Incarcéré après son éviction du pouvoir avec tous les membres de son gouvernements et certains autres dignitaires du régime de la première République du Congo, à la suite des événements qui rentreront dans l’histoire sous le vocable des « trois glorieuses journées de la révolution congolaise des 13-14 et 15 aout 1963 », l’abbé Fulbert Youlou qui avait joué un rôle prépondérant dans la lutte contre l’expansion communiste et la préservation des intérêts de la France Gaullienne en Afrique dans la tourmente de la guerre froide, s’évadera de sa prison dans la nuit du 25 au 26 mars 1965, pour se retrouvé sur l’autre rive du fleuve Congo, notamment à Kinshasa (RDC), avant de s’exilé comme son ami, le leader sécessionniste Katangais Moise Tshombé, à Madrid en Espagne où il trouvera la mort le 06 mai 1972.
Par devoir de mémoire, nous revenons à la suite du présent article sur les dernières heures avant sa chute, son évasion de prison et les péripéties des troubles socio-politique de la RDC, selon la version des faits rapportés par l’historien Jean Pierre Bat dans son livre intitulé : « La fabrique des barbouzes », histoire des réseaux Foccard en Afrique, publié aux éditions nouveau monde en 2015.
La décolonisation de l’Afrique a été synonyme pour la France Gaullienne, de lutte anticommuniste et de défense de son « domaine réservé ». A l’orée de la proclamation des indépendances le Congo deviendra, sur les deux rives, le point de fixation de la guerre-froide au cœur de l’Afrique. Face aux Américains, aux Soviétiques, et à la Tricontinentale (organisation regroupant les forces anti-impérialistes d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine), la France entendait ainsi faire de Brazzaville, un pôle anticommuniste et le bastion de son « pré-carré » en Afrique Centrale, en s’appuyant au départ sur l’Abbé Fulbert Youlou envers qui tout devrait être mis en œuvre, suivant le contexte de l’époque, pour lui donner les moyens de réaliser cette grande ambition incarnée par la France-Afrique, qui avait entre autre pour illustres apôtres à l’époque: le président Léon Mba du Gabon à qui succèdera Albert-Bernard Bongo devenu El Hadj Omar Bongo puis Omar Bongo Ondimba en Afrique Centrale, Felix Houphouët-Boigny de Côte-d’Ivoire et Léopold Sedar Senghor du Sénégal à qui succèdera Abdou Diouf, pour l’Afrique de l’Ouest.
Mais, comble de malheur, un soulèvement populaire fomenté par les organisations syndicales et mouvements estudiantins de jeunesse procommuniste hostiles au projet d’instauration du parti unique envisagée par l’Abbé Fulbert Youlou, Maitre Jacques Opangault de concert avec l’ensemble de la classe politique, dans l’objectif de parachever le processus de réconciliation nationale enclenché au lendemain des émeutes de 1959, viendra à bout du régime de la première République du Congo, au point de faire basculé le pays dans le giron communiste avec la complicité des militaires qui, après avoir obtenu de force la démission du président Fulbert Youlou alors opposé à un affrontement pouvant dégénéré en bain de sang, confieront le pouvoir au président Alphonse Massamba-Debat, dont le régime de la deuxième République du Congo parviendra paradoxalement à instituer le parti unique violement contesté à l’origine et à finaliser la réalisation de plusieurs projets de développement socio-économiques initiés sous l’ancien régime honni de la première République dans lequel Alphonse Massamba-Debat avait pourtant entre autre assumées les fonctions de ministre du plan et de l’équipement, puis de président de l’assemblée nationale.
Les dernières heures avant la chute de l’Abbé Fulbert Youlou
« Le 13 août à 20 h 00, Brazzaville est tenue par les forces de l’ordre
Le 14 août, le soleil se lève sur une Brazzaville contrôlée par les forces de l’ordre. Un train de mesures de protection a été mis en place dans la nuit pour contenir et maîtriser la vague de protestations dans la capitale.
Une délégation syndicale, dont fait partie Gilbert Pongault, est désignée pour rencontrer le Général KERGARAVAT, commandant de la zone outre-mer 2, à son Etat-major.
Conseiller influent, Mauricheau convainc Youlou de lever l’état de siège les 14 août au soir. Cette mesure est imaginée comme un geste de bonne volonté pour faire retomber la fièvre populaire, faisant le pendant l’annonce du remaniement ministériel, censé rendre au président l’initiative politique et sa popularité. Mais, loin de calmer les esprits, la levée de l’état de siège est utilisée dans la nuit par les organisations syndicales et de jeunesse pour intensifier la mobilisation dans les quartiers africains et organiser avec plus d’ampleur les manifestations du 15 août.
