Léopold Sédar Senghor et l’alternance au pouvoir : le philosophe roi ou le roi philosophe décrit par Platon

Leopold Senghor

Leopold Senghor

« Senghor, parles-nous Latin !» Ce slogan,  pour avoir été scandé pendant la campagne politique  de 1951, cristallise le Nègre assumé dans la personne de Senghor avec non seulement sa culture d’origine, mais aussi celle exotique et, la politique à la fois. Que des citoyens issus des masses populaires, notamment les femmes, de façon enthousiaste, scandent ces slogans dans un contexte électoral surchauffé dans les rues de Dakar, paraît totalement insolite en Afrique noire (Jacqueline Sorel, 1995, L. S. Senghor, L’émotion et la raison, p. 112).

C’est l’expression de la négritude, non plus dans l’Académie, en bibliothèque, dans la spéculation discursive dans un cercle d’amis intellectuels, mais plutôt sur le terrain réel de l’action, mettant en mouvement des masses populaires unies par une identité débordant le Continent pour toucher sa Diaspora. De par l’expérience de Senghor et ses amis, le panafricanisme culturel fait d’abord l’objet de prise de conscience de par le frottement de fils instruits de l’Afrique avec l’extérieur, puis la politique devient un ferment au retour en terre natale, sinon une nécessité pour sa propagation dans un mouvement emportant les masses au-delà des frontières artificielles imposées par l’Occident.

Cependant, dans l’idéal de Senghor, le pan-africanisme n’est que le maillon d’un ensemble humaniste plus vaste. En d’autres termes, il est un instrument, une arme unificatrice des Peuples africains ou noirs, leur permettant de s’exprimer avec respect, sinon de s’affirmer à la tribune mondiale du donner et recevoir qu’il identifie dans « La Civilisation de l’Universelle ». Celle-ci apparaît dans le slogan par diverses facettes de la langue de l’étranger apprise, c’est-à-dire, le Latin. Le Latin, non seulement en tant que langue, produit et vecteur de la culture, socle de plusieurs autres langues (français, italien, espagnol, etc.), mais aussi, en tant que langue parlée et enseignée par l’étranger Nègre au même titre que l’homme Blanc.

Quelques années plus tard en 1966, de sa haute position du pouvoir politique en tant que chef de l’Etat, Senghor tente de donner corps à ce cadre expressif de rencontre de haute portée internationale, dans l’organisation avec succès, du Festival Mondial des Arts Nègres.

Aujourd’hui, 50 ans après ce festival, quel est le bilan en rapport à l’idéal visé dans le passé? Exercice très difficile ! En revanche, il semble aisé de dire que l’idéal ultime de Senghor ou «La Civilisation de l’Universel » c’est aussi la « Mondialisation.» En effet, donnant la possibilité aux noirs de se côtoyer, de défendre des communautés d’intérêts, de jouir de « même droits d’accession » que d’autres Peuples, notamment, via l’interface Facebook, Tweeter, etc., Internet n’est-il pas le reflet de la vie sociale, culturelle, politique des peuples noirs ou africains en partie (panafricanisme) et de tous les peuples interconnectés en général (mondialisation ou totalisation (P. Teilhard de Chardin)), vu simplement par Senghor dans « La Civilisation de l’universel » …

Le poète Senghor, à plusieurs égards et dans ses limites humaines, semble qualifié de part son humanisme universaliste culturel et politique, pour correspondre au profil décrit par Platon, ce savant de l’Antiquité grecque, dans l’expression « philosophe roi ou roi philosophe», impératif selon lui, pour une gouvernance vertueuse. L’alternance politique, n’est-elle pas encore une vertu politique précieuse en Afrique, coûtant très chère aux vies humaines par milliers, 35 ans après le départ pacifique délibéré de Senghor de la tête de l’Etat Sénégalais !

