Denis Sassou Nguesso a-t-il été le complice de Muhamar Kadhafi dans l’attentat du DC10 d’UTA ?

Mardi 19 septembre 1989

Une histoire de la France et de l’Afrique centrale                                              

Attentat du DC10 d’UTA

Brazzaville, 19 septembre 1989

Complicité Denis Sassou- Nguesso /Kadhafi

Témoignage de Paul Kaya, ancien ministre du Congo Brazzaville, à Hervé Zebrowski, dernier collaborateur laïc et bénévole de Monseigneur Ernest Kombo, président de la Conférence Nationale Souveraine de 1991, président de la Conférence épiscopale du Congo Brazzaville, rappelé par Dieu le 22 octobre 2008 à Paris.

               Au mois de décembre 2009, Paul Kaya, un grand ami de Monseigneur Ernest Kombo, avait souhaité me rencontrer. C’est ainsi que je lui donnais rendez-vous à mon bureau parisien. Je connaissais bien l’histoire de Paul Kaya, ce grand homme politique du Congo qui avait fui son pays en 1965 lors d’un putsch, conduit par de jeunes officiers congolais, qui plongea le Congo Brazzaville dans le communisme jusqu’en 1990. Gravement menacé lors de ce coup d’État, Paul Kaya avait pris le chemin de l’exil. Il trouva refuge auprès de Félix Houphouët Boigny, en Côte d’Ivoire, où il devint l’un des acteurs importants du développement économique de ce pays.

               Après la guerre de 1997, au Congo Brazzaville, qui fit, selon différentes sources, entre plusieurs dizaine ou centaines de milliers de morts, coup d’État militaire au cours duquel Sassou Nguesso revint au pouvoir, c’est la France de Jacques Chirac qui supplia Paul Kaya d’entrer au gouvernement de Sassou Nguesso. Paul Kaya accéda à la demande de Jacques Chirac et rejoignit le gouvernement du dictateur. Il démissionna de ce gouvernement quelques mois plus tard, ayant compris le projet plus mortifère que jamais qui habitait le tyran Sassou Nguesso. Jacques Chirac avait également demandé à Monseigneur Ernest Kombo, après la guerre de 1997, de prendre la présidence de l’Assemblée Nationale de la République du Congo. Au nom de la mémoire qu’il devait au Cardinal Emile Biayenda enterré vivant par Sassou Nguesso en 1977 et de tous les martyrs du Congo, Monseigneur Ernest Kombo refusa d’accepter cette mission impossible que lui demandait, par la voix de Jacques Chirac, Denis Sassou Nguesso.

               Je tiens ce témoignage de Monseigneur Ernest Kombo lui-même. Par son refus d’accéder à la requête de Jacques Chirac, on peut dire que Mgr Ernest Kombo avait signé son arrêt de mort.

               J’avais déjà rencontré Paul Kaya, en 2005, à l’Académie des Sciences d’Outre-Mer, rue La Pérouse, à Paris, où il animait une conférence, invité par l’un de ses amis, un membre éminent de cette Académie : Michel Levallois, administrateur de la France d’Outre-Mer, historien et ancien préfet de la Réunion. Ce jour-là, Michel Levallois, Paul Kaya et Catherine Coquery-Vidrovitch, universitaire, historienne spécialiste de l’Afrique, avaient organisé ce colloque qui entendait commémorer le centenaire de la mort de Pierre Savorgnan de Brazza, décédé en septembre 1905, à Dakar. Ce colloque se déroulait sous l’égide de Pierre Messmer, ancien ministre des armées du général De Gaulle, compagnon de la libération, ancien élève de l’École Nationale de la France d’Outre-Mer (anciennement École Coloniale) et ancien gouverneur de l’Afrique Équatoriale Française (AEF). Paul Kaya avait lu Les Assassins du Cardinal, Terreur sur Brazzaville, livre que j’avais publié au début de l’année 2009 et qui évoquait, entre autres, l’histoire de Pierre Savorgnan de Brazza. En mal d’éditeurs, j’avais publié cet ouvrage dans ma propre maison d’édition, les éditions du chercheur d’homme. Ce livre avait eu un certain écho grâce à un journaliste américain, Stephen Smith,  directeur du département Afrique au journal Le Monde, aujourd’hui professeur à l’université américaine de Duke,qui avait écrit un petit article sympathique dans la très fameuse Lettre du Continent, fondée par le non moins grand africaniste Antoine Glaser avec lequel, il lui arrivait de collaborer alors.

