FOOTBALL-DIPLOMATIE-CORRUPTION : le cas du Congo-Brazzaville. Par Sam Bousky

diables_rouges

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Les limites de la footballitique, une discipline aux confins de la diplomatie et de la politique dans le football.

Les puristes ne m’en voudront pas pour ce néologisme : la footballitique. Il fallait bien trouver un mot qui convienne à la triptyque FOOTBALL DIPLOMATIE POLITIQUE

L’équipe nationale de football de la République du Congo, les Diables rouges, engagée pour les qualifications en vue de la Coupe du monde de football de la FIFA, Brésil 2014, était très bien partie. Au bout des trois matches de la phase aller, elle comptait déjà 9 points, soit 6 d’avance que tout le lot de ses poursuivants : Gabon, Niger et Burkina Faso. Ce dernier avait perdu à domicile son match inaugural contre le Congo, sur tapis vert. Les congolais se sont vus tous beaux et déjà au Brésil. Sauf qu’il y avait un calendrier des matches retour. Le Congo devait se rendre au Gabon, où il a arraché un prometteur match nul, pendant que le Burkina Faso entamait sa remontée fantastique en infligeant un cinglant 4 à 0 au Mena national du Niger. Toujours en tête, le Congo n’avait besoin que d’un petit point lors de son prochain match, contre le Burkina Faso à Pointe-Noire, pour se qualifier pour le dernier tour. Et patatras ! Vint la première défaite des Diables rouges dans cette campagne, une situation qui devait leur compliquer la suite des événements. Bien qu’étant toujours en tête, il fallait néanmoins composer avec une conjugaison de facteurs pour conserver ce statut. A l’occasion de la dernière journée, trois nations pouvaient encore se qualifier : le Congo (leader désormais contesté), les Etalons du Burkina Faso aux talons et le Gabon en embuscade.

Puis vint le temps de la «  footballitique ». Dans son message sur l’état de la nation au Parlement réuni en congrès, le Président de la République a cru bon féliciter les Léopards de Dolisie et les Diables rouges pour leurs belles performances. Arrêtons-nous un peu sur ce point.

  1. Pourquoi féliciter l’AC Léopards, les Fauves du Niari, à ce moment là ? L’équipe avait remporté une compétition africaine un an auparavant. Elle dispute une compétition africaine des clubs, où, au moment du discours, elle est plutôt mal barrée et risque de se faire éliminer. On y a vu une espèce d’autosatisfaction, l’équipe jouant ses matches à Dolisie, localement au Stade Michel Pont ???? pompeusement – stratégiquement-curieusement-inutilement- bizarrement ????? et j’en passe, rebaptisé Stade Denis Sassou Nguesso.

  2. De quels Diables rouges a-t-on couvert des lauriers ? Ceux qui venaient de se qualifier pour la prochaine édition du Championnat d’Afrique des nations (CHAN 2014) ou ceux dont on attend qu’ils fassent un miracle pour poursuivre l’aventure du Mondial ? Les deux équipes à la fois ? On se perd en conjecture.

Toujours est-il qu’on doit trouver LA solution pour qualifier les Diables rouges pour le Mondial, ou tout au moins, la dernière étape. Calcul : l’adversaire s’appelle Niger, déjà éliminé de la compétition, et qui n’a vraiment plus rien n’à espérer, pas même éviter la dernière place. Victime expiatoire ? Pas vraiment. Cette équipe est malgré tout en nette phase de progression. Cependant, l’on se souvint qu’il y a peu, nous avons aidé financièrement le peuple nigérien, comme nous savons toujours et bien le faire. Cela peut faire l’affaire. Et le président nigérien fut invité à Djambala, le 15 août, pour assister à la célébration du 53è anniversaire de l’indépendance. Décryptage. On est à J-20 d’un match que guettent les burkinabés et les gabonais, deux peuples qui espèrent un faux pas des Diables rouges. Le moindre indice est suspect, la moindre initiative fait l’objet de toutes les supputations. Ce n’était pas pour montrer au président Issoufou cette partie de la population congolaise physiologiquement ressemblante avec les nigériens (les balafrés quoi !). C’était pour s’entendre dire que ses garçons, qui sont éliminés de la compétition, devaient lever le pied pour que les Diables rouges gagnent et se qualifient. Un point, un trait. En d’autres termes, cette aide était conditionnée. A un certain moment, on devait actionner ce dossier comme moyen de chantage. On s’imagine ce à quoi a dû penser le digne président sahélien, voisin Blaise Compaoré. Le congolais moyen s’est interrogé sur la pertinence de l’invitation faite au président Issoufou. Les optimistes béats ont compris que c’était plié, et parlaient même déjà de la qualification. Les burkinabés installés au Congo ont entendu et compris. La footballitique n’est pas une dimension à sens unique, et Blaise Compaoré n’est pas le dernier venu sur la scène diplomatique. N’est-ce pas lui qui avait amené la CAF à invalider une suspension pour la finale de la CAN 2013, affectant son meilleur joueur ? A quelques jours des matches décisifs, la presse (papier et Internet) s’est mise à publier des articles annonçant la crainte d’un match arrangé entre le Niger et le Congo. L’article publié sur le site lefaso.net a été précédé d’un proverbe du jour qui dit « L’essence même de la tromperie ne réside pas dans le mensonge que l’on profère, mais dans les vérités que l’on avance pour étayer le mensonge. » de Philip Kerr.Comme d’habitude dans tout forum, les commentaires sont allés dans tous les sens. Les congolais n’ont jamais démenti ces allégations.

