Porté disparu dans la nuit du 7 au 8 avril 2011 à ZANAGA dans des circonstances troubles, Melvin Tchamba Ngassam reste introuvable.

Cet ingénieur forestier camerounais, parti du Cameroun pour des raisons de service au compte de la société Geospatial Technology Group Congo Sarl (Gtgc) Congo-Brazzaville en octobre 2010 n’a plus donné signe de vie depuis le mois d’avril 2011. Pourtant, plus d’un an plus tard, son père François Ngassam reste persuadé que son fils est vivant«Au cas contraire, que l’on me remette au moins son corps afin vivant, que je puisse l’enterrer et faire mon deuil», nous déclare-t-il, la voix tremblante.

Le film triste et pathétique de la famille Ngassam commence le 9 avril 2011, lorsque Alain Bertin Tiotsop, son patron du Congo, appelle l’épouse du disparu pour l’informer de la disparition de son mari. «Tout semblait bien se passer jusqu’au 09 avril 2011, date à laquelle un fatal coup de téléphone de M. Alain Bertin Tiotsop, alors gérant de Gtg Congo, m’informe de la disparition de mon époux», relate Irène Flore Kamnang Komguep épouse Tchamba, le visage assombri par la douleur.

Cette dernière se rappelle que sa dernière conversation avec son mari remonte au 6 avril 2011. «J’ai eu mon mari pour la dernière fois au téléphone ce jour-là à 6h30. Il m’avait appelé pour me dire qu’il était dans le véhicule avec des collègues pour aller en mission à Zanaga». Depuis, plus rien. A tel point que l’absence de leur père a, dit-elle, affecté ses enfants. «Je ne dors pas plus de 3h de temps», affirme de son côté le père du disparu, physiquement épuisé. L’histoire qui se raconte autour de ladite disparition ne convainc pas la famille qui estime «qu’il y a beaucoup trop d’éléments qui ne collent pas dans cette affaire». D’après ses collègues en effet, c’est sur la base de l’ordre de mission n°12 daté du 6 avril 2011 qu’ils se rendent avec Melvin Tchamba à Zanaga pour réaliser un travail d’aménagement forestier dans le cadre du partenariat avec la société Taman industries.

Partis de Pointe-Noire aux alentours de 14h30 locales (même heure au Cameroun), il est environ 19h lorsque les trois agents sont accueillis à Dolisie (troisième ville du Congo située au centre de l’axe Pointe-Noire-Brazzaville) par le coordonnateur local de la cellule d’aménagement. Comme il se fait tard, ils passent la nuit dans les locaux de la société Asia Congo, partenaire de leur entreprise.

Le 7 avril à 20h, ils arrivent à Zanaga, après une escale dans la ville de Sibiti. A Zanaga, ils sont accueillis par leurs collègues et installés dans un camp de fortune de la société Taman industries. Après le dîner, ils sont logés par deux dans les chambres. Ainsi, Tchamba Ngassam se retrouve à partager une chambre avec Elvis Tetuh. Selon M. Tetuh, Melvin Tchamba est sorti de la chambre vers minuit parce qu’étant en conversation téléphonique. Ce que les parents du disparu reconnaissent, car le coup de fil venait de sa soeur cadette.

Marabouts

Mais cette dernière affirme que durant les minutes de l’échange, la communication était très mauvaise et elle n’avait pas de retour. Tchamba Ngassam va ainsi sortir à plusieurs reprises, selon les dires de M. Tetuh. Emporté par le sommeil, c’est à 3h40 qu’il constate l’absence de son collègue. Ce n’est que le lendemain matin, à 6h, qu’il va alerter le En camp «après avoir attendu son retour en vain» toute la nuit. compagnie de Lawrence Nsoyuni Eyenika, le directeur de la Gtg Cameroon et par ailleurs l’ex-patron de son fils au Cameroun, François Ngassam va se rendre le 12 avril 2011 au Congo. Ils partent pour Zanaga, empruntant le même trajet que son fils et ses collègues. «Et là, je découvre une maison en pleine broussaille, avec des toilettes construites dans une bananeraie et creusées à près d’un mètre du sol», relate M. Ngassam, le regard voilé de larmes. Des recherches vont être organisées.