               Lors de notre entrevue à mon bureau en décembre 2009, Paul Kaya évoqua, outre mon ouvrage, mon intervention à l’Académie des Sciences d’Outre-Mer. En effet, ce jour-là, à la suite des discours des conférenciers, le maître des lieux, Michel Levallois, membre de cette Académie, proposait à la centaine d’auditeurs que nous étions, de commenter ou de poser des questions. La moyenne d’âge de cet auditoire était d’environ 70 ans et composé pour l’essentiel, à la vue des boutonnières fleuries de Légion d’Honneur, d’anciens diplomates et d’officiers concernés par les questions africaines.

               A la fin de l ‘année 2004 j’étais revenu, quant à moi, d’un voyage à Brazzaville et à Alger où je m’étais intéressé à la question du transfert des cendres de l’explorateur Pierre Savorgnan de Brazza qui, sous l’instigation de Jean Paul Pigasse, devait se faire à Brazzaville pour commémorer, en 2005,  le centenaire de la mort de Brazza. Le premier secrétaire de l’Ambassade de France, que j’avais rencontré lors de ce voyage à Brazzaville, m’avait confié que la diplomatie française déplorait ce transfert des cendres et que les intentions de cette opération de communication commémorative autour du transfert des cendres n’étaient que strictement marchandes. C’était un missionnaire français, le père René Tabard, ancien directeur de la communauté des Pères du Saint Esprit à Brazzaville, qui m’avait permis cette rencontre avec l’ambassade de France. Pierre Savorgnan de Brazza reposait dans un cimetière chrétien d’Alger depuis 1907. Une grande manifestation à la gloire de l’amitié franco-congolaise se préparait à Brazzaville en vue de ce transfert. J’avais fait ce voyage en République du Congo-Brazzaville accompagné d’un jeune prêtre congolais, curé de Mbé. Dans ce village mythique pour les Congolais se trouve encore le siège du vieux royaume Makoko où eut lieu la fameuse rencontre entre l’explorateur Pierre Savorgnan de Brazza et le roi Iloo 1er , dit Roi Makoko, en 1880, au cours de laquelle ils signèrent  les accords d’alliance entre la France et le Congo.  A Mbé j’avais pu être présenté au 17 ème successeur du roi Iloo 1er , le roi Auguste Nguempio. J’avais alors été à même, lors de ce voyage, de mesurer l’extrême rigueur de la surveillance exercée par l’ État policier du Congo Brazzaville.

               A Alger, je retrouvais, au cimetière Bru, la tombe de l’explorateur Pierre Savorgnan de Brazza dans laquelle il reposait depuis près de cent ans, avec son épouse, née Thérèse de Chambrun, et leurs quatre enfants. Elle fut définitivement close en 1962 au décès du dernier enfant de cette famille qui n’aura pas de descendance directe.

               A l’Académie des Sciences d’Outre-Mer, en ce jour de la commémoration du centenaire de la mort de Pierre Savorgnan de Brazza, était présent le petit neveu de Thérèse de Chambrun, Pierre Antoine de Chambrun, héritier, par une généalogie complexe de la famille du marquis de la Fayette et, à ce titre, détenteur par sa naissance de la nationalité américaine. Il avait été, par ailleurs, directeur de la banque du Qatar.

               A Alger, j’avais pu constater que le gouvernement congolais s’était déjà emparé des cendres de la famille Brazza quinze jours avant ma visite : un tas de cercueils fracassés se trouvait sur un bas-côté du monument funéraire ouvert. Selon les dires d’un des gardiens du cimetière, une équipe de Congolais sous l’autorité d’un certain Firmin Ayessa, proche collaborateur de Sassou Nguesso, avait procédé à la réduction des corps pour les embarquer sur Brazzaville. La scène de l’exhumation et de l’ouverture des cercueils avait été filmée par Firmin Ayessa. Des fonctionnaires de la municipalité d’Alger, en charge des cimetières, accompagnaient les Congolais. Ceci, alors que Sassou Nguesso n’avait pas encore reçu l’accord des familles Brazza et Chambrun. J’appris par la suite que l’ambassade de France, qui assure la tutelle des cimetières chrétiens d’Alger, n’avait pas été prévenue.