La délégation congolaise arrivée à Niamey a été reçue par des slogans divers, certains vantant avec un brin d’ironie, l’amitié et la solidarité du Congo ( « merci pour vos 50 milliards » !!! Oui, vous avez bien entendu 50 MILLIARDS de CFA), « nous allons vous laisser le match » ; d’autres prédisant une cuisante défaite, car pour eux, le stade Général Seyni Kountché est une forteresse imprenable.

La délégation congolaise en route vers Niamey, se vantait de la diplomatie d’Otchombé, capable d’arracher les visas pour les jeunes qui devaient se rendre à Nice pour les Jeux de la Francophonie, mais aussi et surtout capable de convaincre le Niger de laisser la partie aux congolais, donc au détriment de leurs voisins burkinabés. Mon œil !!! Entretemps, à l’Hôtel Gaweye, QG de la délégation congolaise, une altercation a vivement opposé M. Gérard Bourgoin, un des hommes clés de la footballitique version Otchombé , au ministre congolais des sports. Des joueurs de la sélection congolaise ont même eu envie de boycotter le match, dérangés de voir un expatrié manquer du respect à leurs autorités. Les congolais férus d’histoire du football n’ont jamais oublié les ratés de la footballitique dans les années 80 quand, au cours d’un match des qualifications de la CAN, les Diables rouges avaient ramassé une rouste contre les Léopards du Zaïre au Stade de la Révolution.

A Niamey donc, au terme d’une rencontre âprement disputée, les Diables rouges n’ont pu arracher qu’un match nul, peu glorieux. Ils ont eu le mérite de marquer 2 buts en 10 minutes, soit l’équivalent de ce qu’ils avaient pu faire en 465 minutes auparavant. Pendant ce temps, les burkinabés se contentaient d’un petit but pour écarter les gabonais et coiffer au fil les congolais. Inutile gesticulation après coup : le coach algérien de l’équipe congolaise a identifié un joueur nigérien qui serait en fait malien. Il fallait donc invalider ce résultat, donner une deuxième victoire sur tapis vert aux congolais, synonyme de qualification. 50 millions de CFA ont été promis à ce joueur nigéro-malien… qui a décliné et dénoncé. Le Congo a été débouté de sa réserve contre le Niger. Il y a vraiment des limites à la footballitique.

Ils ne sont pas gentils les nigériens, ils ne pouvaient pas nous laisser le match ? Nous les avons pourtant aidés non ! Entendait-on par ci par là. Oui, ils ne sont pas gentils les nigériens. Au coup d’envoi de la rencontre, leur fanfare avait entonné, comme hymne national, les Trois glorieuses au lieu de La Congolaise. Ignorance ou provocation délibérée ? A la fin du match qu’ils n’ont ni perdu ni laissé, ils ont caillassé un bus congolais.

Oui, Il y a vraiment des limites à la footballitique.

Par Sam Bousky

Diffusé le 19 septembre 2013 , par www.congo-liberty.org

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4 réponses à FOOTBALL-DIPLOMATIE-CORRUPTION : le cas du Congo-Brazzaville. Par Sam Bousky

  1. big king dit :

    Est-ce que il(otshombé) lit ça??? Parce que à sa place je déprimerais! tout semble aller de travers actuellement! Au fait et sa rencontre hier avec Hollande bien passer? Ahhh Papa rien ne va plus comme on dit sur les tapis vers des casinos!

  2. Dieudos Eyoka dit :

    Sassou a acheté des chefs d’Etat français, africains, brésiliens etc… Je ne parle pas des ministres (et de leurs épouses), des journalistes etc de ces mêmes pays. Vous croyez qu’il ne peut pas acheter un match de football.
    Les Congolaids sont trop idiots !

  3. big king dit :

    Ha ha ha le corniaud d’Edou s’est-il fait avoir? Houuuuu il doit bien s’inquiéter sur son sort! plus rien ne lui réussit actuellement! Et comment son rendez-vous d’hier avec Hollande? Il parait que ça a pas été terrible!

  4. marché total dit :

    La corruption est présente dans toutes les strates du pouvoir de Brazzaville. Et dans le département des sports cela ne peut que s’empirer car il a comme principal animateur Alfred Leon Opimba qui a participé aux génocides des 353 disparus du beach. En effet à cette époque, il était ministre de la santé et des populations, et à ce titre faisait partie des principaux négociateurs des accords de rapatriement entre le pouvoir de Brazzaville et le HCR. Il a accueilli avec les miliciens de sassou les congolais de retour de la RDC au beach de Brazza.

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