Pour une nouvelle doctrine française en Afrique . Par Jean-Marie BOCKEL

Jean-Marie Bockel

Jean-Marie Bockel

Alors que la situation politique du Burkina-Faso reste troublée, l’ancien secrétaire d’Etat à la Francophonie Jean-Marie Bockel plaide pour une nouvelle organisation des relations franco-africaines.

En Afrique subsaharienne, les coups d’Etat se suivent et se ressemblent: Centrafrique et Guinée-Bissau en 2003, Mauritanie en 2005, Guinée en 2008, Madagascar en 2009, Niger en 2010, Mali en 2012, à nouveau la Centrafrique en 2013, et à présent le Burkina-Faso.

À Ouagadougou, l’étincelle mettant le feu aux poudres fut la volonté de modifier les règles constitutionnelles pour que Blaise Compaoré se maintienne plus longtemps. À cette aune, d’autres pays pourraient connaître la même crise. Je pense au Burundi, où les tensions entre les militaires et l’opposition s’accroissent déjà. Je pense au Rwanda, où Paul Kagamé compte s’autoriser par référendum à rester au-delà de 2017. Je pense au Congo-Kinshasa et au Congo-Brazzaville, où Joseph Kabila et Denis Sassou Nguesso préparent tous les deux une révision constitutionnelle pour pouvoir se représenter en 2016. À cela s’ajoutent des régimes plus durs, comme celui d’Issayas Afewerki en Erythrée: par définition, plus le pouvoir est autocratique, plus le régime est fragile.

L’Afrique subsaharienne est aujourd’hui dans une situation paradoxale. D’un côté, elle se développe et s’enrichit. Elle connaît une croissance enviable de l’ordre de 5% par an. Le taux d’alphabétisation a presque triplé en quarante ans, de 23% en 1970 à 65% en 2010. La transition démographique est engagée dans tous ses pays, de sorte qu’elle connaîtra bientôt ce qu’on appelle la «fenêtre d’opportunité démographique». En d’autres termes, économiquement parlant, les Trente Glorieuses africaines sont devant nous.

Mais de l’autre côté, ses gouvernements sont en train de sacrifier sa jeunesse. 60% des Africains subsahariens sont des jeunes. Or leur taux de chômage est, selon les pays, le double voire le triple de la moyenne. Au Ghana, souvent cité à raison comme une réussite de démocratisation, le chômage total est à 9% mais celui des jeunes est de presque un tiers: politiquement, c’est une bombe à retardement. Au Burkina-Faso, les jeunes furent en pointe de la révolte contre Blaise Compaoré: il se trouve que la moitié des jeunes Burkinabés sont au chômage… Du reste, selon la Banque mondiale, 40% des jeunes qui rejoignent des mouvements rebelles ou terroristes en Afrique subsaharienne sont motivés par le manque d’emplois.

La priorité politique absolue dans la région est donc claire: le chômage des jeunes. Mais les gouvernements ne pourront pas résoudre ce problème immense tant qu’ils seront encalminés dans la dictature, la corruption, les trafics de toutes sortes, la gangrène maffieuse, le clanisme, le clientélisme, et l’absence de pratiques institutionnelles stables. François Mitterrand avait vu juste lorsqu’il déclara à La Baule en 1990 que, concernant l’Afrique, «il n’y a pas de développement sans démocratie et il n’y a pas de démocratie sans développement».

En 2008, secrétaire d’Etat à la Coopération et à la Francophonie, j’avais déclaré qu’il fallait «signer l’acte de décès de la Françafrique». Je n’ai pas changé d’avis. Je ne prônerai donc pas une «mission civilisatrice» occidentale pour aller apprendre la démocratisation à ces pays. Je ne prônerai pas non plus un «devoir d’ingérence», néocolonialisme paternaliste qui serait au demeurant contre-productif.

Un chemin de crête est possible. Une nouvelle doctrine française de politique africaine est souhaitable. La voici, en dix principes simples:

● 1. En rupture avec la Françafrique, la France inscrit toutes ses interventions diplomatiques et militaires dans une approche multilatérale: en particulier dans le sens d’une européanisation, de l’implication de l’Union africaine, et de celle des Nations-Unies.

