De l’aberration du tribalisme, régionalisme et autres ismes. Par Marcelline Fila-Ndziendolo

De l’aberration du tribalisme, régionalisme et autres ismes

Le roman présente l’histoire de Louzolo, une veuve qui se laisse séduire par un certain Mfum. Elle a une fille avec ce dernier. Malheureusement cet homme qui est un polygame ne la prendra jamais comme une énième épouse. Dans cette société du royaume de Fukissa qui rappelle le pays de l’auteure, est dévoilé le destin de la fille de Louzolo qui a grandi sans l’amour paternel et qui s’est installée au Canada car mariée à un autre Africain et mère de deux petits bambins. Aussi, reviennent chez Louzolo les atroces souvenirs des guerres qu’a connues son pays et qui l’ont forcée à l’exil. Louzolo relate sa vie au pays à sa fille avant qu’elle rejoigne au Canada aux côtés de ses deux petits-enfants. Une vie au pays marquée par les antivaleurs tels le tribalisme, le régionalisme, le népotisme… Et l’héroïne de rêver d’un pays où on pourrait vivre agréablement en balayant ces antivaleurs qui freinent son développement et celui du continent. Ce récit se présente, à certains moments, comme un texte d’essai. L’auteure quitte l’espace de la narration pour prendre celui de la réflexion quand son argumentation est appuyée par d’autres auteurs.

 

Un autre regard sur la guerre de Brazzaville

Un sujet développé abondamment dans le littérature congolaise. Et Marcelline Fila-Ndziendolo, qui n’est autre que Fila-Matsocota, n’a pas été indifférente à ce morceau triste de l’histoire de son pays. A travers cette tragédie de Brazzaville,  l’auteure dénonce un mal qui ronge le continent, le tribalisme. Et c’est ce fléau qui sera l’une des causes du malheur qui va s’abattre sur son pays : « (…) Dans la zone septentrionale (…) on parlait d’un conflit entre deux tribus rivales qui avait commencé dans leurs villages respectifs » (p.23). Et les populations de la ville sont surprises par ce conflit avec une proliférations de milices armées au services des politiciens.. C’est avec amertume et désolation que le pillage de la ville avec mort d’hommes est raconté par Louzolo qui est obligée de fuir la ville pour éviter l’irréparable. Les villages et les forêts seront les abris de ces déplacés. A travers les tribulations que vit l’héroïne Louzolo, l’auteure nous décrit un pays meurtri sur fond de la critique des hommes politiques, responsables des souffrances des populations. Des acteurs politiques qui marginalisent les populations pour des intérêts égoïstes : « (…) pendant que le peuple innocent payait de la sorte son tribut à la guerre, les responsables politiques (…) s’engraissaient et envoyaient leurs familles à l’étranger où ils avaient gardé leur fortune au chaud » (p.27). Pédagogique et didactique est le texte où l’auteure s’en prend au tribalisme et ses conséquences malheureuses vécues pendant la guerre. Elle ne s’empêche pas de « moraliser » ses compatriotes en demandant l’amour qui devrait être plus fort que les identités comme on le remarque en Europe et en Amérique où le nationalisme prime l’individualisme.

 

Le rêve de Louzolo

Louzolo vit dans une société marquée par « le tribalisme, le régionalisme et autres ismes » et la mauvaise gouvernance de ses acteurs politiques. Et Louzolo rêve pour un changement de mentalité dans son pays. Pourquoi être égoïste comme cet homme politique qui ne s’intéresse qu’à sa propre région alors qu’il devrait penser nation comme le stipule l’auteur : « On ne doit pas suivre l’exemple de ce ministre (…) qui fit des pieds et des mains pour développer les infrastructures routières et ferroviaires de sa région d’origine, sans les continuer jusqu’aux régions voisines » (p.72). Et si l’on mettait fin aux guerres tribales et fratricides dans le pays pour s’occuper de son développement ! Et si l’on pouvait pensait « Nation » à la place de « Région », se dit l’auteure. Cette dernière rêve que les produits agricoles de son pays rivalisent avec ceux des pays comme la Côte d’Ivoire et le Maroc dans les supermarchés de Mputu. Ayant voyagé et découvert le progrès des pays développés dans presque tous les domaines, Louzolo souhaite que les hommes au pouvoir comprennent l’enjeu de ce développement qu’elle voit multiforme. L’or vert pourrait par exemple être bien géré : « Au lieu de vendre aux étrangers nos riches forêts à des prix dérisoires, les habitants du royaume devraient s’unir pour créer sur place des sociétés de transformation de bois » (p.74). Revaloriser la médecine traditionnelle qui revient à la mode, se servir des nouvelles technologies par les panneaux solaires pour avoir une source d’énergie à bon marché, développer l’élevage dans les régions propices, tels sont les quelques éléments qui définissent le rêve patriotique de Louzolo. Aussi au sujet de l’élevage dans son pays, elle ne peut s’empêcher de s’insurger contre les antivaleurs du pays : « Où sont passés les bœufs de la région du Niari à Mpassa qui jadis fournissait de la viande non seulement à cette localité, mais aussi à toutes les autres villes du royaume (…). Le tribalisme et le régionalisme à outrance les ont-ils tués ? » (PP.75-76). Et le rêve de Louzolo emmène l’auteure à la réflexion qui épouse une approche didactique et même pédagogique.