Cette tactique est révélatrice de l’isolement palatin et de la méconnaissance de la réalité sociale : le système est trop vermoulu pour se contenter d’un simple jeu de chaises musicales.
Le 15 août au matin, les leaders syndicalistes décident de négocier avec les militaires congolais les plus influents et entrent en contact avec le capitaine Mountsaka et Mouzabakani. Boukambou et Matsika sont délégués pour arrêter avec eux un plan d’action. Les deux syndicalistes sont accueillis au camp Fulbert Youlou par les officiers Mountsaka, Mouzabakani, Fodet, Ntsika et Mabiala. Tous les officiers sur qui misait l’abbé rejoignent la révolution : il est décidé qu’en cas d’intervention de l’armée française, l’armée congolaise doit protéger la foule. Une jeep, armée pavillon blanc, conduit une délégation de syndicalistes et de militaire au Palais.
En l’absence de précédent révolutionnaire populaire, les conseillers de l’abbé, tout en ayant conscience de l’hypertension, imaginent que la situation reste maîtrisable avec les recettes « youlistes » classiques.
Malgré les efforts réitérés pour joindre Foccart, il faudra se passer de son avis face à l’urgence des événements. Mais si Foccart est physiquement hors de portée de son téléphone (erreur qu’il ne commettra sans doute plus jamais par la suite), la connexion d’urgence entre l’Élysée et Colombey fonctionne parfaitement.
Dès 9 h, après les premiers attroupements de près de cinq cents Congolais devant la grille du Palais, la situation tactique est la suivante : Youlou refuse de quitter le Palais pour se réfugier à l’ambassade (ce que lui propose depuis une dizaine de minutes l’armée française pour assurer sa sécurité), et demande que l’armée française continue à assurer sa protection. Le général français Kergaravat laisse le dispositif militaire autour de la présidence mais confirme l’interdiction d’ouvrir le feu.
10 h 10, le général Kergaravat se rend au Palais pour conseiller à l’abbé de quitter les lieux et de se placer sous sa protection, ou au moins de se réfugier à l’ambassade de France.
11 h, il revient au Palais et confirme ses ordres au capitaine Gozé : interdiction d’ouvrir le feu et protection personnelle de Youlou (et Opangault) quitte à l’emmener de force à l’ambassade de France.
Le général Kergaravat peut-il engager les troupes de la communauté contre les manifestants ? Ajoutant que, selon lui, l’intervention de l’armée française ne pourrait pas faire l’économie du sang des manifestants. Un ballet téléphonique s’engage auprès de plus hautes instances de la République et Des Garets, pour trouver une réponse. Mais Pompidou est absent, Foccart à la pêche, de Gaulle à Colombey. Reste Mesmer, ministre de la défense, qui se déclare hostile à l’intervention française.
Sans doute peut-on émettre l’hypothèse que Mauricheau, partisan de la négociation avec les manifestants et du maintien de Youlou dans le Palais contrairement à l’opinion des militaires, espère obtenir du général de Gaulle un désaveu de la ligne arrêtée par Kergaravat et des consignes de défense renforcée du Palais. Tandis que Mauricheau se charge d’appeler l’officier d’ordonnance de l’Élysée, Des Garets, qui ne partagent pas nécessairement les vues du collaborateur de Foccart, demande au poste d’écoutes et d’intervention du SDECE à Brazzaville (Poste « babouin ») d’enregistrer la conversation. Il n’existe que quatre exemplaires de la transcription des écoutés qui suivent : l’exemplaire n° 2 est adressé par la SDECE à Foccart sitôt celui-ci de retour à Paris, et précieusement conservé dans ses dossiers personnels.
M[auricheau].-Je suis un collaborateur de Foccart, je suis en ce moment dans le Palais du président Youlou. Le Président souhaiterait parler au Général De Gaulle. Pouvez-vous m’arranger cela. Le Général doit être au courant de l’évolution de la situation ce matin, et le président Youlou voudrait entretenir brièvement le Général De Gaulle de la nature des ordres qui ont été donnés ici à l’armée française. Ces ordres vont probablement créer une situation extrême grave, puisqu’ils prévoient l’enlèvement du président Youlou vers l’ambassade de France, en vue de ne pas assurer l’intégrité de son Palais. Le président Youlou voudrait demander au Général de Gaulle, s’il est possible de faire préciser aux autorités militaires françaises l’ordre d’assurer l’intégrité du Palais ; je reste en ligne.
