Afrique centrale : les Eglises de réveil frein au développement culturel, économique et social

Par Lucien Pambou

La récente visite du pape François en RDC doit être perçue en partie comme une réponse au développement des Eglises de réveil en Afrique francophone. Si la responsabilité de l’Église vaticane dans l’émergence des Eglises de réveil ne doit pas être évacuée, force est de constater que les Eglises de réveil en RDC et Congo-Brazzaville profitent du vent de l’expression démocratique installée par les conférences nationales dans les années 90, sauf au Zaïre devenu RDC.

Les populations africaines d’Afrique centrale en particulier et les populations noires en général croient à tout ce qui vient de l’extérieur et qui les surplombe, comme la religion, le développement économique souvent initié par les litanies occidentales dans les pays africains. On comprend mieux pourquoi la traite des esclaves et les colonisations et néo colonisations actuelles empêchent les noirs africains d’avoir confiance en eux, de réfléchir par eux-mêmes et de se départir d’une personnalité acculturée. C’est vrai que les noirs que nous sommes, et malgré la profusion d’ingénieurs, de professeurs, de techniciens formés à l’étranger, nous demeurons incapables sans l’aide de l’Occident de promouvoir le développement économique et social dans nos pays. On peut me reprocher d’être le parangon du syndrome de la victimisation. Je ne le crois pas et je note que dans certains pays d’Afrique de l’Ouest où la démocratie essaie de jouer le jeu, les ingénieurs ne sont pas plus capables de construire des ponts durables et nous avons toujours besoin de l’occident ou de la Chine et demain de la Russie et pourquoi pas de l’Ukraine.

Nous sommes éloignés du développement car la plupart d’entre nous sommes intoxiqués par les Eglises de réveil qui ne permettent pas une auto-réflexion et une distance critique vis à vis du bien être individuel et collectif dans un pays. Ces Eglises de réveil créées dans le monde occidental ont essaimé en Afrique dans les années 80 et surtout 90 pour contrecarrer l’insuffisance de l’Église catholique dans l’évangélisation des populations africaines. Comme d’habitude, les noirs africains que nous sommes, intellectuels ou non, nous apparaissons comme friables et trop ouverts aux influences extérieures sans distanciation critique vis à vis de ce qui nous arrive. Il en est ainsi des Eglises de réveil qui bourrent le crâne des Africains et qui leur interdisent toute contestation vis à vis des mauvaises gouvernances politiques qui ont cours en Afrique centrale.

Pourquoi les Eglises dites de réveil constituent un frein à la prise de conscience critique pour la mobilisation en faveur du développement économique en Afrique centrale

Le développement et la recherche du progrès économique sont d’abord une affaire d’éducation et de culture. La tradition africaine sépare sa culture et la problématique de son existence à la différence des Occidentaux, des Asiatiques et d’autres populations sur la planète. L’Africain a honte de lui-même. On comprend pourquoi, au nom des critères absurdes de beauté, il essaie de changer de phénotype en  se décapant la peau. Même les hommes politiques de premier rang en Afrique centrale font la même chose que les femmes ce qui est désolant et absurde.

Les Eglises de réveil étouffent la culture africaine dans ce qu’elle a d’essentiel : l’organisation et la production minimale. Les élites africaines sont responsables pour avoir délaisser ces aspects culturels importants qui, en Europe, surtout en Italie du Nord et en Allemagne, ont permis au sociologue-économiste Max Weber de montrer que c’est grâce au protestantisme que le capitalisme est devenu la norme dans les sociétés occidentales. Nous sommes au cœur d’un véritable problème, à savoir le rôle du cultuel et du culturel pour promouvoir le travail, le sacrifice, l’épargne et l’accumulation nécessaire à la constitution d’une société prospère et créatrice de biens et de services.

La croissance économique ne tombe pas du ciel. La culture par le travail et le sacrifice favorise le développement. Que l’on aime ou pas les Occidentaux, les faits sont là, implacables. Nous pouvons toujours gloser, être en désaccord, bavarder à l’infini comme nous savons le faire, il faut noter que les populations de l’Afrique centrale après avoir assimilé les religions importées, comme l’Islam, le Christianisme, le Judaïsme, s’adonnent maintenant à de nouvelles religions dites d’Eveil, étrangères à leur corpus mental traditionnel.

La force économique des pays asiatiques et surtout du Japon est liée à la synthèse qu’ils font entre valeurs cultuelles, culturelles issues de leurs traditions et modernité économique. Rien de tel pour les Africains de l’Afrique centrale qui, après avoir été déçue par le catholicisme, se réfugient dans des religions chimériques dans lesquelles ils espèrent trouver le salut et les solutions à leurs pathologies sociales (misère, pauvreté, exclusion).

Les hommes politiques en Afrique francophone ont très bien compris la situation de délitement mental de leurs populations et refusent de mettre en place un cadre spécifique pour structurer ces religions dites de réveil. Pour les pouvoirs publics ethnico-démocratiques en Afrique centrale, les Eglises de réveil constituent du pain béni car, en s’adonnant à la religion, les populations évitent de contrarier les mauvaises gouvernances dans certains pays. Il y a aussi les Pasteurs qui ont flairé la bonne affaire car, en créant les Eglises de réveil, c’est un moyen pour eux de s’enrichir grâce aux dons des fidèles et c’est aussi l’occasion de se prêter à des prédations sexuelles auprès des femmes désespérées par leur sort, quand elles ont du mal par exemple à avoir un enfant. Nous sommes à la frontière de la folie collective en Afrique centrale. Il est nécessaire de réguler la formation et l’extension des Eglises de réveil.

Régulation des Eglises de réveil au Congo-Brazzaville et en RDC

Dans les pays de religion musulmane, les Eglises de réveil existent au Bénin et au Nigeria, mais pas avec la même intensité qu’en Afrique centrale où la religion catholique a ouvert la brèche et donc la voie à la prolifération des Eglises de réveil. La liberté d’association qui permet de former les Eglises de réveil ne signifie pas un désordre acceptable. La révolution religieuse qui éclate au 16ième siècle en Europe a fait émerger des religieux célèbres comme Calvin en France et Luther en Allemagne. Cette transformation de l’espace religieux avait pour but de montrer que la parole de Dieu pouvait être dite en plusieurs langues. C’est dans cette filiation qu’il faut expliquer la création des Eglises de réveil en Afrique.

Je ne suis pas contre les Eglises de réveil. Il ne s’agit pas d’interdire la liberté de culte mais il faut que les dirigeants politiques au Congo et en RDC structurent au mieux la création des Eglises de réveil. La liberté d’expression doit avoir des limites bornées par les institutions politiques pour éviter les drames, du type viol, dépossession d’épargne, soumission à un gourou.

Je termine en signant cette pétition suivante et de principe : les Eglises de réveil constituent un frein au développement culturel et économique dans les pays francophones, au profit des gouvernants et des pasteurs créateurs de ces Eglises de réveil.

Lucien PAMBOU

Diffusé le 20 février 2023, par www.congo-liberty.org