte anticonstitutionnel, ça ne fera trembler que les feuilles des arbres à la limité, mais pas les hommes politiques…
On y reviendra. Merci encore pour ces masses d’infos.
La situation de la presse congolaise est déplorable et fait honte. Si l’on compare au Gabon, au Congo-Kin et au Cameroun par exemple, notre pays fait honte. Où sont partis des journalistes honnêtes et courageux comme ceux du temps de la conférence nationale, voire de la période de la présidence du Prof Lissouba? Sassou par ici, Sassou par là, un Nguesso par la bas, etc dans toutes les émissions à la télé et à la radio. Moi je ne regarde plus télé Congo depuis longtemps. Je suis contente que les journaux en ligne nous informent, mais avec un internet à débit aléatoire, c’est pas facile de rester longtemps sur la toile.