               A l’Académie des sciences d’Outre-Mer j’étais venu accompagné de deux jeunes : un Italien, arrière petit neveu de Pierre Savorgnan de Brazza et un Congolais, fils du 16ème roi Makoko depuis Iloo1er. Le roi son père, chef traditionnel dans l’ombre mais très reconnu au Congo, s’était opposé, au nom de la mémoire qu’il devait à son ancêtre Iloo 1er au transfert des cendres de Brazza dans la capitale Brazzaville. Il en mourut brutalement, après un repas, d’un AVC suivi d’abondants saignements. Après avoir présenté les deux jeunes descendants de ces emblématiques acteurs de l’Histoire de France, je fis mon témoignage devant les conférenciers et les auditeurs. Mon exposé terminé, l’assemblée stupéfaite marqua un grand silence, puis cinq longues secondes plus tard, un immense éclat d’applaudissements saluait mon intervention.

               Lors de notre rencontre du mois de décembre 2009, c’est ce souvenir de 2005 que Paul Kaya sut me rappeler en me félicitant. Sur mon bureau ce jour-là, se trouvait tout à fait fortuitement un livre épais que je venais de lire. En effet, quelques jours auparavant le juge Jean Louis Bruguière avait fait paraître, aux éditions Robert Laffont, son ouvrage de mémoire relatif aux grandes enquêtes de sa vie de juge d’instruction : Ce que je n’ai pas pu dire.  Au cours de notre entretien j’avais noté le regard de Paul Kaya sur la photo du juge en couverture du volume.

   – «   Vous avez lu le livre que vient de sortir le juge Bruguière, m’interrogea-t-il ?

–       Oui, je viens de le terminer ! Je l’ai acheté spécialement pour son enquête sur le DC10 d’UTA qui s’est écrasé, en 1989, dans le désert du Ténéré, après son escale à N’Djamena. Le livre est bien fait. Cependant j’ai le sentiment, en ce qui concerne la part de l’enquête au Congo Brazzaville, que le juge s’est fait balader par les Congolais. Est-ce qu’il nous raconte tout ? Vraiment j’en doute : il ne nous parle pas d’une rencontre qu’il aurait dû avoir avec Denis Sassou Nguesso, compte tenu du retentissement de cette tragédie qui coûta la vie à 170 personnes de dix-sept nationalités différentes dont l’épouse de l’ambassadeur des États Unis à N’Djaména. Mandaté pour faire cette enquête par la France de Mitterrand, arrivé par Falcon spécial de la République Française à Brazzaville, je doute fort qu’il n’ait pas pu être reçu, directement, dès son arrivée, par Denis Sassou Nguesso. Le juge évoque cependant, dans son livre, quelques questions relatives au fait que le président congolais ait pu être complice sinon informé de ce qui se tramait à Brazzaville. En effet, depuis plusieurs semaines, la présence de Senoussi à Brazzaville n’avait échappé à personne. L’enquête du juge Bruguière révèle clairement et de façon incontestable la responsabilité de la Libye. D’autre part la preuve apportée par la valise contenant l’explosif dans un container d’Air Afrique chargé à Brazzaville pose aussi la responsabilité et les complicités existant au Congo Brazzaville. Toutes les suspicions d’un chargement de l’explosif à l’escale de N’Djaména étaient alors levées.

