Sassou-Nguesso n’avait pas intérêt à voir le Pape François accomplir le miracle de la paix à Bangui ? Par Rigobert OSSEBI

Le Pape François lors de sa visite à la grande mosquée du quartier musulman de Bangui (Centrafrique)

Le Pape François lors de sa visite à la grande mosquée du quartier musulman de Bangui

Le dernier voyage du Pape François en Afrique n’a pas suscité un grand intérêt parmi les responsables des médias français. Quelques bribes de ci de là et très peu d’images de la rencontre du Saint Père avec la population centrafricaine. Pour en voir de larges extraits et assister en direct aux importantes cérémonies, il fallait aller sur CNN ou sur la très confidentielle chaîne KTO.

Le dernier Chef d’Etat européen qui avait été reçu à Bangui était un Français, un autre François. C’était en février 2012, la capitale centrafricaine était sous très haute protection. Le président Hollande y avait rencontré la présidente Catherine Samba-Panza puis les représentants de la communauté musulmane dans leur propre quartier. Il avait constaté les importantes saisies d’armes réalisées par ses soldats. De nombreuses Kalachnikov, fabrication russe ou chinoise sûrement débarquées par le port de Pointe Noire, contribuaient à la terreur dans le pays tranquille qu’avait toujours été celui de l’Oubangui-Chari.

Que le Pape puisse se rendre à Bangui, pacifiée presque deux années plus tard, était tout à l’honneur de la France et de ses alliés principalement africains. Pourtant incroyablement, les mises en garde, militaires, sécuritaires, diplomatiques, ont fusé de toutes parts. A tel point que le Chef de l’Etat du Vatican concéda lors des deux premières étapes que la dernière, en Centrafrique, était compromise et qu’elle pourrait être annulée au dernier moment… Et tout le monde s’attendait à ce qu’elle le soit !

Jorge Mario Bergoglio, avant d’être pape, jeune étudiant, pour subvenir à ses besoins financiers, avait été videur dans un club mal famé de Cordoba en Argentine. C’est un homme fort et courageux qui avait choisi d’être prêtre et d’embrasser la vie d’ecclésiastique. Elu Chef de l’Eglise, il avait pris le nom de François en référence à Saint François d’Assise, saint des pauvres et de la paix, respectueux de la création de Dieu, donc de l’environnement. La visite de Bangui se tint alors comme se l’était promis Jorge Mario.

L’Afrique est un continent que l’on veut garder mystérieux, opaque et impénétrable. Les parrains qui sont à sa tête n’ont aucun intérêt qu’une lumière médiatique vienne se poser là où ils ne le souhaitent pas. Alors parfois il suffit de quelques secondes d’inattention pour que des vérités explosent ; pires que des bombes pour leurs régimes ou leurs pouvoirs comme cette femme centrafricaine excédée qui déclara sur TV5 : « ce qui se passe chez nous ce n’est pas une guerre religieuse. Ce sont les politiciens qui ont manipulé nos enfants pour prendre la couverture d’une guerre religieuse… ! »  

Alors, nous n’avons rien vu ni su du formidable engouement qu’avait suscité la visite papale ainsi que l’espoir d’une réconciliation et d’une paix entre tous les Centrafricains. Certains observateurs avaient relevé le visage grave qu’empruntait le plus souvent le Saint Père. Il n’était ni soucieux, ni apeuré. Il était plongé dans la plus grande perplexité de constater le meilleur accueil qui lui était réservé tant dans les quartiers catholiques que musulmans. Non ! Il n’avait pas rencontré parmi eux la haine de l’autre ; et quels curieux musulmans que ceux du PK5 qui tendaient leurs enfants pour rencontrer la main du saint homme catholique ? Peu leur importait sa religion, seule la bénédiction comptait !