mis à contribution pour retrouver Les marabouts et féticheurs sont l’ingénieur, mais sans résultats. Après avoir passé trois semaines au Congo, M. Tchamba n’est pas convaincu de la version que les collègues de son fils lui ont servie. Non seulement parce qu’«à Pointe-Noire, nous une chose dont il ne se sépare jamais avons retrouvé son alliance, depuis qu’il s’est marié. En plus, nous avons retrouvé ses lunettes médicales qu’il ne quitte pas aussi parce que souffrant d’un mal d’yeux. Non sans parler de son sac que nous avons trouvé déchiré et en désordre».

Mme Tchamba aussi a des soupçons. Car, comment interpréter le coup de fil reçu le jour de la disparition de son époux. «Le 8 avril, Achille Wankeu, l’un des collègues de mon mari, m’a appelée pour prendre de nos nouvelles, les enfants et moi. Avant de raccrocher, il m’a demandé la dernière fois où j’avais parlé à mon époux. Je lui ai répondu que j’avais eu Melvin au téléphone il y a deux jours. M. Wankeu m’a dit ‘merci’ et a raccroché», raconte-t-elle, soulignant que c’était la première fois qu’un collègue de son époux l’appelait au téléphone. Intriguée, elle compose aussitôt le numéro de son mari. «J’ai essayé de joindre Melvin, mais son téléphone ne passait pas. J’ai pensé que cela était dû à un problème de réseau». Jusqu’à ce coup de fil fatidique le 9 avril faisant état de la disparition de son époux.

Des incohérences auxquelles s’ajoutent des échanges téléphoniques et des emails entre un certain Luc Jean présenté comme un gardien du camp de Zanaga, et Marlyse Carole, la soeur cadette du disparu. Une personne en possession d’informations assez précises sur «l’enlèvement» et «les conditions de détention» de Melvin Tchamba. Les derniers e-mails datés du 7 juin 2011 laissent croire que le disparu est encore en vie à cette période-là. Et d’après Luc Jean, il faut 600.000 Fcfa pour les sortir : lui, sa famille et l’ingénieur camerounais. Parce que, tous du Congo dit-il par écrit, «je risque ma vie et celle de ma famille en vous aidant». Seulement, l’argent doit transiter par le Gabon, car «je ne dois pas avoir de relation avec le Cameroun. Sinon, je peux me faire  suspecter».

Le 13 juin 2011, de l’agence Express Union de Douala-Madagascar, la somme de 350.000 Fcfa est expédiée vers l’agence Money Gram au Gabon, avec pour bénéficiaire une certaine Candite Flore Prisca Nzahou Nzassi. Le 21 juin 2011, un autre montant, de 250.000 Fcfa cette fois, est expédié. Depuis, plus de nouvelles. Epuisée financièrement et moralement, la famille reste toujours dans l’attente d’un retour de leur fils. Bien que les notes d’enquête signées du magistrat Honoré Bikindou font état du décès de leur enfant, mort des suites de suicide le 7 avril 2011.

Un argument qui, d’après les enquêteurs, se fonde sur la présence d’une boîte de Fluoxétine dans les effets personnels de Melvin Tchamba. Un antidépresseur préconisé dans les épisodes dépressifs majeurs et les troubles obsessionnels compulsifs. La Dgsn s’est saisi du dossier. Un dossier confié à Interpol. Le 16 avril dernier, la Commission indépendante contre la corruption et la discrimination (Comicodi) a saisi le délégué régional du Haut-Commissariat des droits de l’Homme de l’Afrique centrale sur la manifestation de la vérité liée à la disparition mystérieuse de ce compatriote. En attendant, la famille Tchamba assure que tous les espoirs sont tournés vers le gouvernement camerounais dont elle attend des réponses.

