Françafrique: LE RENIEMENT DE NICOLAS SARKORZY , par Alexis Bouzimbou

Avouons-le. La Françafrique n’a pas été un critère prioritaire de choix lors de l’élection présidentielle française du 6 mai 2012. D’ailleurs, l’Afrique a été superbement oubliée tout au long de la campagne présidentielle française.

Avouons-le aussi, les franco-africains qui aiment et luttent au quotidien pour le changement dans ce continent, ont indubitablement intégré cet élément d’appréciation dans leur choix.

Les promesses, disait Charles Pasqua, » n’engagent que ceux qui y croient ». En 2007, le candidat Nicolas Sarkozy voulait rompre avec la Françafrique. Au contraire. Elu président, il a donné du grain à moudre à ce réseau tant décrié. La contrainte n’a pas cédé à la fameuse rupture. Or, il a fait campagne en 2007 sur le thème global de la rupture. Quel était, dans l’esprit du candidat de l’UMP, le contenu de cette pseudo-rupture annoncée ?

Espérée par certains, redoutée par d’autres, la fameuse rupture n’a pas eu lieu en Afrique. Nicolas Sarkozy, tout en y apportant son style personnel, ne s’est guère éloigné des fondamentaux de la politique africaine de la France sous la Vème République.

Dans un discours prononcé le 6 mai 2007, après sa victoire, Nicolas Sarkozy déclare: « Je veux lancer un appel à tous ceux qui dans le monde croient aux valeurs de tolérance, de liberté, de démocratie et d’humanisme, à tous ceux qui sont persécutés par les tyrannies et par les dictatures, à tous les enfants et les femmes martyrisés dans le monde, pour leur dire que la France sera à leurs côtés, qu’ils peuvent compter sur elle ».

N’étant pas à une contradiction près, la Françafrique n’a pas été remise en cause par Nicolas Sarkozy. Cette Françafrique, censée incarner immobilisme politique, corruption et relations incestueuses entre les élites politiques françaises et celles de l’Afrique francophone, avait été fermement condamnée par le candidat Sarkozy au cours de sa campagne électorale de 2007, notamment en ces termes lors d’une visite au Bénin le 19 mai 2006: « Il faut nous débarrasser de notre relation avec des réseaux d’un autre temps, de ces émissaires officieux qui n’ont d’autre mandat que celui qu’ils s’inventent ».

Pascal Boniface(directeur de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques), estime dans son ouvrage(Le Monde selon Sarkozy) que ce dernier « appartient à une génération postcoloniale; il n’a pas, contrairement à ses prédécesseurs, une fibre africaine particulière. A cet égard, le discours de Dakar, prononcé le 26 juillet 2007, censé poser les bases d’une nouvelle relation entre la France et l’Afrique, déçoit. On y retiendra surtout la phrase sur l’homme africain qui n’est pas assez entré dans l’histoire, apparue comme condescendante, voire méprisante ».

Lors de son premier voyage africain, en juillet 2007, Nicolas Sarkozy s’arrête au Gabon et fait l’éloge d’Omar Bongo, figure symbolique de la Françafrique, régulièrement accusé de multiples turpitudes financières.

Transfuge du Parti Socialiste dont il représentait l’aile droite, poursuit Pascal Boniface, Jean-Marie Bockel a été nommé ministre de la Coopération et de la Francophonie. Il plaide pour la réduction de l’aide à la République du Congo et pour la non-annulation d’une partie de la dette du Gabon, deux pays censés être à l’abri du besoin grâce à leurs ressources pétrolières.

Dans un entretien au journal Le Monde publié le 15 janvier 2008, pour répondre aux critiques sur les promesses non tenues de la fin de la Françafrique, Jean-Marie Bockel déclare imprudemment: « La rupture tarde à venir… La Françafrique est moribonde, je veux signer son acte de décès ». De ce fait, il va signer le sien, puisqu’il va perdre son poste le 18 mars 2008. En août 2008, Nicolas Sarkozy déclare: « Il y a d’abord un procès que je récuse, celui de la Françafrique: il s’agit de mettre en cause les liens que la France et ses anciennes colonies ont souhaité entretenir après les indépendances, on ne va quand même pas reprocher à la France d’avoir su maintenir des liens d’amitié, ce que n’ont pas su faire dans cette même région du monde le Royaume-Uni, le Portugal ou l’Espagne ».

En visite au Congo-Brazzaville, Nicolas Sarkozy avait félicité Sassou Nguesso d’avoir accepté sa défaite aux élections de 1991, tout en prenant soin de rester discret sur son retour au pouvoir en 1997, a l’issue d’une guerre civile, ainsi que sur ses victoires électorales de 2002 et 2009, sévèrement jugées par les observateurs internationaux.

Comme on le voit, Nicolas Sarkozy achève son quinquennat comme il l’avait commencé: dans le reniement. Son volontarisme médiatique n’a pas suscité la « rupture » attendue par les africains. Brocardant avec force l’immigration  l’entre deux tours de l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy aurait commencé par respecter la parole donnée en mettant un terme aux dictatures, aux régimes iniques en Afrique, et à la Françafrique. Comment empêcher l’immigration tant décriée en France, si le peuple africain est privé du droit de disposer de lui-même ?

 

Alexis BOUZIMBOU

Cercle de réflexion pour des idées nouvelles

www.congo-liberty.org

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