● 2. La France ne prend jamais l’initiative de s’ingérer dans les affaires politiques d’un pays d’Afrique subsaharienne.

● 3. La France répond toujours présente quand un de ces pays demande de l’aide (matériel, conseillers techniques, financement, etc.) pour améliorer sa gouvernance ou pour davantage se démocratiser.

● 4. La France répond toujours présente quand un de ces pays demande de l’aide pour lutter contre les trafics et le terrorisme.

● 5. La France réduit toujours ses créances sur les gouvernements de ces pays quand ils prennent des mesures de démocratisation.

● 6. À l’exception des criminels de guerre et des responsables de massacres, pour encourager les autocrates africains à lâcher prise, la France s’engage à porter dans la communauté internationale le fait de leur offrir une porte de sortie en échange de leur départ pacifique du pouvoir.

● 7. La France accueille systématiquement les réfugiés politiques de ces pays, quel que soit leur camp, pour entretenir la persistance du débat politique contradictoire.

● 8. Dans ses aides au développement envers ces pays, la France privilégie ceux qui s’engagent à des mesures de démocratisation.

● 9. La France se porte d’autant plus fortement garante des investissements privés français dans ces pays, pour ceux d’entre eux qui s’engagent à des mesures de démocratisation.

● 10. La France poursuit et intensifie l’accueil d’étudiants venus de ces pays, dans l’idée qu’ils seront les élites de la démocratisation complète de l’Afrique subsaharienne.

Ancien Secrétaire d’Etat à la Coopération et à la Francophonie, Jean-Marie Bockel est sénateur (UDI).

Source: LeFigaro.fr

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11 réponses à Pour une nouvelle doctrine française en Afrique . Par Jean-Marie BOCKEL

  1. Kouakou dit :

    Aujourd’hui toute la jeunesse africaine sait pertinemment que les occidentaux en général et la France en particulier ont intérêt à travers leurs réseaux Françafrique et via leurs multiples firmes multinationales a contrôler nos pays. Cela en va de la survie des économies occidentales, car le développement de l’Afrique vous fait très peur. Et la France tente tant bien que mal a placer ses hommes de paille a la tête de nos États afin que ceux- ci accordent du favoritisme aux sociétés travers des contrats mafieux.
    Nous disons aux occidentaux que nos pays n’ont pas besoin de l’aide financière car si nos matières premières étaient achetées au prix réel nous aurons assez de revenus pour bâtir nos pays. La jeunesse africaine ne veut plus de ses valets locaux placés à la tête de nos pays qui se savent protéger par leurs maîtres même en commentant des actes criminels qui soient. Trop longtemps la France a joué a ce double jeu du pompier- pyromane et cette jeunesse qui a tant soif de liberté d’une part et du travail de l’autre part ne cautionnera plus toutes ses pratiques qui nous a tant paupérisées.
    Vive cette Afrique naissante qui saura compter sur les compétences de ses filles et ses fils.

  2. Isidore AYA de Makoua dit :

    Philosophie !
    L’homme noir peut être intelligent ou riche en occident, mais tant que l’Afrique noire ne sera pas debout, l’homme noir ne sera pas respecté partout dans le monde. Ceci est un cas de prise conscience noire au XXIè siècle (Isidore AYA TONGA)
    Oui, l’inégalité entre couche sociale, tradition, culture, société et civilisation n’est pas fondée sur la nature – elle réside dans l’éducation ou l’information qu’on donne à l’individu ou plutôt dans celle qu’on lui refuse.

    L’ignorance est-elle la pire des souffrances? – Oui, c’est à peu près cela.
    Mais tout dépend de la durée pendant laquelle le cerveau a été abimé par la durabilité de l’obscurantisme.

    Celui-ci règne encore au 21è siècle dans certaines traditions, cultures politiques ou sociétés stupides, trop stupides pour être utile à l’alternance politique, à l’innovation politique, juridique, scientifique, technologique, environnementale, socioéconomique et aux civilisations nouvelles (Isidore AYA TONGA).