Titre d’origine : Panafricanisme culturel et du panafricanisme politique dans l’œuvre de Senghor : l’expression de la négritude assumée dans le milieu populaire et du panafricanisme via un slogan de campagne politique

Idrissa Diarra

Géographe & politologue

Secrétaire Exécutif du Mouvement de

La Génération Consciente du Faso (MGC/Faso)

Courriel : [email protected]

Diffusé le 24 mai 2016, par www.congo-liberty.org

La mort du Tyran de «ni-minè-dougou» (1), le pays où l’on fauche la vie . Par Idrissa Diarra

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6 réponses à Léopold Sédar Senghor et l’alternance au pouvoir : le philosophe roi ou le roi philosophe décrit par Platon

  1. Bulukutu dit :

    Quelle place donner à Senghor dans l’imaginaire panafricain? Quelle donner à Cheikh Anta Diop dans l’imaginaire panafricain? Que pensez de celui qui a prononcé cette célèbre phrase: « l’émotion est Nègre, la raison est Hélène »? Que pensez de celui qui prononcé cette phrase: l’Égypte Antique est pour l’Afrique, ce que la Grèce Antique est pour l’Europe occidentale? Deux hommes, deux visions de l’Afrique. Deux paradigmes intellectuels.

  2. Bulukutu dit :

    Lire. Quelle place donner à Cheikh Anta Diop…

  3. Peut-être que notre génération fait erreur de toujours vouloir opposer Léopold Sédar Senghor et Cheikh Anta Diop. Chacun des deux a sa contribution significative dans l’histoire de l’Afrique. C’est faire preuve de myopie et d’ingratitude doublée d’un manque de savoir éclectique que de vouloir limiter la valeur de ces deux grands hommes à des bouts de phrases.

  4. Peut-être que notre génération fait erreur de toujours vouloir opposer Léopold Sédar Senghor et Cheikh Anta Diop. Chacun des deux a sa contribution significative dans l’histoire de l’Afrique. C’est faire preuve de myopie et d’ingratitude doublée d’un manque de lecture éclectique que de vouloir limiter la valeur de ces deux grands hommes à des bouts de phrases ou à des des bouts de pensées. Combien sont-ils ces individus ou penseurs qui défendent vaille que vaille des pensées, des courants et qui au soir ou au crépuscule de leur vie, les abandonnent. Je pense que sans indulgence dans ls critiques vis-à-vis des audacieux, il sera souvent difficile de créer et d’apporter des pensées originales. Seuls ceux qui qui n’essaient pas, ne se trompent pas.

  5. Bulukutu dit :

    …Un un manque de lecture électrique ??? Pour vous avoir des opinions divergentes c’est insulter? Nous ne sommes pas obliger d’avoir les mêmes opinions que vous sur Senghor. Dans mon modeste commentaire, je mets en perspective deux contributions d’intellectuels africains qui ont développé une pensée à une même époque de manière quasi parallèle. L’un a été contesté et combattu avec virulence par les colons racistes de l’époque, et l’autre a été encensé par ces mêmes colons racistes. Il y a certainement une raison à cela et on est en droit de s’interroger sur les raisons qui sous-tendent ces deux attitudes vis à vis de ces deux fils d’Afrique. J’ai extrait ces deux phrases emblématiques de chacun de ces personnages, car sans réduire leur œuvre, elles en disent assez sur le système de pensées dans lesquels ces deux personnes s’inscrivaient respectivement. Deux paradigmes qui les opposent en tout cas à l’époque.

  6. Cher forumiste Bulukutu, l’intention n’est nullement de créer un sentiment de frustration ou d’outrage à votre personne dans cette page forum.
    C’est juste ce que vous dites mais j’ai voulu aussi attiré votre attention sur un constat fréquent: il est toujours difficile de rendre hommage à Senghor sur un aspect quasiment incontestable de son oeuvre sans que le lecteur, auditeur ou téléspecteur n’invite Cheikh Anta Diop dans le débat en mettant en avant leurs antagonismes. Faut-il réduire ces deux penseurs à leurs antagonismes. Ne faudrait-il pas faire la synthèse de leurs contribution majeures et dépasser leurs oppositions pour une Afrique encore meilleure?
    Dans un débat d’idées, vous ne devez pas non plus me contraindre à ne pas relever ce fait là non?

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