LES ESCROCS POLITIQUES DE LA DIASPORA CONGOLAISE. Par Dina Mahoungou

mahoungouEn dépoussiérant les livres de ma bibliothèque, ce 22 février 2013, je redécouvris le subtil écrivain Alexandre Vialatte. Il n’aura pas fallu moins de deux secondes pour que je me mette à rigoler, enfin, je me remémorai cette citation qu’il déclama en privé, devant ses amis. On sentait qu’elle était bien polie et choisie : « L’homme n’est que poussière, c’est dire l’importance du plumeau ».

Assis en face de mes conquêtes (les beaux ouvrages), je profitais de cette journée simple et tranquille et je relisais d’anciens papiers, des brouillons, des récits inédits que j’avais placés ça et là dans mes tiroirs. Et, fiat lux ! je tombais sur le début d’une « short story » que j’avais abandonnée faute de temps.

Dans ce soliloque, le principal personnage, seul, est assis à la terrasse d’un café et pense au pays natal. C’est un homme grincheux, sa vie privée s’effondre, c’est un homme blessé qui se parle à voix basse et dit : 

  • Nous avons cru faire une pause thérapeutique pour le Congo, à attendre que tout se passe. Qu’à cela ne tienne puisque nous avons réinventé nos petites histoires de vie ailleurs. … Nous autres de la diaspora sommes dans un labyrinthe, nous ne pouvions plus aller ni au bout de nous-mêmes, ni au-delà de nos rêves … Notre point de convergence, ce n’est que de la lâcheté, la nécessité de nous unir s’est effacée. Le « lombric agricola » est déjà dans la carcasse en décomposition et nos corps ne vibrent plus à l’appel du pays natal. 

Notre homme ne se saisissait plus dans l’immensité de ses agitations et puis devenait résolument silencieux, impassible, et d’une désespérante gravité.

Celui-ci venait de découvrir, devant la terrasse d’un café, que sa vie n’était qu’une succession de métaphores. Ᾱ Paris, leader de pacotille, il avait menti à toute une jeunesse. Celle-ci heureusement, l’avait découvert.

Au Congo, il avait commis plusieurs exactions, il serait à nouveau en danger là-bas. Quoiqu’il s’astreigne à inventorier toutes les tentatives antérieures, aucune solution ne s’ouvrait à lui. Il pouvait enfoncer toutes les portes déjà ouvertes, utiliser les passages déjà empruntés, toutes ses esquisses préparatoires ne mèneraient à rien : l’homme était foutu.

C’est une transgression que cet homme cherchera à justifier, à réparer, à annuler, et pour laquelle il devrait être puni mais il tentera de toujours éviter cette punition. 

Cet homme vivra toute sa vie dans le mensonge. Sa méchanceté se manifestera avec plus d’acuité alors qu’il voudra embrigader toute la jeunesse de la diaspora pour préparer le grand retour.

Il agit sournoisement avec une cruauté superlative pour se racheter auprès des hommes du pouvoir. Dans une apathie retranchée, afin que sa cause soit sauvée, il livrera ses petits expéditionnaires, ses petits surnuméraires, des proies faciles, à la solde des hommes forts du Congo. 

Notre homme gouvernera, déterminera, transformera les éléments sceptiques puisqu’il garantit la cohésion de la structure.

Voilà ce qui fait, au jour d’aujourd’hui, si l’on ose jeter un regard transparent sur la société congolaise de notre jeunesse à l’étranger, une génération qui subit l’avanie de la double peine.

Notre capo, qui se croit chef de la diaspora, ne fait point le mal par méchanceté naturelle, croit-il, mais seulement par accident de parcours. Il est au fond le porte-parole des autorités congolaises en occident. Ce bougre est un confident et un voyeur. 

Le Congo, notre patrie, ses responsables, ses soi-disant opposants, ses éternels notables, toute cette vermine est opaque, donc ce pays a un problème de lisibilité. D’accablantes controverses se trouvent soulevées, se réunir pour lutter contre qui ? Et pour quelle cause ? Et que seraient nos lendemains ?

La désintégration, la dépersonnalisation des Congolais pris au piège de la profusion des hasards et de la densité des doutes. Ces esprits solipsistes, ces âmes maladives : qu’ont-ils donc fait pour mériter tout cela ?

De ce bourbier, ceux qui en reviennent racontent :

  • Nous là-bas, on ne s’intéresse qu’à la survivance, c’est une terre de servage et de tyrannie. 

Dans les yeux de ces silhouettes pathétiques croisées ici et là, vous observerez une dimension tragique. Parfois, ils se racontent leur propre vécu de guerre comme un récit spéculaire, ils sont fiables dans la crédibilité de l’instance.

Cette illusion d’intimité leur fait détenir un rôle, une petite liberté au sein de la société. Ces pauvres péquins, paumés qui sont hors de la raison, à jamais se réinventent une sortie et une individualité nouvelle. 

Ᾱ rebours, ils traversent fugacement la vie, telles des ombres irrésolues, mais de quoi demain sera-t-il fait ?

Puisque le destin est à l’œuvre et que Dieu par avance à tout prévu, jusqu’à cette violence récurrente et tout ce chaos dans ces régions du Sud-Congo sinistrées.

