Rigobert OSSEBI
Paré de l’indécence oligarchique de son nouveau gouvernement, l’autocrate congolais, Denis Sassou Nguesso, débarquera à Paris le couteau entre les dents ; décidé à monter un front dur, le plus large qui soit, d’Etats réfractaires à toute concession démocratique ou d’efforts de transparence et de lutte contre la corruption. Du haut de son impériale arrogance, après une pirouette diplomatique pour, finalement, participer au Sommet du Financement des économies africaines, Denis Sassou Nguesso espère bien changer la donne ; et, pourquoi pas, rentrer avec une promesse de remplir ses caisses.
Il ne pouvait décemment pas ignorer cette occasion unique d’être face à face avec Madame Kristalina Georgieva, la patronne du FMI, afin d’espérer la voir quitter sa très souriante intransigeance. Mince espoir, Denis Sassou Nguesso a beaucoup perdu de sa superbe et les masques sont enfin tombés : nul n’ignore plus la cruelle réalité de son pouvoir autocratique et sa criminalité absolue ; quant à la disparition de Parfait Kolélas, son « fils adoptif » (dont il ne semble pas porter le deuil) et principal challenger à la dernière élection présidentielle, elle n’est pas encore débarrassée de ses mystères.
Le nouveau gouvernement Makosso néanmoins viendra en aide à l’autocrate dans son approche des responsables du FMI et de la Banque Mondiale qui seront présents à ce sommet : le très corrompu Gilbert Ondongo (qui était le ministre des finances lors du PPTE) est passé à la trappe, ainsi que son successeur Calixte Ganongo remplacé par Roger Rigobert Andely, lui-même ancien du FMI de 1987 à 1990, et déjà ministre des finances de 2002 à 2005. Il faut lui reconnaître d’avoir voulu imposer une gestion plus rigoureuse qui l’opposait fréquemment à la gangrène de la hiérarchie familiale et à son Président. En vain, il retourna à la BEAC jusqu’en 2010 et fut nommé, toujours à Brazzaville, Président du Conseil d’Administration de la Banque Sino Congolaise pour l’Afrique.
Roger Rigobert Andely, sera face au FMI, l’arbre qui tente de cacher la forêt. Il aura beaucoup de mal à faire illusion tant le système est totalement corrompu avec de sérieuses luttes au sein du clan familial. Le face à face Jean-Jacques Bouya / Denis Christel Sassou Nguesso illustrerait parfaitement le risque d’implosion de ce système tant les tensions sont fortes : Jean-Jacques Bouya (toujours ministre de l’Aménagement du territoire, des infrastructures et de l’entretien routier) s’oppose de plus en plus frontalement à Denis Christel Sassou Nguesso (qui vient d’être nommé ministre de la Coopération internationale et de la Promotion du Partenariat Public Privé) ; le premier accusant le second de « n’être qu’un tonneau vide qui n’a jamais défendu les réels intérêts du Clan et qu’il n’en ferait d’ailleurs pas partie par sa Mère ! »
Bruno Itoua revenant lui aussi aux Hydrocarbures (il avait été ministre de l’Energie et de l’Hydraulique de 2005 à 2011) fait bloc avec Bouya. Il n’a pas oublié qu’il avait perdu le pétrole à cause des manipulations de Claudia, la sœur de Denis Christel Sassou Nguesso. Curieusement Denis Gokana, le patron d’AOGC (et dit-on également de PETRO CONGO) s’aligne dorénavant avec ce dernier … !
Les Finances et le Pétrole sont au cœur de toutes les rivalités ; même, et surtout, si le prix du baril de Brent se rapproche en ce moment des 70 USD. La fracture interne est profonde et tous les observateurs de la place se demandent si les lézardes n’atteignent pas déjà l’Armée.
C’est dans ce contexte ultra tendu que Denis Sassou Nguesso, accompagné de son épouse l’impératrice Antoinette, revient à Paris. Covid 19 oblige, il n’y aura pas d’étreinte avec le « Président Macron qui n’était même pas né lorsqu’il était arrivé au pouvoir » ; ce dont ne se plaindra pas le jeune locataire de l’Élysée.
Ce Sommet de Paris, pour notre Empereur aura des parfums de Berezina. Il sera soumis à de fortes pressions dont la libération des prisonniers politiques qu’il n’a fait que retarder jusqu’à maintenant. D’autres exigences se feront entendre très certainement, alors qu’il ne se passe de semaine que d’importants accords soient annoncés à Brazzaville avec la Turquie ou la Chine.
Ironie macronienne, le Sommet du Financement des Economies Africaines se déroulera dans une structure éphémère dans l’enceinte des Invalides à côté du somptueux Tombeau de Napoléon ; voilà qui devrait inciter l’Empereur Denis encore vivant à un peu plus de modestie…
Cependant, à moins de 12 mois de la prochaine élection présidentielle française, ce dernier peut prétendre sur sa fortune personnelle volée aux Congolais, comme ce fut le cas à plusieurs reprises tout au long de ses trente-six années de pouvoir, influencer le bon déroulement de celle-ci. Aussi, il faudra être très attentif à ses visiteurs du soir à son hôtel parisien et aux entretiens qu’il aura çà et là.
Pour la petite histoire, c’est le 29 mars 2016 que L’Obs avait publié l’article relatif au financement de l’orchestre de Madame Valls Aussitôt, Congo-Liberty reprenait partiellement les informations de L’Obs et les complétait par une photo du Premier ministre français à l’hôtel de Denis Sassou Nguesso le 7 juillet 2015. Il se susurre qu’Emmanuel Macron, à cette période ministre de Manuel Valls qui partageait la même ambition présidentielle, avait alors pris conscience de l’avantage que ce dernier pouvait avoir grâce au soutien de Sassou Nguesso. En quelques jours, il avançait la création de son parti En Marche, le 6 avril 2016, prenant ainsi de vitesse son concurrent potentiel direct, Manuel Valls. Avec le succès que l’on sait !
Maintenant qu’il est de notoriété publique que l’Empereur de Brazzaville a annoncé officieusement à Oyo que la France aura un nouveau président en 2022, il nous tarde de voir comment le Président Macron pourra déjouer cette « fatwa ». A ce petit jeu, il est clair qu’il n’y aura qu’un seul gagnant : « le vieil Empereur ou le jeune Président ? »
Rigobert OSSEBI
Diffusé le 17 mai 2021, par www.congo-liberty.org
Ah Ah Ah, on a hate d’y etre . Merci Rigobert pour article si bien redige.
Pardon j allais dire ton article