X [officier d’ordonnance].- Où est le président Youlou en ce moment ?
M[auricheau]. À un mètre de moi.
X [officier d’ordonnance].-Restez en ligne, je passe la communication à Colombey.
M[auricheau].-Allô, le Général de Gaulle ? Mes respect mon général, je vous passe le président Youlou.
Y[oulou].- Le Palais est encerclé. Je suis encore au Palais, je ne peux pas en sortir, je crois que d’ici quelques minutes je vais tirer, je n’en sais rien, je voudrais que vous donniez des ordres précis à l’armée française, pour ne pas permettre au communiste international de prendre le pouvoir.
D[e Gaulle].-Voulez-vous répéter je vous prie ?
Y[oulou].-Mon Général, ça va très mal, le général KERGAVARAT me dit d’aller me réfugier à l’ambassade de France, je ne peux pas, parce qu’à ce moment, je me considère comme démissionnaire du gouvernement. Je suis le pouvoir légal, alors je demande que l’on protège mon Palais s’il était pris d’assaut, de la manière qu’on protègerait l’Ambassade de France.
D[e Gaulle].-Et alors vous demandez qu’on protège votre Palais ?
Y[oulou].-Oui, mon Général !
D[e Gaulle].-Et on ne le fait pas ?
Y[oulou].-Eh, on le fait mollement, très mollement, au point que si les assaillants attaquent le Palais, je pense même qu’on ne me défendra pas.
D[e Gaulle].-Qu’est-ce qui vous dit ça ?
Y[oulou].-Eh bien, ils voudraient avoir des instructions de vous-même mon général. Je vais aller chercher le général KERGAVARAT, et lui demander d’avoir tout de suite une conversation avec vous.
[…]
D[e Gaulle].-Ecouter, je m’en vais avoir le général à l’appareil.
Y[oulou].-Oui, on est allé le chercher mon général.
D[e Gaulle].-Très bien au revoir.
Y[oulou].-Allô, mes respects mon général, je vous passe l’ambassadeur de France qui serait heureux d’avoir de vous des ordres précis. Je ne peux pas quitter le Palais, parce que ce sera interprété comme une capitulation de ma part. Je reste au Palais, je demande simplement que le Palais soit protégé et que l’Armée française fasse le maximum pour aller jusqu’au bout. Mon général, je vous passe l’Ambassadeur de France. Merci mon général, je vous le passe.
Am[baladeur de France, Des Darets]. -La situation est la suivante. Le Palais est investi, l’Armée et la gendarmerie congolaise ne sont pas sûres, la population à peu près unanime entoure le Palais. Si on veut dégager, le général KERGERAVAT indique que cela suppose mille ou deux mille morts congolais. Dans ce cas mon général, j’attends vos instructions.
D[e Gaulle].-Qu’est-ce que proposez que l’on fasse ?
Des[Garrets]. -Personnellement, je crois que le président devrait essayer encore de tenir compte de la situation, de se retirer et faire de nouveau des négociations. Pour le moment, je crois que c’est la solution sage parce qu’il y à l’avenir. Si le président Youlou a sur les mains, mille ou deux mille morts congolais, sa situation politique est perdue dans le pays définitivement.
D[e Gaulle].-Oui, d’ailleurs, nous n’avons pas…
Des[Garets].-S’il n’a pas versé le sang dans le pays, il peut revenir à un moment donné. Moi, je crois que dans l’intérêt du président Youlou, il ne faut pas que l’on fasse deux mille morts congolais, sinon c’est perdu. Je suis à côté du président Youlou, et il comprend aussi que je dis la vérité.
D[e Gaulle].-Vous assurez sa sécurité ?
Des[Garets].-Oui, naturellement nous assurons sa sécurité.
D[e Gaulle].-Vous l’emmenez d’office, alors ?
Des[Garets].-Nous l’emmenons à l’ambassade, puis à Maya-Maya ; il voudrait rester ici, mais nous assurons sa sécurité, vous pouvez être tranquille de ce côté mon général.
D[e Gaulle].- Des Garets, alors vous m’entendez : premièrement, il n’est pas question qu’on se mette à tirer sur la foule, à l’heure qu’il est.
Des[Garets].-Je répète, il n’est pas question qu’on se mette à tirer sur la foule.
D[e Gaulle].- Deuxièmement, le président Youlou, nous assurons sa sécurité.
Des[Garets].-D’accord.
D[e Gaulle].- C’est tout ce que nous faisions pour le moment. Nous n’avons pas de raison d’entrer plus avant dans la question politique. La seule chose que nous ayons à faire, conformément à nos accords, c’est d’assurer la sécurité du président.
