La misère au menu des congolais. Par Jean Claude Beri

JC-BERI« On aura beau réajusté le budget, multiplié les projets d’investissement, la vérité est là, toute crue, Sassou ne sert que les siens et son clan. Il s’en fout qu’on le prenne aux mots, il s’en moque que rien ne soit concrétisé, sa priorité est ailleurs. Pire, tant qu’il maintiendra les congolais dans une situation de chaos permanent, mieux il assurera l’avenir de ses rejetons et neveux transformés aujourd’hui en « maîtres flambeurs incontestés du Congo ». «Ce qui rend la corruption, ou même la simple médiocrité des élites, si funeste, c’est la solidarité qui lie entre eux tous leurs membres, corrompus ou non corrompus, dans la défense du prestige commun. » Le Chemin de la Croix-des-Ames (1948), Mars 1942 »

3935 milliards de FCFA contre 3645 milliards de FCFA, comme initialement prévu en début d’année, c‘était budget réajusté pour faire face au sinistre de l’explosion de la poudrière de Mpila, survenue à Brazzaville le 4 mars dernier. Combien ont été dépensé pour réduire la pauvreté, la vie chère, l’accès au logement et aux soins des congolais ? Depuis le début de l’année, les congolais sont privés d’une part des conditions sociales acceptables et d’autre part, victimes des traumatismes dus aux catastrophes imputables à la négligence, l’incurie, l’incompétence d’un gouvernement totalement irresponsable et sourd aux souffrances des populations.

La catastrophe du 4 mars dernier, révélateur d’une absence de politique de prévention, laisse encore d’aujourd’hui plusieurs familles dans la détresse et le désarroi. Obligées de jongler entre trouver un logement, se nourrir et se soigner, ces familles sont désemparées au-delà des 3 millions perçu à titre d’allocation. Les inondations qui s’abattent sur les deux grandes villes ont causés des dégâts importants poussant des familles entières à solliciter des hébergements de fortunes auprès de tiers personnes. Dieu merci, la solidarité congolaise est au dessus de l’insensibilité gouvernementale. C’est donc dans le dénuement le plus totale que les congolais s’apprêtent à passer les fêtes de fin d’année.

Triste sort pour un pays qui regorge suffisamment de ressources pour subvenir à ses besoins. Les congolais ne savent plus à quel saint se vouer pour recouvrer la qualité de vie d’avant le retour au pouvoir de SASSOU NGUESSO et son clan. 2012 aura été l’année, la plus difficile terne en terme de détérioration des conditions de vie des populations et la plus meurtrière en terme de sacrifice humains. Plus de 298 morts, 3132 blessés plus de 100000 personnes sinistrés, des milliers de maisons ravagées, des quartiers entiers devenus inhabitables (chiffre officiel gouvernement congolais), c’est le bilan de l’ignominie et de l’aveuglement du pouvoir. A cela, il faudrait ajouter 31 morts du dernier crash d’avion le 30 Novembre dernier, 22 morts pour les inondations de Pointe -Noire et 16 (morts) pour ceux de Brazzaville (chiffre encore provisoire) et des milliers de sans abris. C’est très lourd comme préjudice pour un gouvernement qui se dit au service du peuple.

Les années se succèdent mais aucun embelli ne pointe à l’horizon pour un peuple qui n’aspire qu’à vivre dans la dignité. Le dernier rapport de l’Association des droits de l’homme et l’univers carcéral (ADHUC) épingle le gouvernement et révèle que 70% de la population congolaise croupit dans la misère et la précarité. Une misère qui a précipité la mort de bon nombre des retraités plus tôt faute de moyens pour survivre. Au delà des cris de colères qui fussent dans tous le pays, c’est beaucoup plus l’incompréhension et le sentiment de révolte qui animent les congolais.

La cherté des denrées alimentaires dans les deux grandes villes du pays (Brazzaville et Pointe-Noire) dépasse l’entendement de bons nombres d’observateurs. La promesse du Ministre du commerce et de l’approvisionnement promettant faire de l’année qui s’achève : une «  année de lutte contre la flambée de prix » s’est vite résolu à ranger son pompeux slogan dans les tiroirs laissant libre champs aux marchands véreux de faire la loi au détriment des populations. Plus aucun produit de première nécessité n’est vendu aux prix référentiel légal du ministère du Commerce. D’année en année, le budget des ménages explose atteignant au bas mot aujourd’hui la somme de 350.000 f Cfa pour une famille modeste de cinq personnes à raison de 11.700 f Cfa par jour en dépense alimentaires pour un repas convenable.

