Bounty Vs Bledard : le choc culturel des jeunes Noirs de France.

Par Aliou TALL

« Ma sœur tu es trop belle, wallahi. On va MANGER un CAFÉ ». Disait Mamadou, un jeune immigré africain qui voulait draguer Djeneba, une fille Noire née en France, qui lui répond : « Même pas dans tes rêves. Déjà tu es habillé bizarre. Et puis on ne mange pas un café, ça se boit ». Cette fiction illustre bien les rapports complexes entre les jeunes africains issus de l’immigration en France. Les uns trouvent que les autres sont déracinés et les appellent « BOUNTYS ». Ces derniers regardent les premiers comme des ringards et les nomment « BLEDARDS ». Une immersion dans leur quotidien permet de découvrir les souffrances, les frustrations et le choc culturel auxquels ils sont confrontés.

Bounty le déraciné – Blédard le ringard.

Djeneba est une fille Noire née en France de parents immigrés ; elle vit dans une cité en banlieue parisienne; ses camarades Blancs la considèrent comme une étrangère, alors qu’elle est née dans la même ville et fréquente la même école ; elle fait tout pour adopter les us et coutumes de la France ; elle refuse les habitudes culturelles du pays d’origine que ses parents africains veulent lui transmettre : elle est qualifiée de BOUNTY.

Mamadou est un garçon Noir né en Afrique qui est venu vivre en France après sa majorité ; il n’articule pas bien quand il parle français et il a un fort accent africain ; il a du mal à se débarrasser des habitudes et des coutumes qu’il avait dans son pays ; sa tenue vestimentaire est typée ou « has been » ; il ne veut pas, ou ne peux adopter les codes vestimentaires des jeunes branchés en France : Il est qualifié de BLEDARD.

Le Bounty et le Bledard sont tous les deux issus de l’immigration et des mêmes cultures africaines. Mais ils se distinguent par leur style vestimentaire, par leur manière de parler français et leurs accents. Chaque groupe, estimant que sa manière d’être est meilleure, nourrit à l’égard de l’autre un complexe de supériorité. Dans certains rapports, comme les sentiments amoureux, ils peuvent se mépriser mutuellement. Mais leurs chemins se croisent inéluctablement, et leurs destins sont confusément liés dans les banlieues françaises.

Je t’aime – Mon non plus.

Entre les Bountys et les Bledards ce n’est pas le grand amour. Les Bledards considèrent souvent les filles Bounty comme des dépravées qui ne respectent les normes et les mœurs sociales des pays d’origine de leurs parents. Les filles Bounty voient souvent les hommes Bledards comme des profiteurs, prêts à les épouser juste pour avoir un titre de séjour ou la nationalité française. Leurs rapports intimes avec les français autochtones sont différents. Les Bledards ont plus de mal que les Bounty à se marier avec un ressortissant français de race blanche. La différence culturelle et religieuse constitue un obstacle conjugal. De sorte qu’il est très rare de voir une Blédarde musulmane épouser un français non musulman, à cause de l’interdiction de l’Islam sur ce point. Les filles Bounty, même si elles ont les mêmes contraintes familiales et religieuses, se donnent plus de liberté que les filles blédardes. Elles peuvent se marier avec des Blancs, des Arabes ou d’autres nationalités, contre le gré de leurs parents immigrés. Ces derniers sont déconnectés de leurs systèmes sociétaux. Ils ont perdu l’autorité indiscutée que les parents exercent sur leurs enfants en Afrique. Dans un pays où les enfants ont plus de droits que les parents ; où corriger son enfant peut être puni ; où les instituteurs et les assistantes sociales mènent souvent la vie dure aux parents d’élèves africains, jugés irresponsables ou laxistes dans l’éducation ou la scolarité de leurs enfants, ces derniers prennent le dessus sur leurs parents. Ces enfants d’immigrés risquent d’être tiraillés entre la culture africaine que leurs parents ne peuvent pas leur inculquer convenablement, et la culture française qui ne les embrasse pas. Ce défaut de repère explique en partie la dénomination péjorative collée aux filles Bounty : Les vaches folles (En référence aux vaches disjonctées, atteintes d’une maladie neurologique dégénérative de type Creutzfeldt-Jakob).

Bountys et Bledards sont victimes des mêmes stigmatisations et discriminations.