Des[Garets].- Nous assurons la sécurité du président, il ne risque rien.
D[e Gaulle].- Vous m’entendez ?
Des[Garets].- Je vous ai entendu, j’ai pris note et j’ai répété les phrases devant vous, je vous repasse le président Youlou.
D[e Gaulle].- M. le Président, il n’y a rien d’autre à faire pour vous, que de vous en remettre à notre force militaire, pour votre sécurité personnelle.
Y[oulou].-Je reste au Palais mon Général.
D[e Gaulle].- Pour le pouvoir, à l’heure qu’il est, je ne vois pas ce qu’ils pourront faire.
Y[oulou].-Je reste au Palais mon Général, si je quitte le Palais ce serait un peu comme démissionner à ce moment-là.
D[e Gaulle].- Si vous ne pouvez rien faire au Palais, je ne vois pas en quoi vous serez plus avancé.
Y[oulou].-Quand ils viendront prendre le Palais, le Palais, que je sorte…leur gouvernement, je ne pourrai plus reprendre les choses en main, c’est impossible.
D[e Gaulle].- Enfin, écoutez c’est comme vous voulez.
Y[oulou].-J’ai demandé des blindés, non pas pour tirer, mais pour disperser la foule simplement.
D[e Gaulle].- Oui, mais d’après ce qu’on me dit, on ne peut pas la disperser, autrement qu’en tirant, et alors…politiquement, la France ne se…de prendre cette responsabilité.
Y[oulou].-Je ne demande pas que l’on tire tout de suite, tout simplement que les blindés dispersent les gens.
D[e Gaulle].- Mais ils ne pourront pas les disperser autrement qu’en tirant.
Y[oulou].-Je ne sais pas mon général, les blindés rouleront, ils les verront, les gens vont se disperser d’eux-mêmes. Autrement, j’ai peur d’une chose, d’ici quelques minutes, ils vont entrer dans le Palais, alors à ce moment-là, on a beau assurer ma sécurité, mais le pays est perdu, il est communiste.
D[e Gaulle].- Il faut d’abord se pencher sur votre sécurité, c’est tout ce qu’elle peut faire, c’est tout ce qu’elle veut faire.
Y[oulou].-Oui, mon général. Est-ce que je peux demander mon général, que les chars fassent circuler les foules ?
D[e Gaulle].- C’est l’affaire du commandant des troupes.
Y[oulou].-Oui, il n’y a que lui qui peut savoir s’il peut disperser la foule sans tirer.
D[e Gaulle].- Il n’y a que lui qui peut le savoir. Enfin, j’ai dit ce que j’avais à vous dire M. le Président.
Y[oulou].-Oui, mon Général, merci, merci bien »
Sans doute est-ce sur la base de cette transcription que Foccart s’est forgé la conviction que l’affaire a été mal présentée au Général de Gaulle par la diplomatie (le Quai n’est pas très favorable à Youlou) et que les officiers n’ont pas su gérer l’affaire (Foccart reste convaincu qu’une opération d’intimidation aurait suffi sans verser une goutte de sang). Quoi qu’il en soit, c’est au cours de cette conversation stratégique qu’il est injoignable et que se scelle, malgré Mauricheau le sort de l’abbé. »
L’évasion de l’abbé Fulbert Youlou dans la nuit du 25 au 26 mars 1965
La menace du procès de Youlou a toujours constitué un métronome des plans de libération. Ainsi, en octobre 1964, ce sont des personnalités politiques du Congo-Léopoldville qui prêtent leur concours au projet établi par Bernard Kolelas, chef de l’opposition youliste en exil : un commando venu de Léopoldville doit procéder à l’enlèvement de Youlou. Mais ce dernier, contacté par des notables Lari et Vili défend d’entreprendre ce qu’il nomme une « opération suicide ».
De sorte que, même si depuis août 1963 Mauricheau ne cesse d’imaginer différents scénarios pour secourir Youlou, aucune opération n’est exécutée. En octobre 1964, tous les contacts nécessaires étaient pourtant établis, de part et d’autre du fleuve. En février 1965, l’annonce du procès de Youlou accélère les événements car la vie de l’ancien président apparaît menacée.