 Dans ce besoin de se récupérer eux-mêmes, certains luttent, d’autres abdiquent. Dans cet enfer resserré jusqu’à son point d’étranglement, personne n’est assez fou pour exiger des comptes au bourreau.

C’est un espace semblable au guignol de carnaval, où Janus conjoint la beauté et la mort. Tout un environnement d’images misérables et dégradées. Les citoyens sont dans des retranchements, des abominations. Les honnêtes gens, pour se maintenir en vie, proposent leurs grâces dans des bouges, des bobinards clandestins. C’est une hallucination panique de destruction dans tout le territoire congolais. Tristement, Il faut voir le regard affûté de nos mamans, à force de souffrir trop longtemps. 

L’homme à la terrasse du café gesticule, fait des prières, envoie des baisers on ne sait pas à qui, le poing tendu, parfois il vocifère. Puis, il fait craquer les jointures de ses doigts.

Quant à moi, chers lecteurs, ayant participé à près d’une douzaine de réunions, le long de l’année 2011/2012, j’avais le sentiment très net de voir s’entrouvrir devant moi les ténèbres de l’ignorance et du dogmatisme.

D’éternels grognards, des hommes hésitants, colériques, vautrés dans des passions conquérantes et délétères, veulent mettre main-basse sur la jeunesse et s’approprier la diaspora.

Des spécialistes de la manigance, des gens qui se sont rendus des services autrefois sont aux aguets. Ces créatures les plus mesquines, ces scélérats les plus retors veulent embrigader la jeunesse congolaise issue de l’étranger. 

Ces grands mandarins d’hier, qui jadis ont occupé d’importants postes veulent se refaire une peau neuve. Ils sont dans l’intoxication, la démoralisation, dans des procédés obliques calomnieux, des informations tendancieuses et des vérités tronquées. 

Et puis germa en moi le désir de croire que la diaspora, la vraie, était ailleurs, qu’elle avait d’autres valeurs que ces fourvoiements. Au cours de nos rencontres, dans ces cénacles de la diaspora, les chefs de clans se mettaient à dénigrer ceux avec qui, dans le bon vieux temps, ils avaient partagé la gloire et la fortune. L’on lisait dans le regard de ces renégats cette résignation de petitesse, et ce rire zélé de serviteur permanent. 

De nos jours, des organisations se forment à la hâte et faute de sérieux, elles dépérissent. 

Dans cette agitation, le doute est d’autant plus légitime qu’aucun groupuscule ne tient le haut du pavé. C’est dans un profond ébranlement social, moral et politique que la « fameuse » diaspora se trouve plongée.

Il n’est pas nécessaire d’entrer dans le détail des ruses qu’invente une dictature pour détruire tout ce joli monde assoiffé de reconnaissance et imbu de pouvoir. 

Des éclaircies s’annoncent, une jeunesse courageuse va venir, faisons-lui confiance. Quant aux anciens qui idéalisent un monde perdu, ils réactivent une déchéance qui n’est que la leur. 

Nous vivons désormais dans un monde qui laisse de moins en moins la place aux aventuriers. On se tape de l’apitoiement sur soi-même, de la complainte du déclassé ; méfions-nous des opportunistes qui sont des invariants.

Dina Mahoungou

Ecrivain et journaliste médias 

Diffusé le 23 février par www.congo-liberty.org

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4 réponses à LES ESCROCS POLITIQUES DE LA DIASPORA CONGOLAISE. Par Dina Mahoungou

  1. Diaspora dit :

    Très bon texte.
    J’espère que chacun d’entre nous de la diaspora se reconnaitra
    C’est la litanie du temps qui passe, qui nous laissa seul sur notre rocher
    le cœur fatigué d’avoir battu pour rien…
    Puissent nos rêves copuler un jour avec nos vies…

  2. Cher Diaspora
    je t ai écrit plusieurs lettres aux quelles que tu n a pas voulu repondre je ne sais pas comment pourra tu porte un dementi à ce texte qui sont te depouille comme mounguele de gamboma en tout moi je ne peut pas defendre l escrot que tu es la honte

  3. J. NIGER dit :

    La diaspora est souvent prisonnière des illusions. Toutefois, penser que « d’éternels grognards » pourraient « s’apprivoiser la diaspora » est une simple figure manichéenne.

    Je songe à Platon. Pour lui, le 1er état de l’homme est un état d’illusion. L’illusion entretenue par les passions. L’illusion entretenant les préjugés ou la peur seraient la même illusion qui déforme la réalité.
    Les « ombres » prestigieuses sont diverses en France et concourent forcément à priver quelques compatriotes désespérés de la vraie lumière.

    Paradoxalement,si l’illusion peut parfois apparaître comme vitale, c’est qu’elle est toujours nécessaire. Aussi, faisons l’économie d’une hyperlucidité,celle des philosophes du soupçon, des dénonciateurs d’illusions d’autrui.

  4. Mando Brooks dit :

    Est-ce que notre Diaspora a t-elle suffisamment de crocs pour ne pas être accroc à des tentation de lubies politiciennes? Il n’y a qu’un aigri-vain de la tranche de l’auteur de cet article pour le dire. Et si vos écrits n’étaient qu’un clin-d’oeil au pouvoir en place?

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