Romilda Ferrauto, l’envoyée spéciale de Radio Vatican assistait à la messe servie par le Saint Père ce lundi 30 novembre. « Difficile de décrire l’enthousiasme qu’a suscité son arrivée au stade Boganda plein à craquer. Pourtant habitué aux bains de foule, le Pape François semblait lui aussi impressionné par cette explosion de joie. Signe du climat de joie qui règne à Bangui, l’Imam Kobine Layama, le membre musulman de la plateforme interreligieuse a lui aussi été ovationné… »

Curieusement les grandes diplomaties n’ont pas cherché à capitaliser sur cette avancée substantielle. Si cette courte étape papale avait été médiatisée normalement, les acteurs centrafricains et leurs voisins n’auraient pas osé envoyer leurs chiens commettre leurs basses besognes. Alors il est légitime de se demander : « qui n’avait pas intérêt à voir le Pape François accomplir le miracle de la paix à Bangui ? »

Le Monde a alors rapporté, le 2 décembre dernier, l’assassinat d’un Musulman. Quoi de plus facile, pour un illuminé ou un manipulé de tuer gratuitement un homme catholique ou musulman, ou juif ? Noir ou blanc ? Nous le constatons partout dans le monde maintenant. C’est devenu une mode de tuer des innocents. La Kalachnikov ne vaut, quand elle n’est pas donnée, que 150 $ à Bangui et elle n’a pas été fabriqué en Afrique…

D’autres actes isolés ont été commis depuis, des morts, des barricades, comme des piqûres de rappel qui justifieraient la nécessité du maintien du poste de Médiateur confié au personnage le plus emblématique et le plus trouble qui soit : Denis Sassou Nguesso. Et paradoxalement tous les évènements bien plus graves qui surviennent au Congo sont minimisés quand ils ne passent pas totalement inaperçus. Au prétexte que le tyran congolais aide à résoudre une pseudo-crise centrafricaine (dont il est à l’origine), Sassou Nguesso peut agir, nous le constatons en permanence, comme bon lui semble chez lui !

Le même dictateur était présent à Paris pour la COP21 avec pas moins de six ministres et logé au Royal Monceau. Il a mis à profit son séjour pour recevoir Jean-Yves Le Drian, le ministre français de la Défense toujours au même prétexte officiel du dossier centrafricain dans lequel il est totalement inefficace ; contrairement au Pape François comme nous venons de le voir. Il en a également profité pour déjeuner sur le site du Bourget avec Ségolène Royal.

Le Drian et Sassou-Nguesso à Paris (Cop 21)

Le Drian et Sassou-Nguesso à Paris (Cop 21)

Cette dernière, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, à l’inverse des Yamina Benguigui, Christiane Taubira, Elisabeth Guigou (par son époux interposé), Anne Hidalgo, Annick Girardin et quelques autres dont Jean-Yves Le Drian et Manuel Valls, avait toujours esquivé son tableau de chasse relationnel. Le putschiste, constitutionnel pour une 3ème fois, conforte ainsi sa position face une cellule africaine de l’Élysée, qui résiste toujours à ses charmes.

Anne Hidalgo à Brazzaville en septembre 2015

Anne Hidalgo à Brazzaville en septembre 2015

 S’agissant de Denis Sassou Nguesso, tout est excusable : les assassinats d’anciens présidents, d’ecclésiastiques, de Cardinal, les guerres civiles, les putschs armés ou constitutionnels. De grands observateurs de la scène africaines, comme Christophe Boisbouvier, ne craignent pas d’écrire sans la moindre honte ni pudeur : «  Ainsi vont les relations diplomatiques à l’heure des grand-messes internationales. Le cafouillage autour du référendum constitutionnel congolais ? Sans doute une volonté de ne pas froisser son invité à la COP21, le président Denis Sassou Nguesso. Qu’importe. Le péril climatique ne mérite-t-il pas quelques entorses à l’éthique et une bonne dose de realpolitik ? Si, diraient certainement les climatologues qui voient le thermomètre grimper inexorablement malgré les promesses. »

« Qu’importe ! dit-il ! » Le peuple congolais peut bien crever par le manque de soins, de faim et par les armes accumulées par le tyran, comme s’il pouvait représenter à lui seul l’espoir de la planète !