« La veille [de l’évasion], au cours de mon audience, j’avais informé le général d’une tentative d’assassinat de l’abbé dans sa prison. »
C’est donc à la surprise générale que, le 26 mars 1965 au matin, l’abbé se présente tranquillement à Léopoldville : il vient chercher protection auprès de Moïse Tshombé et informe l’ambassade de France de son évasion. La version de l’opération commando pilotée par Mauricheau-Beaupré se répand, cautionnée par Jacques Foccart en personne :
« La veille [de l’évasion], au cours de mon audience, j’avais informé le général d’une tentative d’assassinat de l’abbé dans sa prison. J’avais brièvement commenté en disant que ce malheureux Youlou était en grand péril et que sa seule chance serait dans une évasion. “C’est évident”, avait-il dit, et nous étions passés à un autre sujet. Le 26 en fin de matinée, j’ai appris la réussite de l’opération et j’ai fait prévenir le général. Je l’ai retrouvé ensuite pour le déjeuner qu’il offrait à François Tombalbaye [président du Tchad]. Il m’a pris à part et m’a dit d’un air goguenard : “Alors, Youlou s’est évadé…” […] Mauricheau-Beaupré m’avait soumis ses plans et il m’a rendu compte de la réussite, ce qui m’a permis de donner des détails au général. »
Si les intenses préparatifs de Mauricheau ne peuvent être niés, l’évasion de l’abbé semble s’être réalisée de façon beaucoup plus discrète et beaucoup moins rocambolesque, dans le secret le plus total. En réalité, à l’insu de tous, Youlou a acheté ses gardes, gagné le fleuve qu’il a traversé en pirogue et débarqué à Léopoldville dans la nuit du 25 au 26 mars 1965.
Il a organisé tout seul son évasion, avec le concours de quelques partisans sûrs, et n’a mis dans la confidence que quelques rares personnes de confiance dans son entourage. C’est sa meilleure garantie pour ne pas risquer de fuite…
Jacques Foccart est avisé en réalité de l’évasion de Youlou lorsque l’ambassadeur de France à Léopoldville informe Paris de la présence de l’évadé, dans la matinée du 26 mars. Le 30 mars 1965, à 6 h du matin, Mauricheau rédige une note à Jacques Foccart. Envoyé en urgence à Léopoldville pour rencontrer Youlou, il reconnaît ne l’avoir toujours pas revu directement et demande le concours de Philippe Lettéron pour tenir le rôle de conseiller de l’ancien président.
« Youlou, arrivant sur l’autre rive, ayant demandé s’il était bien sur le territoire du Congo-Léopoldville, a dit : « Maintenant je vais libérer mon pays avec l’aide de l’armée française »
Le ton du courrier montre nettement le caractère improvisé et inattendu de l’apparition de l’abbé, dont les ambitions politiques n’ont pas été entamées par sa détention. Au contraire, il souhaite reprendre le Congo, par la force si besoin, certain que la France lui apportera son concours officiel ou clandestin. C’est ce que retranscrit, avec ses mots, Mauricheau dans sa note :
« État d’esprit : sur son trône, avec son sceptre dans sa main droite. Je vais vous garder ici en permanence, attaché à ma personne. Je vais demander au patron de Jacques de faire décorer celui qui m’a sorti du trou. Ici, ils se sont mal débrouillés pour leurs élections et je vais leur donner quelques conseils. Je vous enverrai demain matin un ministre pour vous faire chercher.
Intentions : arrivant sur l’autre rive, ayant demandé s’il était bien sur le territoire du Congo-Léopoldville, a dit : « Maintenant je vais libérer mon pays avec l’aide de l’armée française » (et je serai sur un cheval blanc…)
Ajouté par moi. En réalité, il doit bien savoir que cela ne peut guère se passer ainsi – et je vais m’employer à le lui démontrer – et il se prépare à attaquer ses adversaires selon un plan qui n’est pas encore tout à fait mûri mais pour lequel certains moyens vont être demandés. Pour régler la situation d’en face, il est indispensable de provoquer des désordres. Comment ? C’est l’unique question.
S’il suffit de faire des discours du style 18-Juin, ce qui est facile à faire, ce sera alors l’hypothèse longue puisqu’il est évident que ledit discours ne provoquera aucun effondrement de l’adversaire. L’un (MT) [Moïse Tshombé] et l’autre n’ont pas encore bien réfléchi à tout cela, mais je crois qu’ils s’arrêteront forcément sur l’hypothèse courte (lorsqu’ils auront pris conscience que c’est là bien l’hypothèse courte) qui est d’organiser pour envoyer en face des groupes entraînés qui prépareront le terrain. Dans ce cas, il faudrait que FY [Fulbert Youlou] ne soit pas localisé et constitue un mythe et une menace. »
Mauricheau décide donc d’élaborer une nouvelle stratégie politique contre-révolutionnaire intégrant la libération de l’abbé. Mais loin de faire de cet élément le déclencheur de l’insurrection contre-révolutionnaire, il préfère continuer le travail amorcé avec Bernard Kolelas [ministre plénipotentiaire réfugié à Léopoldville], prônant à Youlou la discrétion : après s’être attaché à lui faire prendre la mesure du réalisable par téléphone, Mauricheau confirme ce qu’il appelle lui-même « l’hypothèse courte », c’est-à-dire faire de l’abbé un mythe autant qu’une menace. En d’autres termes, pour créer l’impact psychologique le plus important à son évasion, il est demandé à l’abbé de ne rien faire, de rester discret et de laisser agir ses partisans déjà au travail.
