
Par Joseph Ouabari-Mariotti
Adieu Maître Aloise Moudiléno Massengo. Tu auras été l’un des meilleurs d’entre nous.
Près de deux ans après le décès, à Saint Ouen l’Aumône en France, de son ami et collègue juriste, Alexis Gabou, Maître Aloise Moudileno Massengo nous a quittés, le 6 janvier 2020, à Nancy, également en France.
Premier Avocat congolais, inscrit dans un Barreau français, premier Avocat noir du Barreau de Nancy où il exerce jusqu’en 1966, Maître Aloise Moudileno Massengo deviendra, par la suite, Avocat près la Cour d’Appel de Brazzaville, avant d’être nommé, sous le Président Marien Ngouabi, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice du Congo en 1968. Une charge ministérielle qui lui ouvre les portes d’autres niveaux plus élevés, au sein de l’appareil étatique congolais où il en finit comme Vice Président du Conseil d’Etat.
Homme libre, Maître Aloise Moudileno a voué sa vie entière à son engagement politique pour sa patrie. S’y étant, consacré intensément.
Jeune
étudiant, en France, son discours anticolonialiste fait trembler. Il
milite, au sein de l’Association des Etudiants Congolais(AEC),
affiliée à la Fédération des Etudiants d’Afrique Noire
Francophone(FEANF). C’est le point de départ de son combat politique
qui lui a donné l’occasion de côtoyer d’illustres figures
africaines, devenues par la suite de personnalités notables dans
leurs pays.
La
politique était, pour Maître Aloise Moudiléno Massengo, une
passion, en parallèle à son métier de juriste qu’il n’arrêtait de
perfectionner. Et sa détermination d’exercer, sans faille, la
politique, était à ses yeux, le fruit d’une éducation familiale où
primaient les valeurs de travail, de responsabilité, d’altérité et
d’humilité. Ce qui a forgé sa forte personnalité.
Des hommes
politiques congolais, depuis l’année de l’indépendance, Maitre
Aloise Moudiléno Massengo est au compte de ceux qui ont le plus
incarné une haute idée du patriotisme. Il l’a vécue comme une
exigence de rigueur et de vérité, une pratique sans défaillance
des vertus laiques. D’où la naissance du Mouvement Patriotique
Congolais, un parti qu’il a créé avec son ami, Mr Ekondy Akala, et
qui, par endroit, a influencé les orientations de la conférence
nationale en 1991, à Brazzaville.
Aussi
bien dans les fonctions d’Etat qu’il a occupées que dans sa
profession d’avocat, Maitre Aloise Moudiléno Massengo s’est
distingué par la vivacité de son esprit, son énergie, sa patience,
son accroc au travail, son opiniâtreté, l’habileté et le secret
professionnel. Ce à quoi s’ajoute son attachement aux traditions
spirituelles que partagent les Congolais.
Maitre Aloise Moudiléno
Massengo était un de ces hommes publics qui placent leur action au
service des autres dans le souci de promouvoir une société
solidaire, capable de rendre aux plus faibles, à ceux que la vie a
durement éprouvés, leur dignité et leur juste place.
Le
temps de son exil à l’étranger, Maître Aloise Moudileno Massengo
était un modèle de courage, d’intelligence, d’abnégation et d’un
dévouement inaltérable.
Pour certains d’entre nous, Maitre
Aloise Moudiléno Massengo était un parent. Pour d’autres, un ami,
peut être un Frère, un compagnon fidèle. Pour la plupart, un
exemple ayant placé sa vie sous le signe du combat
patriotique.
Jusqu’à l’extrémité de ses forces, il est demeuré
le digne sage qui conseillait, sur tous les domaines. Même, dans ses
derniers jours, il a su trouver l’énergie nécessaire pour recevoir
des visiteurs.
Aussi, nous nous inclinons devant sa mémoire, lui
qui fut pour nous, unanimement respecté, tant son parcours est
remarquable.
A
sa famille et ses proches, j’exprime ma profonde tristesse et ma
solidarité dans l’épreuve qu’ils traversent.
Repose, en paix,
Maître. Tu laisses l’exemple impérissable des plus admirables
qualités politiques. Ta vie est un véritable enseignement, comme
leçon de vie, en ce qu’elle illustrait avec modestie et efficacité
une certaine idée de la politique.
Sans
l’avoir voulu, comme d’autres compatriotes avant toi, tel le ministre
Nguila Moungounga Nkombo, tu meurs en exil. Et tu seras porté en
terre, hors de ta terre natale. Ainsi, dans leur détresse, les
parents et proches restés au Congo, te pleureront à distance. Ce
que tu n’aurais pas souhaité, placé dans une posture
normale.
Puisse l’immense chagrin que nous ressentons, par ta
disparition, me donner, à nouveau, l’occasion d’en appeler, à
l’esprit républicain et patriotique des autorités congolaises sur
l’impérieuse nécessité, pour elles, de proclamer, en ce début
d’année des 60 ans de l’indépendance du Congo, une amnistie
générale de tous les prisonniers politiques et d’opinion, où
qu’ils se trouvent.
Une
amnistie qui déboucherait sur un compromis politique, juste,
transpartisan et équilibré, devant ouvrir au Congo la voie d’une
ère nouvelle de développement de concorde et de cohésion
nationales.
Maître. Va. Nous ne t’oublierons jamais.
La mort
est ultime et tous, nous réunit dans la boue pour finir. Même quand
nous aurons conquis le monde, nous descendrons dans la tombe où se
trouvent assemblés les rois, les pauvres et les mendiants.
Ouabari Mariotti ancien Garde des Sceaux, Ministre de la Justice du Congo.
Paris le 7 janvier 2020 –
Le nom de Maître Aloïse MOUDILENO sera inscrit sur le marbre des éminents juristes congolais, à l’instar de Joseph POUABOU, Lazare MATSOCOTA, Roch NGANZADI, Alexis GABOU. Ils ont suscité, à l’occasion des procès retentissants, des nombreuses vocations.
A cause de la disette des talents politiques et de la médiocrité qui sévissent actuellement au Congo, d’aucuns penseraient que de tels personnages n’existent que dans les livres des contes ! Et pourtant, les Moudiléno ont bel et bien vécu au Congo,devenu aujourd’hui une île aux pirates,sans boussole ni lois !
Pour expliquer son départ du gouvernement et choisir le chemin de l’exil, il dit dans son livre « UNE ESCROQUERIE IDEOLOGIQUE… », paru en 1975 :
« J’ai l’âme trop fière pour me complaire à la médiocrité ».
Voyez-vous, cette médiocrité dont se rendra compte Maître MOUDILENO-MASSENGO dès 1972, continue encore aujourd’hui…
Vas, mon cher Grand-frère, et repose en paix ! Je n’oublie pas les décennies passées ensemble dans ce combat que tu nous laisses.
Matondo ma mingi !
UN POETE DE LA JUSTICE SOCIALE S EN EST ALLE
QUE LA TERRE LUI SOIT LEGERE
LA OU VOUS ETES VEILLEZ SUR LE CONGO EN VOIE DE FRACTURATION
ET ENCORE MERCI CHER MAITRE MOUDILENO MASSENGO
J’avais cru voir Emmanuel Yoka à ses obseques?