Face à tant de mauvaise foi et d’intérêts obscurs, un homme a entre ses mains la solution qui pourrait bouleverser la donne dans cette Afrique Centrale qui compte tant de Chrétiens. Cette solution est mystique et le Pape François a ce pouvoir. Non pas en se rendant encore une fois sur ce continent mais en rendant seulement justice. C’est celle que le Cardinal Emile Biayenda, mort étouffé deux fois, attend depuis bientôt 38 ans. Ce premier martyr, avant ceux du Père Popieluszko et de Mgr Romero, par la lumière de sa canonisation ébranlera ce système pervers qui tient en otage une grande partie des populations d’Afrique Centrale. Une nouvelle guerre civile pourrait ainsi être épargnée à la population du Congo Brazzaville pour laquelle l’homme d’Eglise, enterré vivant, avait déjà accepté son martyr.

Mais même au Vatican, des lobbies puissants s’opposent à cette canonisation ; non pas au prétexte que l’apartheid sévirait au Paradis. Gageons que si le Pape François ne peut pas le faire Jorge Mario Bergoglio, lui, le fera !

Cardinal Emile Biayenda Santo subito !

Rigobert OSSEBI

Diffusé le 11 décembre 2015, par www.congo-liberty.org

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6 réponses à Sassou-Nguesso n’avait pas intérêt à voir le Pape François accomplir le miracle de la paix à Bangui ? Par Rigobert OSSEBI

  1. Fouégo dit :

    En tant que médiateur, pourquoi sassou n’a pas été invité à Bangui ? Le pape y est allé pour des questions de paix, lui, sassou médiateur, ce serait l’occasion d’être à côté du saint père. conjugués les efforts de paix: simple à répondre. sassou fait partie des fossoyeurs de la paix en RCA, il joue les pyromanes. D’où sa mise à l’écart à cette rencontre riche en enseignements. La petite france, ses maitres à penser avec.

  2. Anonyme dit :

    J’en conviens a dire a dire que toutes ces grimaces de Hollande et tous politiques Francais avec leurs gouverneurs Africains sont arrivees a leur terme. Le temps que cela prend n’est la preuve de leur force, mais au contraire leur exposition a un jugement terrestre.
    Qu’est ce qu’on decouvre: Tous ne font que mentir et sont rattrapes par leur propos. Tels ont termine les Mussolini tels ils finiront tous. Hollande a ete sauve le 13 Novembre par le service de renseignement du roi du Maroc. Et la guerre dans laquelle il vient de se lancer, non seulement qu’il ne la gagnera pas, mais c’est qu’en plus il met la vie des differents touristes Francais en danger partout dans le monde. Et c’est vraiment triste.

  3. Anonyme dit :

    Très bel article !!!

  4. RESEAU CONGO-MFOA dit :

    Le Pape François n’est pas de ces lobbies militaro-politico-industriels mafieux de quelque pays européen qui mettent le FRIC avant les vies humaines quitte même, pour ce faire, à créer, organiser et soutenir les guerres de purifications ethniques en Afrique…., à couvrir des génocides et des crimes contre l’humanité.

  5. Bagana dit :

    « Madame Hidalgo, vous savez, j’ai bien connu votre prédécesseur Jacques Chirac ! Je l’avais beaucoup aidé pour atteindre la présidence de la République française ! On me dit que vous avez le même projet et cela me fait bien plaisir ! »

  6. Anonyme dit :

    Selon Lemag du Maroc, 10900 soldats ont dû être mobilisés pour assurer la sécurité du Pape à Bangui. Mensonge et affabulation. http://www.lemag.ma/Le-Pape-Francois-protege-par-le-Maroc-et-la-France-durant-sa-visite-en-Centrafrique_a92341.html
    Tout est bon pour discréditer la visite du Pape et masquer la chaleur de l’accueil qu’il a reçu à Bangui. Voir sur la photo de l’article

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