AVIS AUX DICTATEURS: L’ex-président Hissène Habré extradé pour crime contre l’humanité au Tchad

L’ex-président tchadien Hissène Habré, réfugié au Sénégal depuis sa chute en 1990 et poursuivi pour crimes contre l’humanité, va être renvoyé dans son pays d’origine lundi 11 juillet par un vol spécial pour y être jugé.

Mais plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme ont très vite critiqué cette décision, doutant que M. Habré, 69 ans, puisse bénéficier d’un procès équitable au Tchad.

« Le gouvernement de la République du Tchad porte à la connaissance de l’opinion nationale et internationale ce qui suit: par lettre (…) du 5 juillet 2011, le président Abdoulaye Wade informe son ami le président (Idriss) Deby (Itno) de sa décision de renvoyer dans son pays d’origine M. Hissène Habré le lundi 11 juillet par un vol spécial affrété par le gouvernement sénégalais », indique un communiqué du gouvernement tchadien qui « prend acte de cette décision ».

« Par conséquent toutes les dispositions seront prises pour l’accueil de M. Hissène Habré sur le territoire national », indique le texte.

« Par ailleurs, le gouvernement prendra attache avec l’Union africaine (UA), les ADH (associations des droits de l’homme) intéressées, ainsi que les victimes, pour l’organisation d’un procès équitable au Tchad », conclut le communiqué.

Le porte-parole du gouvernement sénégalais, Moustapha Guirassy, a confirmé l’annonce du retour de M. Habré.

Selon lui, « l’extradition de Hissène Habré le 11 juillet (se fera) par avion spécial, en présence d’un représentant du président de la Commission de l’Union africaine (Jean Ping) et d’un représentant de la Conférence des chefs d’Etat ». M. Guirassy n’a pas précisé si M. Habré était encore à son domicile de Dakar ou déjà aux mains des autorités sénégalaises.

« L’UA a donné un mandat au Sénégal pour juger Hissène Habré ou l’extrader et nous avons signé et ratifié des conventions contre la torture. Nous ne voulons pas être en faute par rapport à cette injonction de l’UA », a indiqué le porte-parole.

« Dans une résolution (annexe) adoptée dans le cadre de son sommet le 1er juillet 2011 à Malabo en Guinée Équatoriale, l’Union africaine a demandé au Sénégal de juger rapidement l’ancien dictateur tchadien ou de l’extrader », avait affirmé l’ONG Human Rights Watch dans un communiqué le 2 juillet.

Vendredi, cette organisation de défense des droits de l’homme a déploré la décision du Sénégal de renvoyer M. Habré au Tchad et non en Belgique.

« Les victimes de Habré se battent depuis vingt ans pour qu’il soit jugé mais c’est fondamental qu’il ait un procès équitable. Nous nous sommes toujours opposé à l’idée de l’envoyer au Tchad. Nous pensions que les conditions ne sont pas réunies aujourd’hui pour qu’il ait un procès équitable au Tchad », a déclaré à l’AFP l’avocat Reed Brody, un responsable de Human Rights Watch.

Hissène Habré « a déjà été condamné à mort par contumace pour d’autres crimes et nous espérons que le gouvernement tchadien va le renvoyer en Belgique où il pourrait avoir un procès équitable », a ajouté M. Brody.

La Belgique avait porté plainte contre le Sénégal en 2009 demandant qu’il juge ou extrade Hissène Habré.

Pour la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho), une ONG panafricaine basée à Dakar, « on amène tout simplement Hissène Habré à l’abattoir. Au Tchad, Hissène Habré ne va jouir d’aucune garantie d’un procès équitable ».

Hissène Habré, qui a dirigé le Tchad de 1982 jusqu’à son renversement en 1990, est réfugié au Sénégal depuis sa chute. Il est accusé de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture.

En 2006, l’UA avait demandé au Sénégal de juger Hissène Habré « au nom de l’Afrique », ce que le président sénégalais avait accepté, mais aucune information judiciaire n’a été ouverte.

AFP

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