Quatre années nous séparent du décès de l’illustre Africain. Respectueux du combat qu’avait mené le grand homme sud-africain et sans jamais vouloir pour autant être iconoclaste, Congo Liberty avait tenu à souligner qu’au Congo Brazzaville la tyrannie y était pire que sous le joug des Afrikaners avant 1991. Pour ce qui ne s’en souviendrait pas, cela commençait ainsi :
Si Nelson Mandela avait été Congolais, peu importe sa région, Denis Sassou NGuesso l’aurait tué !
Au Congo de Denis Sassou-NGuesso, la vertu est un péril. L’intelligence est suspecte car elle évolue bien au-dessus de son monde obscur totalement tourné vers les ténèbres. Il jalouse plus que tout le charme et le charisme chez autrui et celui qui, naturellement les affiche, signe automatiquement son arrêt de mort. L’intégrité, il ne la souffre pas. Quant au juste, il est par nature son ennemi et le courageux est un adversaire dont il finira, très perfidement, par avoir raison. »
C’était le 8 décembre 2013, et Denis Sassou Nguesso ne s’était pas encore déchainé en révélant son véritable côté obscur. C’est sûr, c’est bien sûr ! Mandela, s’il avait été Congolais, n’aurait jamais été libéré.
Depuis qu’il avait obtenu le feu vert de François Hollande, en octobre 2015, pour modifier la Constitution, Denis Sassou Nguesso n’a reculé devant rien afin de conserver sa présidence de tous temps usurpée. La terreur est son arme favorite, alors que tout le monde sait bien qu’il a peur de son ombre…
Dès la proclamation des résultats de son élection présidentielle truquée, il s’est servi des deux armes dont il dispose : l’arme militaire en bombardant le Pool ; l’arme politique en emprisonnant tous ses opposants. La prison centrale de Brazzaville, la seule dont il use réellement, est de loin son instrument le plus efficace.
Idéalement placée, presque au centre ville, c’est une prison d’un autre âge, construite par le colon dans les années quarante. Prévue pour accueillir seulement 150 détenus, le tyran y entasse plus de 800 êtres humains sans soins médicaux, ni eau courante, ni nourriture décente dans une hygiène inexistante et une atmosphère infecte ; une véritable antichambre de la mort, infectée et étouffante. De cette prison cauchemar, aucun prisonnier politique n’en est sorti vivant ; c’est toujours les pieds devant que la dernière grande porte est franchie ou totalement amoindri. Le Colonel Marcel Ntsourou, paix à son âme, ne nous contredira pas.
Loin de s’améliorer, les conditions de survie vont se durcir. D’importantes vagues d’arrestations de lampistes, qui porteront le chapeau de la catastrophe financière subie par le Congo et encombreront plus encore l’innommable résidence. Ultime soupape de sécurité pour protéger la kleptocratie familiale !
L’opposant Paulin Makaya, qui a purgé sa peine depuis le début du mois de décembre dernier, y est toujours derrière les barreaux. Témoin gênant de la barbarie ambiante, carcérale et dictatoriale. Paulin Mayaka, citoyen de sa Royale Majesté, la Reine d’Angleterre, est condamné à rester indéfiniment l’otage du bourreau de l’Alima…
La conspiration du silence s’est répandue dans les représentations diplomatiques sourdes et aveugles. La Patrie des Droits de l’Homme, de sa Case de Gaulle, a donné le « La » muet et inaudible qu’un Dominique de Villepin, uniquement intéressé par les ors des palais du dictateur, lors d’une visite récente, s’est plu à confirmer…
L’Europe a raison de plancher sur la cruauté de la production d’œufs de poules en batterie ; ses représentants au Congo ont reçu l’ordre de regarder ailleurs que dans la direction de cette prison infâme où l’on pourrait envier les conditions d’élevage de ladite volaille. De son nouveau siège construit par les associés chinois de Bouya, Saskia de Lang de plus en plus muette n’y verra rien qui puisse offusquer le tyran de la place ; à la grande satisfaction de Bruxelles, totalement acquis aux lobbies pétroliers qui soutiendront Sassou Nguesso et son système jusqu’au bout.