Inutile ici de faire le récapitulatif des prix des produits ayant excessivement augmenté, plusieurs auteurs s’étant longuement penchés sur le sujet et leurs conclusions sont d’une clarté irréfutable (1). Ce qui est primordial et totalement incompréhensible pour les congolais, c’est de savoir pourquoi ces prix flambent. Pourquoi le gouvernement reste totalement désarmé devant une telle situation qui affecte 70% des congolais ? Pourquoi aucune mesure coercitive n’est appliquée (ne serait efficace) face à cette domination des commerçants véreux ? La tension couve et les langues se délient dénonçant la collusion entre les agents du Ministère du commerce, les policiers, les agents de la municipalité, les douaniers, les transporteurs et les détaillants, revendeurs. Ce conflit récurrent à l’approche des fêtes de fin d’années montre à quel point que les mesures gouvernementales sont inefficaces. L’état serait-il bâillonné par le lobby des commerçants ? Ou serait-on, en plein, dans un immense trafic ou les agents du gouvernement se sucreraient sur le dos des populations déjà à terre ?

C’est sidérant de devoir faire le même constant chaque année.

Une autre aberration qui perdure ! En janvier 2012 « L’Office congolais de l’Emploi et de la Main d’Œuvre, a relevé récemment à Brazzaville, que le taux de chômage au Congo en 2011 a été de 34,2%. Les dernières statistiques  publiées par cette institution montrent que ce taux de  chômage qui frappe les jeunes de 25 à 35 ans n’a pas décru en 2011 ». Et pour résoudre le problème « le gouvernement congolais a prévu, en 2012, d’augmenter les efforts d’investissements par rapport à ceux de 2011, d’environ 40%, soit 1.400 milliards de FCFA contre 1.010 milliards en 2011 pour lutter contre le chômage ». Nous savons tous que rien n’a été investit pour améliorer les conditions des jeunes ni encore moins promouvoir l’insertion ce ceux-ci dans la vie active. L’oisiveté et le chômage des jeunes sont toujours leur lot quotidien. Pire, il serait en augmentation atteignant les 37, 1% de jeunes chômeurs et 49% de la population active.

On nous explique que la catastrophe du 4 Mars aurait dévié les objectifs du gouvernement.

Nous aimerions comprendre : pourquoi « Les dépenses d’investissement dans le budget rectifié se montent à 1961 milliards, 772 millions de FCFA contre 1445 milliards de FCFA dans la loi de finance initiale, soit plus de 500 milliards de crédit supplémentaires affectés à l’investissement ?» avait souligné Gilbert Ondongo. Sans oublié que le budget avait été déjà réajusté prenant en compte les sinistrés de Mpila. Allez comprendre !

Les effets d’annonce sont légions pour ce gouvernement, même retoqué, il n’apporte que des mesurettes de solutions à la crise du chômage. « Les promesses de 40.000 emplois par an de Denis Sassou Nguesso sont restées lettre morte. Elles se sont évaporé comme des écrits sur du sable du Sahara. C’était du grand bluff  »(2).

« Nous ne sentons pas la croissance économique dans nos foyers, notre vie n’ a vraiment pas changé : le loyer est cher, les prix des denrées alimentaires augmentent chaque jour, le transport en public est devenu un casse-tête, en tout cas rien ne marche dans notre quotidien », dit Albert Ndéké, inspecteur en chef des Collèges dans la circonscription scolaire de Brazzaville, abordé par le journaliste de Xinhuasur les conditions de vie des Congolais.

On aura beau réajusté le budget, multiplié les projets d’investissement, la vérité est là, toute crue, Sassou ne sert que les siens et son clan. Il s’en fout qu’on le prenne aux mots, il s’en moque que rien ne soit concrétisé, sa priorité est ailleurs. Pire, tant qu’il maintiendra les congolais dans une situation de chaos permanent, mieux il assurera l’avenir de ses rejetons et neveux transformés aujourd’hui en « maîtres flambeurs incontestés du Congo ». « Ce qui rend la corruption, ou même la simple médiocrité des élites, si funeste, c’est la solidarité qui lie entre eux tous leurs membres, corrompus ou non corrompus, dans la défense du prestige commun. » Le Chemin de la Croix-des-Ames (1948), Mars 1942

C’est cette leçon d’irresponsabilité en perpétuelle renouvellement que viennent de nouveau d’acter les députés en votant le nouveau budget en augmentation pour l’exercice 2013. « Les députés adoptent le budget de l’État exercice 2013. Il est arrêté à la somme de 4.116.897.000.000 Fcfa en recettes et 3.034.701.000.000 Fcfa en dépenses. Les députés l’ont adopté le 11 décembre au cours d’une séance plénière »

Sur le plan de la solidarité, les actes parlent d’eux-mêmes. Nous sommes gouvernés par un clan qui privilégié à outrance le sort des siens. Un gouvernement qui a scindé le Congo en deux. Un gouvernement qui applique la politique du deux poids deux mesures. Pendant que les victimes du 04 Mars, bien que ce soit légitime et incontestable, sont en majorité prises en charge par le gouvernement, les autres victimes des accidents récents ou antérieurs dont la responsabilité est aussi imputable au même gouvernement attendent toujours la moindre indemnisation. Il était sans doute plus utile d’investir des millions de dollars dans l’achat des armes et du matériels de répression policière à la Russie que de s‘occuper des congolais au bord d’une misère qui ne dit pas son nom.