               Vous voyez, Monsieur le ministre, j’ai toujours eu l’intime conviction que Denis Sassou Nguesso était le complice de Kadhafi. L’attentat s’est produit en 1989, cette affaire a vingt ans. J’ai eu le temps de méditer, avec la mort de Monseigneur Ernest Kombo à l’instant où j’entrais dans sa chambre à l’hôpital du Val de Grâce, l’année dernière, le 22 octobre 2008, et de comprendre comment Sassou Nguesso s’était emparé du pouvoir en 1977. Il est un crime particulièrement révélateur qui résume tous les crimes de ce monstre : l’enterrement vivant au cimetière d’Itatolo de l’archevêque de Brazzaville, Mgr Emile Biayenda, créé cardinal par le pape Paul VI en 1973. Ce crime est un crime rituel, ce n’est pas un crime politique : c’est un sacrifice humain invoquant les forces de la Mort. Je suis entré dans l’âme monstrueuse de cet homme et j’ai compris les sources mystiques du martyre que vit votre pauvre pays depuis ce crime rituel sur lequel s’établit, depuis lors, le règne sans partage de ce tyran. J’ai au cœur la conviction que Denis Sassou Nguesso, allié de Kadhafi et de Moscou en 1989, était informé du sombre projet que la Libye préparait à Brazzaville. Au Congo de Sassou Nguesso rien ne peut échapper à sa police. Par ailleurs, lorsque j’avais évoqué avec Monseigneur Ernest Kombo mes suspicions à l’égard de Denis Sassou Nguesso et de sa complicité sur l’attentat du DC10 d’UTA j’avais été frappé par le long silence que je reçus pour toute réponse. Pour moi, son silence sonnait comme un aveu. »

               C’est alors que Paul Kaya me fit le témoignage suivant :

– « Au Congo Brazzaville un homme savait tout sur le chargement de la bombe dans le DC10 d’UTA : cet homme s’appelle Auxence Ickonga. C’était, à cette époque, le président de la compagnie aérienne panafricaine Air Afrique. »

               Paul kaya m ‘expliquait alors qui était Auxence Ickonga :

– « C’était un  grand commis de l’État, un Congolais du Nord comme Denis Sassou Nguesso, originaire  de Makoua. Il était très proche du président de la République. En tant que PDG de la société Air Afrique depuis 1985, il détenait un pouvoir absolu sur tout ce qui touchait aux questions de l’aviation civile et notamment de l’escale de Brazzaville dont la logistique était assurée par Air Afrique, partenaire d’UTA.  Auxence Ickonga avait étudié à Paris à l’Institut des Hautes Études d’Outre-Mer. C’est dans cet Institut, au cours de son cursus, qu’il rencontra et se lia d’amitié avec Hissène Habré. Il restera toujours proche d’Hissène Habré qui, en 1989, était alors président de la République du Tchad.

               Après le décollage du DC10 d’UTA de l’aéroport de Brazzaville avec son funeste chargement, Auxence Ickonga avait eu connaissance de la liste des passagers, inscrits à la dernière minute, qui devaient embarquer à l’escale de N’Djaména, sur ce vol en direction de Paris. C’était une équipe de diplomates tchadiens et libyens, opposants de Kadhafi, qui se rendait à Paris. C’est alors qu’Auxence Ickonga avait traversé le fleuve Congo pour rejoindre Kinshasa afin de prévenir, de cette capitale étrangère, son camarade Hissène Habré de ne pas embarquer sur le vol UTA. Cette prudence, quant à son coup de fil au Tchad, lui était commandée par sa parfaite connaissance des systèmes d’écoute des conversations téléphoniques organisés par l’État policier du Congo Brazzaville. C’est ainsi que tous ces diplomates en partance pour Paris, parmi lesquels se trouvait probablement le président Hissène Habré, n’embarquèrent pas sur ce vol et eurent la vie sauve. Le désistement de tous ces passagers n’échappa point aux responsables des réservations d’Air Afrique et d’UTA, mêmes si leurs identités étaient tenues secrètes.

               L’enquête très rapidement menée par la police congolaise permit de dépister le voyage éclair d’Auxence Ickonga en RDC et son appel à Hissène Habré. Auxence Ickonga mourra le 22 décembre 1989 d’un brutal AVC à l’hôpital de Brazzaville. Il   fallait qu’il meure   avant que  le juge Bruguière ne puisse  

l’interroger dans le cadre de son enquête diligentée par la France. Hissène Habré, quant à lui, sera renversé en décembre 1990 par Idriss Débi. Il est actuellement, en cette année 2009, solidement tenu au secret dans une prison du Sénégal.

