Quand le salut de la patrie requiert l’action des hommes de bien

René MAVOUNGOU PAMBOU

S’il est un constat que l’on peut dresser de la profonde crise socio-politique et morale dans laquelle le Congo-Brazzaville se trouve empêtré, c’est qu’elle se nourrit de la léthargie et du pessimisme ambiants qui gouvernent l’existence des Congolais, suite au traumatisme post guerres, la peur inoculée dans les esprits, en raison du terrorisme d’Etat en vigueur dans le pays. C’est ainsi que les citoyens sont figés dans l’inaction face au rouleau compresseur, incarné par le régime dictatoriale, tyrannique et liberticide de Sassou Nguesso. Lequel s’obstine à conserver le pouvoir par tous les moyens, notamment par la violence. A l’évidence, le PCT ne s’est jamais départi de la sacro-sainte logique du “pouvoir au bout du fusil.” On peut cependant déplorer le fait que depuis toujours, ce régime inique s’illustre par le même mode opératoire quant à la conquête et la confiscation du pouvoir.

Au regard de cette sombre perspective il y a même lieu de redouter que Sassou Nguesso mette sa milice de Tsambitso et ses mercenaires en branle, en vue d’un passage en force pour se cramponner mordicus au pouvoir au-delà de 2016. Ceci ne saurait être perçu comme une simple vue de l’esprit, sinon pour quel intérêt engloutirait-il autant d’argent public dans cette hystérique campagne de militarisation outrancière de son pouvoir ! Sassou Nguesso, après avoir clairement affirmé sa volonté de modification de sa propre constitution du 20 janvier 2002 par voie référendaire, traduit à l’opinion ses velléités de putsch constitutionnel. Le grand Angoualima des bords de l’Alima est bien rodé à cette machiavélique entreprise et, à coup sûr, il va nous le refaire sans état d’âme! Est-ce que cette fois-ci les congolais subiront ils encore passivement? Rien n’est moins sûr.

Avec le recul nécessaire, l’état des lieux de ce pays n’est guère reluisante, car en dépit de perspectives prometteuses des années 60, le Congo-Brazzaville sombre dans une déliquescence tous azimuts, à commencer par le ravalement des valeurs morales et mœurs politiques. Aussi, peut-on déplorer entre autres la culture de la violence et du crime politiques, le culte de la médiocrité et l’enrichissement sans cause, de la prostitution de l’élite intellectuelle et surtout des hommes politiques, en raison d’une cupidité viscérale envers les espèces sonnantes et trébuchantes… Bien évidemment, le drame du Congo-Brazzaville c’est sa classe politique qui rechigne à l’idée de la bonne gouvernance et surtout d’honorer le contrat social. Dans ces conditions, on entrevoit hélas aucune perspective sinon aucune espérance permettant de sortir de l’ornière et d’améliorer le sort moins enviable fait au peuple.

Qu’on se le dise bien, au bout de plus de 30 ans de pouvoir, Sassou Nguesso s’est illustré par une gestion hasardeuse et calamiteuse du pays: il n’a jamais œuvré pour le bien-être du peuple, encore moins d’avoir manifesté la volonté politique de soulager la pauvreté endémique imposée au plus grand nombre. On ne saurait oublier un fait non moins important: le PCT, parti prétendument de gauche révolutionnaire au pouvoir depuis 1969, a rompu le contrat social. En conséquence, l’Etat-providence est mort sous Sassou I, de surcroît, en plein boom pétrolier des années 80. Il y a donc lieu d’être sceptique quant à l’idée de croire que Sassou Nguesso accomplira des miracles, pour améliorer les conditions de vie des Congolais, s’il s’imposait de nouveau par un putsch à la tête de l’Etat.

On ne dira jamais assez que la responsabilité fondamentale de l’Etat est de protéger les citoyens, de respecter et promouvoir leurs droits essentiels. Mais il y a lieu de constater que le PCT a manifesté une viscérale incapacité à promouvoir la justice sociale et l’égalité des chances par une non redistribution des richesses nationales. En fait,promouvoir la justice sociale et l’égalité des chances, c’est aussi permettre à tout citoyen, quels que soit son origine sociale, son lieu de naissance, ses convictions politiques, religieuses, philosophiques, son âge, son sexe de trouver sa place dans la société. On ne saurait cependant admettre le fait qu’à la moindre revendication légitime de ses droits essentiels, cela puisse valoir au peuple des représailles sanglantes sinon fatales de la part du pouvoir tyrannique. Tout le drame est là! On comprendra donc aisément qu’en pratiquant le terrorisme d’Etat, le régime de Sassou Nguesso s’est inscrit en faux avec les idéaux de justice, de paix et de cohésion sociale.

Le moins que l’on puisse dire c’est que : «Le mal triomphe par l’inaction des hommes de bien». En effet, le mal se présente sous diverses formes et relève de tous les domaines de la vie. Mais dans la sphère politique, il se caractérise notamment par la mégestion de l’Etat, la kleptomanie, la corruption, la gabegie, la prévarication, l’ethnocentrisme, le népotisme, la violence, la pauvreté, l’ignorance tout autant que par la dictature, la tyrannie. Cette thèse s’avère indéniable et observable dans notre pays, surtout lorsque l’on se retrouve avec des hauts fonctionnaires ou grands commis de l’Etat, des élus locaux, des députés, des sénateurs ainsi que des ministres qui ne représentent nullement le peuple et qui ne rêvent qu’à piller allègrement le richesses nationales et gérer de manière opportuniste et impunie leurs carrières d’arrivistes et leurs intérêts égoïstes.