Les inondations et la pollution sèment la désolation dans les deux grandes villes du pays, le gouvernement reste muet. Si l’on est prêt à se mobiliser pour investir des millions pour la construction du marché de Talangai, pourquoi ne le ferait-t-on pour secourir les sinistrés de Makélékélé ou de tchibamba ? Si on peut offrir des véhicules 4×4 flambant neuf à l’armée congolaise (pour ne pas dire certaine unité de l’armée « clanisée »), pourquoi ne ferait-on pas ce même geste pour les sinistrés de Bacongo ou Mbota ?

La solidarité n’à point de visage ni d’appartenance ethnique. L’aide qu’on doit apporter à ceux qui on a besoin ne devrait souffrir d’aucune préférence. Vouloir diviser le peuple pour des questions qui nécessitent le patriotisme républicain n’honore personne.« Le propre de la solidarité, c’est de ne point admettre d’exclusion. » Citation de Victor Hugo ; Proses philosophiques, L’âme (1860-1865)

Tous ces agissements partisans, égoïstes et teintés d’un sectarisme viscéral résultent d’une mauvaise conception de la démocratie. Notre pays est plongé dans une logique démocratique larvée ou la résolution des questions politiques ne se règlent que par l’affrontement. Partant de là, la manipulation du peuple est au centre de l’action politique. Le peuple devient alors l’otage des ambitions malsaines des acteurs politiques. Or, il suffirait que le peuple congolais refuse la corruption, le clientélisme, de servir de chiens de chasse a ces politiciens immatures, l’immobilisme, l’ethicisme, pour servir collectivement le pouvoir qu’il aura rendu souverain. Les bienfaits de la République, dans le cadre de la reconstruction se retrouveront répercuter, de ce fait, dans les besoins d’informer, de soigner, d’éduquer, de conjuguer positivement nos forces vers la culture démocratique, source de paix et de développement. « Si l’on n’a pas une bonne démocratie, il y a une mauvaise légitimité des décisions et quand la croissance diminue, les risques de remise en cause de la solidarité sont considérables. » Erik Orsenna

Nous ne pouvons pas combattre efficacement la misère si nous ne nous organisons pas démocratiquement. Cela n’est possible que si la génération actuelle ne s’approprie pas les grandes interrogations du moment. Ne dit – on pas que« Dans les démocraties, chaque génération est un peuplenouveau. »Alexis de Tocqueville

Dans l’espoir d’un Congo meilleur Bonne année 2013.

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(1)  Brazzaville : Flambée des prix des denrées alimentaires dans les marchés : Roger Pao

Congo-Brazzaville : La flambée des denrées alimentaires en question : Eugène Gampaka

(2) Benjamin BILOMBOT BITADYS : Congo-Brazzaville : Le chômage et la pauvreté, les deux angles morts de l’administration Sassou

Jean-Claude BERI

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2 réponses à La misère au menu des congolais. Par Jean Claude Beri

  1. Tchibota Djembo dit :

    Le slogan de sassou c’est affamé les peuples pour qu’ils obéissent mieux! Des budgets faramineux pour la corruption surtout entretenir des foyers en occident parceque tous voyous ont leurs famille en France , au Maroc, USA ect…si cet argent était dépensé au pays ça sauterait aux yeux! Alors que faire d’ un dérangé mentale qui ne veut pas partir et veut ériger une dynastie ? Avec un pays divisé les nordistes versatile vis a vis de sassou ils condamnes sa gestion mais ont une grande sympathie envers ce salopard, les sudistes ne le considère pas comme président du Congo sinon voleur assassin !

  2. J. NIGER dit :

    Je ne vois pas la pertinence d’un tel article.

    Sasou n’est pas un Président élu. Ce n’est point le peuple souverain qui lui a confié le pouvoir exécutif . Il joue son rôle d’usurpateur. Dès lors, pourquoi s’attendre à une gouvernance juste et moderne?

    Un pustchiste n’a pas la logique d’un esprit sain et libre. Est-il seulement pourvu d’une conscience souveraine? Un despote malheureusement est le valet de sa folie. Sauf pour nous faire gausser, à quoi sert-il d’exiger une dissertation à un singe?
    Ne demandez pas l’impossible à Sassou et à son clan!

    Attendons un vrai, un Président normal , auréolé de la confiance des Congolais pour dialoguer ou demander des bilans objectifs. Nous savons tous que Sassou a de tout temps, incarné l’échec et l’incompétence.

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