               A l’époque, en 1989, comme vous l’avez peut-être oublié, la guerre faisait rage entre la Libye et le Tchad, notamment au Nord du Tchad dans ce qu’il est convenu d’appeler « la bande d’Aouzou ». Ni Kadhafi ni Hissène Habré ne voulaient désarmer, malgré le désir de la France de Mitterrand lassée de ce conflit. C’est alors que la France avait demandé à Omar Bongo d’engager une mission de conciliation entre les deux hommes, sous l’égide de l’Organisation de l’Unité Africaine. Ceux-ci furent contraints de signer un accord de paix à Alger en août 1989. Aucun des deux belligérants n’avait l’intention de respecter les termes de cet accord. »

               Pour comprendre et réactualiser le contexte des relations entre le Tchad et la Libye en 1989, relations belliqueuses qui ont conduit en août 1989 à la signature des accords d’Alger, oubliés de tous et jamais appliqués,  il convient de lire la remarquable genèse de ces accords d’Alger que nous a laissée le professeur de droit à l’institut d’études politiques de l’Université de Bordeaux, Jean Claude Gautron : La Libye et le Tchad devant la Cour Internationale de Justice ? in  Annuaire Français de Droit International XXXV-1989 : éditions du CNRS.

               Nous nous quittâmes, Paul Kaya et moi, sur le partage de ce terrible secret d’Afrique. Il me demanda :

– «   Puis-je emprunter votre livre ?

–  Oui, monsieur le Ministre, je suis heureux de vous l’offrir. Je vous remercie de l’honneur que vous m’avez fait en venant à ma rencontre. C’est un peu notre ami Ernest Kombo qui est venu me visiter avec vous. Puis-je vous ramener quelque part dans Paris en voiture ?

–   Avec plaisir, me dit-il. »

               Je le ramenais à son domicile, avenue de Versailles dans le XVI -ème arrondissement. Paul Kaya, ce grand serviteur de l’Afrique, qui manqua beaucoup au Congo Brazzaville d’où il a été chassé comme tant d’autres, a été rappelé par Dieu le 25 novembre 2019 à Bobigny. Il repose au cimetière de Bourg-la-Reine, loin de sa terre natale, comme tant d’autres également.

               Ce fut ainsi que se joua, dans les sombres laboratoires des arrières cuisines où se concoctent les poisons de la France et de l’Afrique, le destin tragique des passagers du vol UTA 772 Brazzaville-Paris en 1989. La haine de Denis Sassou Nguesso et de Kadhafi envers la France fut le ressort essentiel de ce drame. Sans la complicité de Denis Sassou Nguesso, Kadhafi ne pouvait atteindre Hissène Habré.  Par ailleurs outre cette haine contre la France, il existait une grande rivalité et une incommensurable jalousie de la part de Denis Sassou Nguesso à l’égard de son voisin, le « grand chef de village » du Gabon, Omar Bongo. En cette année 1989, l’homme de la France en Afrique centrale (ex AEF) n’est autre qu’Omar Bongo. C’est lui qui est en charge, par la France, de la résolution de tous les conflits dans cette sous-région de l’Afrique.               

               Dans un calcul diabolique, en 1990, Denis Sassou Nguesso offrira en mariage sa ravissante fille Edith, docteur en médecine, à Omar Bongo de 30 ans son aîné. Omar Bongo acceptera cette alliance et deviendra le gendre de Sassou Nguesso. De cette union naîtront deux enfants : Omar Denis jr Bongo et Yacime Bongo. Omar Bongo est né en 1935 Congolais. En effet, ce n’est qu’en 1947 que sa région natale de Franceville, fondée par l’explorateur, Pierre Savorgnan de Brazza, sera rattachée au Gabon.  Omar Bongo appartient à la grande famille des Batéké dont le chef traditionnel et spirituel est le roi Makoko.                          

Par cette alliance matrimoniale avec la famille Denis Sassou Nguesso, Omar Bongo souhaitait faire des dirigeants du Congo et du Gabon une grande famille monarchique et devenir ainsi, en quelque sorte, le nouveau roi Makoko dont la dynastie régnerait sur l’Afrique centrale. Sur la photo jointe à ce texte, on peut voir, derrière le Général De Gaulle, le grand-père de la fille bien aimée d’Omar Bongo, Pascaline, le chauffeur du général à Brazzaville et le père de la première épouse d’Omar Bongo, la Congolaise Louise Mouyabi Moukala, mère de Pascaline.