Car pour Mauricheau et Lettéron, l’équilibre et la réussite du ministère Tshombé restent la base de toute action en Afrique centrale. Or le trop grand et trop désordonné activisme dont fait preuve Youlou dès son arrivée présente plus d’inconvénients que d’avantages, tant pour Tshombé que pour les efforts déjà entrepris avec Antoine Hazoume et Bernard Kolelas pour Brazzaville.
Tshombé et la roche tarpéienne congolaise : la crise d’octobre 1965
Fin septembre, l’ambiance se tend. En octobre, elle dégénère. Après quelques signes avant-coureurs de crise ministérielle, l’opposition à Tshombé prend corps plus nettement avec la création du Front démocratique congolais (FDC), conduit par Nendaka et Kamitatu. Ce dernier ouvre les hostilités le 6 octobre 1965, en attaquant frontalement la ligne politique du premier ministre : le leader du FDC, en qualité de porte-parole de l’opposition, demande au gouvernement quel est l’intérêt de l’adhésion à l’OCAM – critique à peine voilée de l’alignement francophile de Tshombé. L’avertissement est clair.
Le lendemain, 7 octobre 1965, le FDC demande officiellement à l’Assemblée par la bouche de ses deux leaders la démission du cabinet Tshombé et la tenue de nouvelles élections. Iléo se lance à son tour dans la querelle politique, sommant Kasavubu de mettre un terme au mandat de Tshombé, ou bien de l’obliger à se présenter devant la Chambre avant le 19 octobre. Nendaka est alors chargé de préparer de nouvelles élections dans la province de Maniema, où le ministre de l’intérieur a proclamé le 7 octobre 1965 l’état d’urgence. Coup de bluff du FDC ? Peut-être, mais l’affaire prend d’autant mieux que les appuis du leader de la Conaco, le parti de Moïse Tshombé, s’effritent : Munongo lui-même a fini par lâcher Tshombé. La Conaco s’avère incapable de jouer le rôle que lui avait imaginé son fondateur.
Le président Joseph Kasavubu, trop heureux d’exploiter enfin une occasion de mettre en minorité son premier ministre, exploite les brèches créées par le FDC : il convoque les chambres en congrès et prononce le renvoi de Tshombé le 13 octobre 1965. Un autre Katangais, Kimba, est nommé pour lui succéder.
La nouvelle se répand telle une traînée de poudre de Fort-Lamy [devenue Ndjamena] aux capitales de l’Entente, mais aucune intervention ne parvient à rétablir Tshombé dans son fauteuil de chef du gouvernement.
Écarté du pouvoir, Tshombé veut rester combatif, comme en témoigne le ton de la lettre qu’il adresse au général de Gaulle. C’est bel et bien vers Jacques Foccart et « la petite équipe » qu’il se tourne pour remettre le métier sur l’ouvrage. Et le vibrionnant Mauricheau de tempêter et reprocher à son homme sur place, Lettéron, de n’avoir « rien tenté » tandis que ce dernier, aidé par Foccart, tâche de lui expliquer que rien ne pouvait être tenté.
Au lendemain du 13 octobre 1965, la situation congolaise ne s’améliore pas. La fin du ministère Tshombé laisse le champ libre à de nouvelles querelles que les calculs politiciens de Kasavubu ne parviennent pas à contenir. Le « nœud gordien » congolais est finalement tranché par le général Mobutu le 25 novembre 1965 : il réédite le coup de force du 14 septembre 1960, pour « neutraliser les politiciens »… mais conserve, cette fois, le pouvoir. L’homme de la CIA à Léopoldville triomphe. Larry Devlin devient un de ses conseillers occidentaux les plus écoutés. Vu de Paris, l’échec est consommé. Guy Le Bellec, chargé de mission auprès de Foccart en charge des affaires congolaises, donne de la crise d’octobre un jugement lapidaire : « La France a perdu les positions qu’elle avait savamment acquises avec Tshombé. »
Avec la chute de Tshombé, c’est tout le dispositif des « barbouzes » français sur les deux Congo qui est remis en cause. Désormais, la France ne dispose plus que d’un dernier atout dans le marigot congolais : le colonel Bob Denard et ses mercenaires.