En somme, il y a lieu de souligner qu’autant l’action est seule à même d’apporter le changement et l’alternance, la réhabilitation d’une véritable démocratie et l’érection de l’Etat de droit que le peuple appelle de tous ses vœux, autant l’inaction des gens de bien: c’est-à-dire ceux incarnant les valeurs républicaines, ceux disposant d’une quelconque éthique, ceux ayant le sens aigu du devoir patriotique chevillé au corps, ceux sachant faire le différence entre le bien et le mal, est seule cause de la pérennisation du mal qui ronge gravement notre société. En fait, le devoir moral envers la patrie oblige les citoyens d’élever leurs esprits vers les grands principes et valeurs républicains, et en conséquence, de consentir à des sacrifices au nom de l’intérêt général. Pour ce faire, ils doivent être imbus d’un amour sans cesse actif pour le bien et d’une haine sans cesse active contre l’arbitraire, l’oppression, la tyrannie… En somme, le devoir moral et l’amour inaliénable envers la patrie voudraient que les hommes de bien envisagèrent des stratégies ou du moins des actions idoines et efficientes en vue du salut de la patrie; laquelle est confrontée à un danger avéré.

Au regard de ce qui précède, il sied de dire qu’on ne saurait demeurer passif face au mal encore moins de le cautionner, au risque de s’en rendre complice. Il y a urgence et plus que jamais la patrie a besoin d’une mobilisation de toutes les forces vives, et ce, sans exclusive pour un sursaut républicain contre cette féroce tyrannie qui sévit dans notre cher et beau pays. Aussi, nous semble-t-il judicieux de rappeler les édifiantes pensées ci-après interpellant la conscience de tous à l’action citoyenne pour le salut de la patrie : “Celui qui voit un problème et qui ne fait rien, fait partie du problème” Mahtma Gandhi, “Si tu es neutre en situation d’injustice, tu as choisi le parti de l’oppresseur” Desmond Tutu.

 

René MAVOUNGOU PAMBOU

Collectif Unis Pour le Congo

Secrétaire chargé des questions éducatives et socio-culturelles

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5 réponses à Quand le salut de la patrie requiert l’action des hommes de bien

  1. Isidore AYA TONGA dit :

    Dans 97% de cas, les dictateurs apportent le chaos à leur peuple. Tous ceux qui travaillent ou soutiennent les tyrans ont besoin de les protéger pour aussi éviter le chaos…

    Par ailleurs, un peuple qui a connu 15, 20, 25, 30, 35, 40 ans et plus de dictature aura besoin de la moitié de ce temps passé pour pouvoir se reconstruire.

    Cette durée est d’autant plus importante quand les dictatures se suivent et se ressemblent. C’est la règle, elle est universelle et immuable partout dans le monde.

    Oui, quand le peuple est régulièrement abusé, affamé, désargenté, humilié, brutalisé, endeuillé, torturé, fliqué, traqué, spolié, des-humanisé, assigné à résidence, démobilisé et somalisé(climat politique délétère) – il est naturellement possible que ce peuple soit déconstruit au niveau mental, émotionnel et social.

    La portée de nuisance du dictateur Sassou Nguesso s’étend jusqu’à détourner chez tout un chacun toute possibilité de réfléchir et de penser.

    Le peuple est alors conduit à s’adonner à des occupations médiocres et primitives (survie au quotidien, loi de la jungle, rackets, acculturation, proxénétisme, sexe, prostitution, alcool, rituels sataniques, sorcellerie, veillées mortuaires, etc).

    Ainsi anéanti, le peuple, réduit à adhérer à la pensée unique et stupide imposée par le dictateur, n’œuvre plus à sa construction cognitive, mentale, psychique, émotionnelle et sociale.

    Dans les conditions d’avilissement généralisé, le peuple accepte d’être complice du tyran et nourrit son pouvoir par sa propre coopération.

  2. René MAVOUNGOU PAMBOU dit :

    Cher Aya Tonga, Merci infiniment pour ce percutant commentaire par lequel vous abondez dans le même sens que la reflexion sinon vous l’étoffez par une argumentation massue et sans complaisance.

  3. Isidore AYA TONGA dit :

    @ René MAVOUNGOU PAMBOU, merci mon cher résistant…

  4. Mfoa dit :

    Et bien! Commençons notre révolution plutôt que de brailler sur internet!

  5. Isidore AYA TONGA dit :

    La modification de la constitution n’est pas pour l’instant la priorité des congolais.

    Ce n’est pas tabou – elle pourra être changé après le dictateur Sassou Nguesso mais pas avant 2016.
    La priorité des congolais, c’est changer de gestionnaire à la tête de nos pétrodollars et ressources naturelles. Cela s’appelle l’alternance politique, un dû pour les congolais.

    De surcroit, je pense qu’une constitution lorsqu’elle est adoptée, elle est censée être souveraine.

    Elles peuvent être amendée en cas de besoin.

    Le besoin ici n’est pas celui d’un individu ou d’un groupe d’individus éclairés, mais pour l’intérêt général, l’intérêt du peuple.

    Le débat actuel au sujet de la révision inopinée de la constitution congolaise, confirme que le dictateur Denis Sassou Nguesso n’est pas encore prêt pour la démocratie. oui, il a toujours à cœur les plans dictatoriaux de privation de liberté, de modification de la loi fondamentale qu’est la constitution.

    Denis Sassou Nguesso, le Congo n’est pas en état de siège ou en guerre. Mais en guerre contre qui? quel ennemi? le peuple, la liberté? et puis….

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