               Ce calcul politique sera le calcul le plus désastreux de sa vie. Il aboutira à la destruction du pouvoir de la famille Bongo sur le Gabon et à l’élévation de Sassou Nguesso auprès des autorités de la République Française, comme acteur politique régnant sur l’Afrique centrale, le faisant reconnaître comme un « dictateur éclairé qui convient aux Africains » dixit à moi-même un diplomate français, secrétaire général adjoint des Nations Unies, alors que je lui demandais de plaider pour la libération du général Jean Marie Michel Mokoko,  prisonnier politique de Sassou Nguesso depuis 2016.  J’avais fait cette demande par l’intermédiaire d’un pasteur français, ancien missionnaire en Afrique centrale.

               Depuis la prise de pouvoir en 1977 de Sassou Nguesso, pouvoir mystique qu’il tenait de son indicible crime rituel sur la cardinal Émile Biayenda, le tyran sanguinaire est toujours reçu avec ses légions,

quarante-huit ans après cet assassinat, comme un prince au Vatican : dernièrement lors de sa visite du 25 novembre 2024, et à la place d’honneur, au premier rang de la cathédrale Notre Dame de Paris, aux côtés du Président Macron et du Président Trump. Ainsi il se voit honoré par la communauté internationale malgré sa complicité avec Kagamé et la cession de 1000 km² de terre du Congo consenti à ce dernier, mettant alors Kinshasa à une portée de canon des légions du Rwanda basées au Congo Brazzaville.

               Le 16 février 2025, sur France 24, lors de l’interview que fit Marc Perelman à Addis-Abéba avec Sassou Nguesso, ce dernier proposait ses bons offices en vue des négociations de paix entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda, feignant d’ignorer que l’ambassade du Congo Brazzaville avait été mise à sac à Kinshasa par la population de cette capitale, le 25 janvier 2025, en même temps que l’ambassade de France et l’ambassade des États Unis. En France aucun média mainstream n’a dit mot sur le saccage de l’ambassade du Congo Brazzaville à Kinshasa. Denis Sassou Nguesso sera-t-il le médiateur de la paix entre Kagamé et Félix Tshisekedi, malgré la haine du peuple de Tshisekedi à son encontre et sa complicité avec Kagamé ?

               Omar Bongo, né Albert Bernard Bongo, se convertira à l’Islam après la mort du général De Gaulle au temps de la France de Georges Pompidou. L’ambassadeur de France à Libreville me révélera que Albert Bernard Bongo avait confié à la France son désir de devenir musulman, souhaitant, pour le grand projet de son règne, la construction du chemin de fer transgabonnais Libreville-Franceville, trouver ainsi des financements auprès de kadhafi qui lui avait offert de participer à ce grand chantier. Jacques Foccart avait donné son assentiment et la France, quant à elle, n’était pas mécontente de voir le grand dirigeant de son « émirat gabonnais » devenir membre de l’OPEP (Organisation des Pays Exportateur de Pétrole)

               Omar Bongo fut initié à la Franc-maçonnerie au début des années 50 sur les conseils d’un inspecteur des Postes (PTT) où il travaillait à Brazzaville, après ses études secondaires au Congo. C’est à ce titre et au grade élevé dans cette obédience qu’il devint un frère très proche de Michel Baroin, grand maître du Grand Orient de France et ami de jeunesse à Science Po de Michel Rocard et de Jacques Chirac. Dans les grandes profondeurs de leur fraternité maçonnique, les grands maîtres Omar Bongo et Michel Baroin entretenaient des liens de grande confiance, d’amitié et d’entraide. Au début du mois de février 1987, Michel Baroin entreprit un voyage à Brazzaville pour rencontrer Denis Sassou Nguesso. Le président Omar Bongo avait sans doute demandé à Michel Baroin d’user de sa grande influence pour convaincre Sassou Nguesso, alors président de la République Populaire du Congo communiste, de rejoindre le camp occidental. Le 5 février 1987, Michel Baroin trouva la mort dans le crash de son avion peu après le décollage de Brazzaville. Il venait de rencontrer le président congolais, Denis Sassou Nguesso. Il faut rappeler qu’en cette année 1987, Jacques Chirac était le premier ministre d’un gouvernement d’alternance de la France de Mitterrand, Jacques Foccart, quant à lui, restait le conseiller Afrique de Jacques Chirac. L’appartement de Jacques Foccart, rue de Prony, jouxtait le siège de la Garantie Mutuelle des Fonctionnaires dont Michel Baroin était le Président directeur général.              