Pourtant, un petit bout du voile obscur qui recouvre cette prison sordide vient d’être soulevé en permettant la libération du Colonel Marcel Pika, lequel y avait passé deux années dans les pires conditions. Le mérite en revient en grande partie à la solide famille que ce Congolais, exilé au Nebraska, a construite. Percy Pika, un des fils, a été très actif auprès du Représentant de son Etat, Monsieur Jeff Fortenberry. Ce dernier obtint qu’une équipe de l’Ambassade des Etats-Unis à Brazzaville visite son père en prison. Peu après, le 29 décembre dernier, Sassou Nguesso fauve sauvage, consentait à relâcher sa proie.
Depuis, les médias américains ont été nombreux à se pencher sur les conditions inhumaines d’emprisonnement dont Marcel Pika et ses codétenus ont été les victimes. Mais aucun écho, ou trop faible, ne s’est fait entendre de ce côté de l’Atlantique. Des ONG comme Amnesty International brillent par leur absence. Ghys Fortuné Dombe Bemba est depuis six mois à l’isolement dans des conditions sordidement inhumaines sans que RSF ou toute autre ONG ne s’en préoccupe.
Nelson Mandela du fond de sa prison, bien avant sa libération, avait été fort des soutiens qui avaient afflué de partout. Aujourd’hui, les prisonniers du tyran ont certes le nôtre mais cela ne va guère plus loin. L’Afrique se tait, même si Sassou Nguesso va trop loin. Ce déficit démocratique arrange tout le monde, bien au-delà de notre continent.
Alors les Congolais peuvent s’inquiéter de l’emprisonnement injustifié du véritable vainqueur de la dernière élection présidentielle, le Général Jean-Marie-Michel Mokoko. La tentation est grande pour le tyran de se débarrasser de son rival qui l’a battu, à plates coutures, dans les urnes avec 58% des voix dès le premier tour. Mais là encore des pare-fous, plus que des pare-feux, ont été fermement signifiés à la marionnette des pétroliers : interdiction d’attenter à sa vie ! Est-ce une légende ou est-ce bien vrai ? La disparition du Saint Cyrien plongera durablement le pays dans un chaos duquel personne ne sortira indemne. Personne n’est prêt à courir ce risque et d’en vérifier le mauvais augure.
Sassou Nguesso, en voulant abaisser, mépriser, humilier tous les gens de valeur qui se dressaient devant lui, doit comprendre maintenant, qu’au contraire, faute de pouvoir en venir à bout, il les a fait grandir ; ceux qui sont actuellement emprisonnés et ceux, très nombreux, qui ont entrepris de le faire partir.
Pour certains, pour beaucoup, l’homme de Makoua, né le 19 mars 1947 à Mossaka, n’est pas Mandela. Sûrement ! Peut-être ! Mais il a rassemblé des centaines de milliers de personnes à travers le pays, comme personne ne l’avait jamais fait avant lui, durant sa très courte, trop courte, campagne présidentielle. En lui repose cet espoir de paix, pas seulement pour ses électeurs, mais également ceux qui n’ont pas voté pour lui ou se considèrent comme ses pires ennemis. Beaucoup en sont conscients !
Sa libération, en même temps que tous les autres prisonniers, sera célébrée par tous. Le Congo, basculant dans la paix, sera gagnant, les Congolais également.
Et Sassou, paradoxalement aussi !
Rigobert OSSEBI
Diffusé le 10 janvier 2018, par www.congo-liberty.org
KIMBEMBE Yvonne dit :. Lorsque ce principe qu’on nous a appris est battu en brèche par ceux qui doivent dire si le droit a été bien appliqué, nous leur rappelons que en ce qui concerne la gestion de la cité, les faits sont têtus.
Hier, on pouvait mentir, tout inventer pour détruire un adversaire, aujourd’hui tout est vite su.
La responsabilité qu’on engagera ne sera ni celle de l’homme politique qui a donné des instructions, ni celle de la tribu qu’on a soutenue, mais celle de ceux qui ont mal appliqué la loi.
Les dictateurs dans ce monde ont tous terrorisé leurs populations par leurs cruautés. Mais l’histoire nous a révélé qu’en dernier ressort, c’est toujours les populations qui leur offrent une fin d’hommes minables.
Fumu si
L’auteur dit: au Congo la vertu est un péril et l’intelligence est suspecte. Ce constat montre que le Congo actuel ne peut aller de l’avant si la dictature continue à manger les cadres formés de partout. Drôle de dirigeants hostiles aux compétences qui pourraient faire sortir le pays de ce grand marasme économique et social
Il n y ait de crime qu’il ne soit oublié de la mémoire d’un individu. Quoique sassou fasse, les morts resteront dans nos mémoires. Jamais un homme n’a été aussi odieux envers son propre pays.