L’ingénieur avalé par la forêt

Parti en mission de service il y a plus d’un an dans une localité au sud-ouest du Congo, Melvin Tchamba Ngassam reste introuvable.

Le 07 mai prochain, il aurait fêté ses 35 ans. Un anniversaire qui sera célébré dans la douleur par sa famille et ses proches, car il viendra rappeler l’absence de ce parent introuvable depuis plus d’un an en République du Congo où il a été détaché en octobre 2010 par la société Geospatial Technology Group Congo (Gtgc), une entreprise qui participe aux travaux d’élaboration des plans d’aménagement des concessions forestières attribuées aux sociétés Taman-Industries, Sicofor et Asia Congo. Selon l’ordre de mission établi à cet effet et signé le 1er octobre 2010 depuis Pointe-Noire au Congo, M. Tchamba Ngassam, ingénieur des eaux, forêts et chasse, devait rallier cette ville congolaise le 5 octobre 2010 en qualité de superviseur technique des travaux. Son retour au Cameroun était fixé au 5 avril 2011. Hélas, Melvin Tchamba Ngassam est porté disparu dans la nuit du 7 au 8 avril 2011, alors qu’il est en mission dans la localité de Zanaga, dans le sud-ouest du Congo. Soit six mois après son arrivée en terre congolaise.

Cela fait donc plus d’un an que sa famille, notamment son épouse Irène Flore, est sans nouvelles. Une année entière où la petite Françoise, sa fille aînée, aujourd’hui âgée de 4 ans, n’a plus revu son père. Que Sarah Line, sa cadette qui avait quelques mois lors de son départ, ignore tout de ce géniteur qui a accepté d’aller travailler au Congo pour «assurer l’avenir de ses enfants». Même si son épouse était réticente de le voir s’envoler pour d’autres cieux.

Fasa

Car, si elle s’était habituée à le voir uniquement les week-ends à Dschang (Ouest-Cameroun) lorsqu’il venait rendre visite à sa famille – il vivait à Yaoundé pour des raisons de travail – elle ne se sentait pas prête d’élever leurs enfants seuls. Mais, ce diplômé de la 9ème promotion de la Faculté d’agronomie et des sciences agricoles (Fasa) de l’université de Dschang, animé du désir de mettre sa famille à l’abri du besoin, était fermement décidé à accepter ce travail. D’autant plus que, selon sa famille, «les conditions de vie devenaient de plus en plus difficiles à la Geospatial Technology Group Cameroon» qui l’employait depuis le 1er août 2009, jusqu’à la date de son détachement au Congo.

C’est à Edéa, dans la Sanaga-Maritime (région du Littoral) où il est né un 07 mai 1977 que Melvin Ngassam Tchamba suit des études primaires et secondaires, sanctionnées par un baccalauréat C. Admis à la Fasa l’année d’après, il en sort en 2007 avec un diplôme d’ingénieur des eaux, forêts et chasse, après cinq années de formation. A sa sortie de l’école, ce membre du Réseau Fasa Alumni (anciens diplômés de la Fasa) multiplie les dépôts de candidature ci et là pour décrocher un emploi.

En 2008, après avoir lu sur le crawl de la Crtv qu’une société recherchait un ingénieur forestier, il dépose son dossier à la Gtg-Cameroon sis au quartier Tsinga à Yaoundé. Sa candidature est retenue. Mais ce n’est que le 1er août 2009 qu’il est, d’après ses proches, «officiellement embauché» par cette entreprise en qualité d’aménagiste. Il va y travailler jusqu’en 2010, avant de s’envoler pour le Congo. Un pays qu’il connaissait déjà, puisque, selon la famille, il y avait déjà effectué une mission de quatre mois en 2008. Ignorant que la séparation avec sa famille serait alors cette fois-ci plus longue que prévue, voire définitive.

Ecrit par : Patricia Ngo Ngouem et Marthe Ndiang

Article paru dans le Quotidien camerounais Mutations le 4 mai 2012.

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