               Les victimes du DC10 d’UTA vol 772 Brazzaville-Paris du 19 septembre 1989 sont avant tout les victimes des dérives mortifères des relations entre la France et l’Afrique centrale, faites d’indicibles secrets, tant en France qu’au Tchad, au Congo, au Gabon…

Hervé ZEBROWSKI

Diffusé le 25 février 2025, par www.congo-liberty.org

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5 réponses à Denis Sassou Nguesso a-t-il été le complice de Muhamar Kadhafi dans l’attentat du DC10 d’UTA ?

  1. Ange Diawara dit :

    C’est un secret de Polichinelle maintenant !
    Honte aux dirigeants qui serrent la main de ce lâche assassin d’enfants, de femmes et d’hommes de toutes origines, passagers d’un transport aérien civil.
    Un diable qui aurait dû être éliminé depuis longtemps

  2. pierre michel dit :

    le BEA francais, car uta etait une compagnie aerienne francaise, la FAA americaine car lavion etait de fabrication americaine et le constructeur Mac donnell douglas constructeur du DC10 , dans leurs rapport d’enquete sur cet attentat n’avaient jamais mentionne le nom de denis sassou ng.

    votre texte est un vrai melange. on y trouve de tout et du tout. du gl de gaulle ,domar bongo ,de la franc maconnerie de pascaline bongo du rwanda de donald trump de felix tchissekedi de l’opep de paul kagame du roi makoko de paul kaya… quel rapport avec le DC10?

    savorgnan de brazza y est meme cite. quel rapport avec l’explosion du DC10?

  3. Le fils du pays dit :

    Noko alias Pierre Michel l’un des perroquet de l’imposteur Dahomeen Sassou Denis alias Nguesso.Votre parrain de mafia et agent de l’imperialisme Francais au Congo est bien un criminel.Tous ces employeurs le savent tres bien.
    Mobutu le Togolais serviteur zele des gringos et des Francais ne revenait pas ces maitres Francais l’ont refuse l’acces a leur territoire pour les soins medicaux.
    C’est le prix que tous les valets des empires payent quand ils sont en difficultes ou a la fin.
    Le cas d’un certain Omar Bongo un autre serviteur de la France qui avait fini sa vie dans un hopital de Barcelone en Espagne doit vous faire reflechir.

  4. pierre michel dit :

    ECLAIRAGE

    au sujet du cardinal emile biayenda

    contrairement a vos ecrits, le cardinal biayenda du temps ou il fut archeveque de brazzaville etait adversaire politique a mr al m debat, qui lui etait hostile a labbe fulbert youlou premier president de la rep et condamne par contumace en juin 1966, par une juridiction de mr al m debat. acte que mgr emile biayenda n’avait jamais approuve. il ne pouvait pas accepte que labbe f youlou premeir president de la rep catholique comme lui soit juge par contumace comme un vulgaire contrebandier

    il y avait une inimitie politico religio ethnique entre labbe fulbert youlou et al m debat

    labbe etait lari et catholique , al m debat etait kongo et protestant

    en 1965 mr al m debat sadressant aux laris ( les residents de bacongo et de makelekele) disait que sous un angle purement geographique le groupe ethnique lari nexistait pas. il n y avait disait que les tekes( avales actuellement par les mbochis) et les kongo( avales eux aussi par les laris)

    attention a vos ecrits que vous ne connaissez pas tres exactement lhistoire du congo brazzaville

    le cardinal emile biayenda etait farouchement oppose a al m debat. al m debat avait pour chef de cabinet militaire le capitaine j j y opango , qui fut eleve au rang de chef detat major de l’apn(actuelle fac) par le commandant marien ng une fois president de la rep.

    vous comprenez tout de suite que le cardinal biayenda etait bien connu de yombhy opango.

    LE CARDINAL E BIAYENDA NA RIEN AVOIR DANS LEXPLOSION DU DC 10 ET VEUILLEZ RESPECTER SA MEMOIRE

  5. Le fils du pays dit :

    Noko alias Pierre Michel vos contre verites ne sont pas internelles.
    Vous les pigeons qui mangent dans les mains ensanglees du sang des Congolais de l’imposteur Dahomeen devenu Mbochi d’Oyo votre jour de chomage arrivera comme fut celui des serviteurs de l’imposteur le Togolais Mobutu.

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