Tout le monde a bien compris que nous avons assisté, que nous assistons à une sorte de mise en espace lamentable, un ballet dantesque.
Mais la France ne nous l’a pas déclaré comme telle, il n’en est pas moins certain. Les dictateurs se sauvent d’eux-mêmes par leurs relations, leurs clientélismes, leurs pactes, ils enfreignent les lois. Ils se foutent des principes élémentaires du savoir-vivre, ils ont et se donnent les moyens : corrompre est devenu pour eux un acte citoyen.
Denis Sassou N’Guesso qui est censé incarner le peuple congolais, par le biais de ses aboyeurs, distribue de l’argent à qui veut bien l’applaudir, et nous ne sommes pas en Afrique, nous sommes bel et bien en France. C’est la grande épreuve de vérité, personne ne peut l’empêcher de faire ce qu’il veut. Le Général parade « the show must go on ! ». Et croire que la simple volonté des hommes justes réussira à tout changer, jusqu’à quelle rupture et finalement pour quoi faire ? Est-il si facile de s’illusionner ?
Le marasme en Occident est structurel, sociétal, donc général. C’est si vrai qu’eux-mêmes ont du mal à gouverner, comme par nécessité, ils n’hésitent pas à supporter, à préparer, à protéger les mêmes guignols tout en contenant les remous du moindre opposant.
Les dictatures sont au départ d’essence démocratique – coup d’état pour changer des choses, changer la vie et donner de l’espérance au petit peuple qui se meurt – la France a trop longtemps hésité et ses réactions presque malhabiles ne supportent plus l’indécision, le Congo s’effrite, rien ne va plus.
D’où il appert que les grands moments de la République Française envers ses anciennes colonies pour sa politique étrangère n’existent pas, on n’en est pas encore là.
Nul roi n’a jamais remplacé son valet de chambre par un quidam qu’il ne connait pas, qu’il n’a jamais humilié. Le cynisme d’Etat est une magistrature essentiellement républicaine, la pléthore légale des magouilles du pétrole a remplacé la décision du principe de démocratie.
Dorénavant, on fera avec ce qu’on a dans la main, un point c’est tout.
Tout le monde n’est pas Benoit XVI, ancien souverain pontife, pour rompre avec la tradition de la compromission. Ᾱ Paris, on a célébré un général génocidaire, potentat du Congo Brazzaville qui préside à la culture de la mort dans son pays. Le chef d’Etat congolais n’a aucun respect au droit primordial de la vie, tuer pour lui est un jeu d’enfant.
Au reste, que deviendraient les Bolloré et les Pégasse si la corruption disparaissait dans le continent noir. L’argent rend tout enviable grâce aux traditions mises à la portée des grandes banques d’affaires. Dans la mafia, le visible et l’invisible ne font qu’un. Alors, la France collabore à cette politique africaine d’étouffement choisi. La manigance dans ce cas est aussi claire et sans appel. Dans cette valse des magouilleurs, il y a aussi des règles à respecter : structures de pouvoir, intérêts fondamentaux, motivations propres des acteurs.
Le concept de cynisme renvoie aux individus et aux organisations, élites politiques incluses qui s’attachent à poursuivre et à protéger les intérêts particuliers de la France. L’analyse par régions du Congo, recouvre les champs sociaux, politiques, économiques et institutionnels susceptibles d’affecter la dynamique du changement qui tend vers une Nation unie.
Sous la forme d’un tribalisme structuré, la haine de l’autre met en évidence l’existence d’une sorte de causalité circulaire, entre citoyens du Nord dominants donc au pouvoir, et les populations du Sud dominées, c’est aujourd’hui une société qui a opéré un changement de type d’inégalité. Pour le moment, la dictature au Congo est immuable. Depuis longtemps déjà, le voile est systématiquement jeté sur toutes ces défaillances : des valises ambulantes, des rétro-commissions, des mensonges d’Etat, la France n’est plus dans son rôle de légaliste, trop de suspicions, procès, dérapages et biens mal acquis. On refait le bal et on reprend les mêmes.
Consensus nécessaire entre les médias, le Congo est un domaine réservé de la France. Tout est centralisé à Paris, c’est parfaitement machiavélique mais c’est comme ça, rien à dire, allez, circulez !
La fin pitoyable de cette mascarade contribuera aussi à hâter la déconfiture d’un pays abandonné au bon vouloir des escrocs transcontinentaux. C’est le scénario le plus probable mais à plus longue échéance. En regardant dans ce beau Congo tous ces congolais humiliés et la main tendue, on a envie d’un peu d’air. Les vautours s’appliquent dans ce carnage comme jamais auparavant, les entourloupes, les entourages, les cousinages, les liens de sang, les sectaires, les boulimiques, les groupes de pression ont tout prévu, un dosage approprié et des moyens pour. Malheureusement dans tout ça, la France, en charge de l’essentiel, apte en cas de péril à prendre sur elle de faire tout ce qu’il faut. C’est une politique africaine de la France-Mère qui parait bien byzantine. Pour la coopération congolo-française, les points d’application ont beau changer, mais le cynisme demeure. Enfin, à une échelle beaucoup plus large, toute l’Afrique n’a que du mal à se sortir de ce système primordial d’assujettissement. Mais, à cette culture française, nous sommes beaucoup d’intellectuels africains à lui être redevable pour ses modèles théoriques et ses instruments conceptuels.
Par Dina Mahoungou « Ecrivain et journaliste médias »
Diffusé le 30 avril 2013, par www.congo-liberty.org
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