Bounty et Bledards composent la population de « Sowetos » invisibles, où se passe un Apartheid sournois, spécifique à certaines banlieues françaises. Ils y subissent le même sort : Après avoir souffert pendant des décennies d’une stigmatisation politicienne, d’une ghettoïsation systémique, et d’un racisme de plus en plus décomplexé, ils sont devenus la cible indirecte d’une gentrification obséquieuse. Cette nouvelle politique d’urbanisation a pour objet de récupérer des quartiers sensibles gangrenés par des immeubles insalubres ; la délinquance ; le trafic de stupéfiants ; et une surpopulation étrangère, pour en faire de nouvelles zones d’habitation destinées aux classes autochtones aisées. Elle aura pour effet de confiner davantage les personnes issues de l’immigration dans des poches de banlieues infestées par des taux de déscolarisation et de chômage endémiquement élevés ; des discriminations au travail et au logement encore plus marquées ; et des contrôles policiers au faciès banalisés. Alors que les Bountys sont généralement français ou le deviennent à 13 ans, ils sont considérés comme des étrangers, au même titre que les Bledards. Les uns et les autres sont invités à un dépouillement identitaire intégral, gentiment dénommée « Assimilation ». Ils doivent abandonner toute référence aux coutumes de leurs pays d’origine, pour être de bons Nègres. A défaut, ils seront accusés de communautarisme.

Bountys et Bledards font l’objet d’un même traitement par des hommes politiques et des intellectuels français, persuadés qu’ils sont la cause du mal des banlieues françaises, dont ils sont pourtant les premières victimes. On se rappelle des propos du président français Nicolas Sarkozy, qui promettait de nettoyer des banlieues au Karcher : « Vous en avez assez de cette bande de racailles ? Eh ben on va vous en débarrasser.». (Au regard de ses ennuies judiciaires interminables, on dirait que Sarkozy s’est auto-éclaboussé avec son Karcher). En dépit des discriminations flagrantes dont ils font l’objet, les jeunes Noirs de France continueront encore de servir de fonds de commerce à des politiciens xénophobes, negrophobes ou islamophobes. Leur souffrances s’expriment parfois par la révolte, comme celle qui a embrasé les banlieues françaises en 2005.

Aliou TALL,

Président du Réseau Africain de Défense des Usagers, des Consommateurs et du Citoyen

(RADUCC)

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9 réponses à Bounty Vs Bledard : le choc culturel des jeunes Noirs de France.

  1. le fils du pays dit :

    Mr Tall,je crois que ce n’est pas un choc de culture sinon une grosse bêtise des noirs, seul peuple qui ne connait pas son histoire, qui n’ose meme pas la connaitre afin de l’enseigner.Les pakistanais, indiens pour ne citer que ces deux communautés leurs enfants nés en occident ne voient pas leurs compatriotes nes au pays comme les êtres de peu valeur (le fait d’être nes dans un pays dit tiers monde selon la qualification donnée par ceux qui pensent avoir cree ce monde) contrairement a la plus part des enfants des noirs nes dans les pays dits développés.C’est une hérésie.
    Les noirs doivent retrouver leurs reperes,leur vraie histoire afin de bien éduquer leurs enfants sur cette base pour qu’ils ne soient plus perdus.Voila la racine du problème.

  2. l'Africain authentique dit :

    Arretons de passer notre temps a se plaindre des idioties des Noirs qui ne veulent pas vivre en Afrique chez eux. Tant pis pour eux.
    Dans tous les cas, nous, Noirs vivant chez nous en Afrique sud saherienne, n’avons plus qu’un seul a savoir l’amelioration de la qualite de la vie dans notre environnement. C’est un combat difficile, mais nous reussirons. Alors, tant pis pour les eternels chercheurs de bonheur (immigres)