Wilfrid Sathoud
Diffusé le 22 janvier 2017, par www.congo-liberty.org
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Je continue a dire que la situation de la Gambie n’est pas similaire a celle d u Congo Brazzaville.
Au CONGO depuis 1997 nous luttons contre la France (l’armée française est venu faire la guerre contre un président élue en détruisant toutes les structures d’un état
Destruction de l’armée congolaise, aujourd’hui on nous parlons toutes les armes lourdes de ce pays se trouvent a Oyo sous le contrôle d’une milice formée et entretenue par la France. Du coup l’armée dite républicaine au Congo Brazzaville obsolète chose différente en Gambie.
L’assemble nationale même les députes du sud Congo sont tous Mbochi nommé par le terroriste sassou du coup l’assemble congolaise est un ensemble de la famille du terroriste français sassou, chose différente en Gambie.
Toutes les postes clés du gouvernement du Congo sont tenu par la famille du terroriste.
En plus en Gambie l’armée ouest Africaine était prête sous l’égide de l’Angleterre de faire assaut en Gambie chose différente au Congo Brazzaville c’est plus la France qui organise le désordre.
OUVREZ TOUS LES MEDIAS DE MONDE VOUS TROUVEREZ LE PROBLÈME GAMBIEN.
MAIS PAR CONTRE QUAND CE CRIMINEL DE SASSOU C’EST RENDU USA (LA PREMIÈRE PUISSANCE DU MONDE) DURANT SON FIASCO AVEC TRUMP C’EST INEXISTANT DANS LES MEDIAS DU MONDE SAUF TÉLÉ FOUFOU INTERNATIONALE (Rfi).
PARTOUT OU LE CONGOLAIS C’EST RENDU C’EST LA MÊME RÉPONSE « VOTRE PROBLÈME C’EST LA France, NOUS NE POUVONS PAS NOUS INGÉRER DES AFFAIRES DE LA France »
ALORS CHER CONGOLAIS SASSOU EST IMBÉCILE DE NAISSANCE IL NE CONTRÔLE ABSOLUMENT RIEN TOUT EST FAIT PAR LA France C’EST QUI SIGNIFIE QUE NOUS SOMMES EN FACE D’UN PROBLÈME D’INDÉPENDANCE
FAIREMONS L’AMBASSADE DE France DE BRAZZAVILLE.
L’Ouganda n’est pas une ancienne colonie française. Kabila de la RDC a tout compris que le diable d’Afrique centrale c’est le terroriste français sassou autrement dit la France qui est capable de vivre sans sa politique coloniale.
LA France EST CENTRE DE TOUS NOS MALHEURS, QUE SA SOIT L’EUROPE OU LE USA OU LE CANADA ILS LE DISENT TOUS QUE LE PROBLÈME CONGOLAIS DE Brazzaville c’est la France.
Ah Le Patriot frangin, tu vas t’époumoner ou plutôt « t’éclaviériser » les doigts de la main pour longtemps avec ces con-go-laids corrompus vendeurs de mèche, têtus comme des ânes et peureux comme des oiseaux mange-mil. Ils adorent la littérature pour la littérature et bon nombre ne comprennent toujours point aujourd’hui, les enjeux profonds et excentriques au Congo Brazzaville…
Si seulement ils savaient! Et ce qui se trame réellement!
Youlou avait raison. Cette contrée est bien maudite.
Regardez là-bas, toute une assemblée de bêtas dite nationale, tout un sénat de ‘sages’ très sots, aux ordres… Un traitre, voleur assassin trouve quand même et encore au Sud à ce stade-ci, des individus qui se veulent pourtant ‘intellos’, pour lui servir de premier (dernier?) ministre et ailleurs.
WAAAAOUUHH!!!
Puisqu’ils ont si peur, il suffirait déjà pour commencer, qu’ils prennent conscience, se concertent et décident de démissionner en BLOC partout, ou individuellement en même temps, par exemple.
Des fous joyeux et naïfs parlent de ‘révolution’ à la con, ils suivent comme des ruminants à l’épaisse toison frisée; c’était hier. Les suivistes entendent mondialisation ou globalisation, nouveaux concepts vraissemblablement à gros risques aujourd’hui; têtes en l’air, ils régurgitent comme des bébés au biberon… Depuis, ils déchantent. ‘Bi Suivra-Suivra’.