 

L’essai au service du roman

De l’aberration du tribalisme, régionalisme et autres ismes apparait tellement didactique et pédagogique qu’il n’échappe pas à l’argumentation. Dans son trajet, le texte se libère, à un certain moment du mode récit, pour épouser le discours qui se justifie du passage des temps du récit (imparfait, passé simple…) aux temps du discours (présent, futur, conditionnel…). Aussi, l’auteure utilise-t-elle la technique du « livre dans le livre » pour argumenter scientifiquement son raisonnement. Pour s’indigner des richesses de son pays qui sont à la merci des étrangers, elle cite un autre auteur essayiste : « Afrique Pillage à huis clos. En Afrique, pétrole n’a jamais rimé avec prospérité, mais plutôt avec pauvreté, corruption, instabilité politique et guerre civile » (p.86). On remarque que les dernières pages de l’ouvrage se présentent comme un monologue intérieur de l’héroïne. Après avoir épilogué  sur les antivaleurs de son pays, et particulièrement le tribalisme, Louzolo rêve de voir « les enfants de toutes les tribus du royaume [qui] se donneraient la main (…). Kabu et Kani [ses petits-fils] verront peut-être les rêves de leur Mamy se réaliser » (p.88).

Simple à lire, ce roman pose des problèmes actuels du pays de l’auteure, en particulier et du continent en général. C’est une œuvre didactique que l’on pourrait largement divulguer au niveau de la jeunesse pour son éducation civique dans une Afrique qui commence à être gangrenée par beaucoup d’antivaleurs. Et sa préfacière Marie-Léontine Tsibinda de nous inviter à «  [plonger] dans la rivière de [ce roman] afin de nous purifier de toutes nos impuretés et chanter en chieur le soleil neufs du royaume fukissien riche en espérance et en amour ».

 

Noël Kodia-Ramata

 

  • Marcelline Fila-Ndziendolo, De l’aberration du tribalisme, régionalisme et autres ismes, éd. Publibook, Paris, 2015.
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5 réponses à De l’aberration du tribalisme, régionalisme et autres ismes. Par Marcelline Fila-Ndziendolo

  1. VAL DE NANTES , dit :

    C’est un roman à envoyer à DOKANGA MINISTRE DE LA JEUNESSE .

  2. LE CONGO2016 dit :

    Pourquoi soufrons-nous? Pourquoi cette dictature?
    Et bien la réponse est très simple, c’est parce que notre colon la France n’a pas évolué.
    A la veille des intendances d’Afrique, certains colons comme l’Allemagne, l’Angleterre… se sont mis a réfléchir comment vivre après l’indépendance des colonies. ils ont pondu ceci, accorder l’autonomie aux anciens colonies, en développant d’autres forme d’économies. Aujourd’hui l’Allemagne est fière d’être au premier rang en Europe l’Angleterre a mis au point le Commonwealth (vivre ensemble). Le Portugal après avoir opposé la résistance a fini par comprendre qu’il fallait développer les relations équitables avec les anciennes colonies.
    Pendant ce temps la France s’est dit plus malin en faisant marche arrière. Elle a mélopée des structures comme le CFA (plus 60% de revenu de chaque pays utilisateur par en France), la franceafrique c’est-à-dire la dépendance politique des colonies. Après cela la France c’est mise a dormir en vivant sous économie de rent sur les africains.
    Aujourd’hui la France rien quand laissant les congolais libre de leur politique, en faisant une politique du gagnant gagnant. La France perdrait son rang au niveau de l’Europe c’est pour cela elle développe des fausse théories comme sassou a le droit de consulter son peuple, un referendum avec une constitution non voté par les congolais. L’opposition les candidats malheureux, renflouer le Congo des mercenaires (la légion étrangère française). Le Congo vie une multitude de génocides au nom de sassou.

    ALORS CHERS COMPATRIOTES LE PREMIER JUILLET TOUS DANS LES RUES SANS ATTENDRE LA PRÉSENCES DES OPPOSANTS, AUX OPPOSANTS D’ACCOMPAGNER LE PEUPLE. NOTRE LUTTE N’EST PAS TRIBAL NI D’UN SIMPLE POUVOIR MAIS CELLE DE L’INDÉPENDANCE, POUR LE BIEN VIVRE ENSEMBLE DEMAIN.
    SASSOU LE REPRÉSENTANT DE LE COLONISATION DOIT PARTIR.
    VIVE LE CONGO INDÉPENDANT

  3. VAL DE NANTES , dit :

    A QUAND LE CONGOXIT,?
    INSPIRONS NOUS DES ANGLAIS

  4. Mwangou dit :

    Sassou Nguesso ne peut pas ne pas être lui-même, i.e. tribaliste… ça serait trop lui demander que de faire autre chose… C’est ce tribalisme trop profond chez lui qui fait qu’il n’a jamais pu hésiter de sacrifier un ami qui l’a aidé dans sa jeunesse politique comme Bouissa Matokot…D’où, chez lui, le tribalisme n’a que du bon…

  5. MINA dit :

    J’espere qu’un jour vous accepeterez definitivement que SASSOU n’est pas Congolais et qu’à titre, il se fout de nous, les VRAIS CONGOLAIS.

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