  3. Etant sur le même fil d’idée que @Fils du pays; je pense que les africains doivent prendre d’abord conscience de l’aliénation culturelle et surtout religieuse dont ils sont victimes, peu importe là où ils se retrouvent, en Occident ou en France, aux USA, aux Antilles, dans le monde arabo-perse et surtout en Afrique. Le véritable défis a relevé par cette diaspora Bounty ou Bledard, c’est le combat économique, du reste càd cette division voulue par les occidentaux pour mieux nous contrôler dans la soumission de notre état de pauvreté matérielle et surtout spirituelle, ce conditionnement sera vite vaincu si nous avons une arme économico-financière très forte pour imposer nos points de vue et notre vision culturelle, politique et religieuse. Je pourrais bien ajouter l’exemple de la diaspora juive ou chinoise en France, qui ont un pouvoir économique et influencent ainsi le vote de certain loi à l’Assemblée; d’où ils ont l’autorisation d’avoir des écoles uniquement juives ou chinoises dans lesquelles ils mettent plus l’accent sur les volets culturels ou religieux de leurs lieux d’origine. C’est ce que font les philippiens au Canada par exemple. Seuls les africains qui ne comprennent pas ces enjeux. Cette schizophrénie culturelle ou religieuse, que nous décrit l’auteur de cet article, n’est que la conséquence de cette aliénation culturelle et religieuse des noirs de cette diaspora depuis 03 ou 04 générations d’immigrés. Ces enfants (bountys ou bledards) ne sont que des victimes. Lorsqu’on a uniquement pour objectif en France d’avoir rien que le titre de séjour ou la nationalité française, puis dépenser toute son énergie à travailler péniblement pour s’acheter un appartement, on est surpris d’avoir presque 50 ans, plus de moyens pour éduquer les enfants. Heureusement que certains prennent déjà conscience sur la question et repartent constamment en Afrique où ils établissent des bases d’investissement ou des garanties, puis en profitent pour assurer l’éducation culturelle africaine dont ces enfants ont vraiment besoin. Certains diront, mais en Afrique c’est la dictature ou le chaos, l’on ne peut pas investir dans ces conditions!? Ils ignorent que c’est dans ces conditions là que les occidentaux ou les chinois s’enrichissent. Regardez bien Business Africa et vous verrez que les noirs qui réussissent en Afrique c’est cette diaspora consciente repartie sur le continent avec ces connaissances acquises en Europe ou ailleurs. Nous ne pouvons pas mener un vrai combat politique de libération de l’Afrique ou octroyer une bonne éducation culturelle profitable pour nos enfants si nous ne nous affirmons pas économiquement.

  4. Mark dit :

    C’est quoi le choc culturel des jeunes noirs de France? Allons nous exiger a un enfant noir né et grandi en France de danser la RUMBA? Manger le SAKA SAKA? Chanter les chansons de KOFFI OLOMIDE? Porter les habits en PAGNE? Arretons d’exagerer. Finalement que dites vous des enfants noirs en Afrique qui ne parle que francais et non les langues africaines? Oui, il y a au Congo des enfants né et grandi au Congo qui ne parle que francais.

  5. Revelino dit :

    Quand vous êtes nés dans un pays et avoir tout connu dans ce même pays, vous ne pouvez pas faire attraction de l’environnement dans lequel vous évoluez. On ne peut pas demander aux noirs qui sont nés en France d’être comme des noirs qui sont nés en Afrique. Ils n’ont rien en commun. Un enfant d’un congolais né en France n’a rien en commun avec un enfant d’un congolais né au Congo. La seule chose que les deux enfants ont en commun, c’est leur origine. C’est tout.

  6. Végétarienne dit :

    «Entre les Bountys et les Blédards, c’est pas le grand amour».
    Oui, on peut tomber d’accord sur la majorité des raisons avancées par Mr Tall pour expliquer ce désamour.
    J’aimerais juste ajouter qu’au delà du fait culturel, d’enracinement pour les uns et du déracinement pour les autres, il y a aussi une asymétrie dans cet hypothétique couple. Ici, les écarts d’âge trop importants sont à prendre en considération. En plus, le blédard qui souvent a des ambitions sur la bounty, est semi ou totalement analphabète, chose qui déclasse certaines candidatures, même en Afrique. Pourquoi ne pas le comprendre ici?
    Un jeune étudiant blédard, en BTS ou en école d’ingé, croyez moi, la bounty, se passera fort bien de son accent ou de son attachement séculaire à certaines traditions de son pays d’origine.

  7. Val de Nantes dit :

    Ce serait une invite ensorcelante faite à ces enfants innocents de nos malédictions africaines ,que de leur demander de subir ce parcours initiatique .
    Epargnons leur ,cette odeur africaine empreinte de parfum de malchance continue …

  8. Anonyme dit :

    Tant que les « bounty » acculturés persisteront à se croire supérieurs aux compatriotes du bled, ils seront éternellement voués à demeurer du mauvais coté de l’histoire, le développement socio-économique de leurs pays se fera de toute façons sans eux. Il suffit d’observer la gueguerre dans la contre culture sapeloogique qui fait rage, entre les marcheurs diatanceurs de Paris et leurs frères restés à Brazzaville, pour toucher du doigt la réalité du complexe colonial « congoïde » persistant dans les esprits. En effet, parce qu’ils vivent en Europe ou aux USA, les premiers estiment être plus présentables que les seconds qu’ils méprisent et traitent la plus part du temps de villageois blédards. L’Afrique a la diaspora la plus aliénée et la plus aventurière du monde.

  9. Bulukutu dit :

    [La seule chose que les deux enfants ont en commun, c’est leur origine. C’est tout]. Ils ont au moins une histoire commune. Celle des peuples d’Afrique. Ils s’unir dans l’adversité, car partout dans le monde, ils sont sujets aux mêmes tracas.

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