Heureusement que tout le monde n’est pas bête. Il y a eu Brexit; Trump est arrivé, l’éveil et le réveil continuent ailleurs, et ça ne fait que commencer.
Congo 1 & indivisible, MY ASS!
POUF_
Mr jerry Rawlings propose les memes methodes qui ont fait partir Mr Yahya Jammeth de la Gambie pour l’Afrique du centre.
Je cite Zenga Mambu:
La Cédéao gagne en crédibilité et prend une dimension nouvelle.
Jerry John Rawlings, ancien président du Ghana, fait une suggestion, paraît-il…
Celui qu’on appelait, autrefois, le Sankara des anglophones, soutient que la Cédéao, après la Gambie, devrait aider l’Union Africaine à envoyer quelques contingents au Cameroun, pour une mission identique… Sous prétexte que Paul Biya et lui seraient arrivés au pouvoir à peu près à la même période – lui, en 1981, et Biya en 1982 –, et que lui, Rawlings, a déjà eu cinq successeurs, depuis son départ du pouvoir au Ghana, alors que Paul Biya est toujours là,
Notre commentaire:L’empire francais pas longtemps a renouvelle le bail de la vassalite de Mr sassou en contre partie ce dernier a finance avec l’argent du peuple Congolais le sommeil de l’environnment.Les Congolais doivent absolument chasser du Congo Mr Sassou,sa famille,ses amis et ses courtisans toutes nationalites confondues par la force brute.
23/01/2017 01:23:1
Selon Jerry Rawlings, l’Union africaine doit déclencher le départ de Paul Biya
D’après RFI, l’ancien président du Ghana, Jerry Rawlings aurait demandé à l’Union africaine de déclencher le départ du président Paul Biya du pouvoir
Jerry Rawlings, ancien président de la République du Ghana (1981-2001)
D’après RFI, l’ancien président du Ghana, Jerry Rawlings aurait demandé à l’Union africaine de suivre l’exemple de la CEDEAO en déclenchant le départ du président Paul Biya du pouvoir.
Après les récents événements qui ont finalement persuadés l’ex-président de la Gambie Yaya Jammey à de céder le pouvoir suite à sa défaite aux dernières élections, l’ancien président du Ghana soutient que lui est arrivé au pouvoir en 1981, alors que l’actuel président du Cameroun à son tour arrivait au pouvoir quelques mois plutard en 1982.
Rawlings soutient également qu’il a déjà eu cinq successeurs depuis son départ du pouvoir, alors que Paul Biya est toujours là, discréditant, dit-il, le continent avec ses méthodes…
L’actuel président du Cameroun Paul Biya avec ses 35 ans à la magistrature suprême, fait parti du club sélect des présidents qui s’accrochent indéfiniment au pouvoir.
SOURCE.cameroonvoice
Mes très chers frères,
En 1997 sous Jacques CHIRAC, Pascal LISSOUBA est parti du Pouvoir dans les mêmes circonstances que Fulbert YOULOU en 1963 sous Charles De GAULLE.
En 2015, c’est François HOLLANDE qui autorise Denis SASSOU NGUESSO à modifier sa Constitution et qui lors d’une interview, dit que ce dernier pouvait consulter son Peuple ; c’est ce qui s’est passé.
Je pense que cette Article d’importance capitale doit servir de leçon pour tous ceux qui n’ont pas encore compris que le Congo n’est pas Indépendant.
En effet, en 1960 ce n’est pas l’Article 86 de la Constitution du 04 Octobre 1958 qui traite des Indépendances qui est considéré lors de la signature des Accords de Matignon le 12 Juillet, mais c’est l’Article 78 qui lui ne traite que des Compétences à l’intérieur de la Communauté qui cité.
NB : Sans Référendum, il n’y pas Indépendance. C’est ce que nous devons tous retenir maintenant, c’est l’Article 86 alinéa 1 de la Constitution du 04 Octobre 1958 qui constitue la 5ème République qui le dicte.
Mais qu’attendez vous Monsieur Poaty Pangou pour mettre en place un référendum.
Puisque pour vous il n’y a rien d’autre à faire tant qu’il n’y aura pas le fameux référendum que vous nous déclinez en long et en large à chacun de vos commentaires.
Allons un peu de courage Monsieur Pangou…, des actes… des actes.
Mon très cher frère « Anonyme »,
C’est bien pour toi de t’exprimer ainsi : « le fameux référendum ».