    Ensemble contre les forces du mal, contre les mauvais, contre les gènes négatifs issus des régimes politiques qui encore l’Afrique de ce début XXIe siècle.

  3. Mr Bockel oui à la fin de la franceafrique , mais l’installation des dictateurs en Afrique est la volonté des occidentaux ! Nos bourreaux ne font d’économie sur le sang de leurs peuples , le cas sassou en 1997 son coup d’état à coûté cent milles assassinats dont les atrocités du Beach de Brazzaville ! Alors Mr Bockel débarassés nous de sassou et ses enfants qui ont plongés notre pays dans un chaos sans précédent ! Pour que nous puissions rétablir des vrais institutions comme le prône ce grand homme d’état son excellence le président OBAMA !!!

  4. mackatchicaya dit :

    Le discours Français n’a jamais été clair concernant l’évolution politique des nations Africaines sous la coupe de la France-Afrique. Mr BOCKEL en s’exprimant ainsi sait de quoi il parle ; mais il oublie que les Africains ne sont pas dupes. Si seulement la diplomatie Française était claire et transparente; comme l’aurait souhaité autant d’Africains, je pense que beaucoup de choses auraient déjà changées.Monsieur BOCKEL a été aux affaires et donc connait beaucoup de choses; de ce fait nous n’avions de leçons à lui donner; cependant l’on peut rappeler à sa mémoire que l’Afrique connaît des mutations et la jeunesse est consciente des enjeux d’aujourd’hui.

    Si le chômage et la précarité continuent de cisailler les foyers africains tandis-que l’argent du pétrole rentre personne ne conviendra avec lui de son discours attentiste. Il impératif de faire que la donne change c’est – à dire donner aux Africains la gestions des problématiques qui sont les leurs en facilitant l’arrivée aux affaires des personnes intègres soucieuses de l’avenir de ce continent.

    L’occident devrait arrêter de tirer à gauche comme à droite pour mettre en péril ces économies Africaines déjà affaiblies par de multitude difficultés. D’aucun dira que la faute incombe aux africain eux mêmes certes mais les ex colonies sont toujours surveillance d’anciennes puissances coloniales pour exemple: la zone franc en matière de monnaie n’est -elle pas une sorte de dépendance? Si au demeurant la coopération technique et le co-développement ne favorisent pas l’éclosion des états Africains , en ce moment l’on peut toujours se demander à quoi cela sert-il?  » Aides- toi le ciel t’aidera » disent les écritures.

  5. mackatchicaya dit :

     » Les ex-colonies sont toujours sous surveillance d’anciennes puissances coloniales »
     » Il est impératif de faire que la donne change »

    L’Afrique ne doit plus rien n’attendre des puissances occidentales sauf que la coopération mutuelle peut prévaloir pour les intérêts dans un système de gagnant – gagnant. Aider au renforcement des capacités de gestion de la chose publique oui, mais cela fait combien de temps que la France est -elle présente en Afrique au sud du Sahara? est ce que monsieur Bockel ne se demande pas pourquoi la chine et quelques pays comme la Malaisie et l’Inde gagnent des parts de marché?

    Il ya trop eu de discours qui n’apportent rien et les peuples on en assez d’attendre ce dieu qui les sortira de l’obscurité……La chine pour arriver à ce niveau où son économie contrôle le monde n’a pas attendue quelque part les stratégies et plan de développement de qui que ce soit en revanche ils ont travaillé (les chinois) dur car conscients des enjeux internationaux beaucoup plus tôt que les Africains.

  6. madouma lissafi

    Langue de bois: cet article est du coq à l’âne! Quasi nul pour l’avenir de la démocratie réellement plurielle en Afrique noire!

  7. UNE DES GRANDES SOURCES DE NOS MALHEURS MAT dit :

    LA TERRIFIANTE MAIN BASSE
    D’UNE CERTAINE FRANC MAÇONNERIE SUR LE CONGO AUX SOURCES…. OUEST-AFRICAINE SANS DISCERNEMENTS.

    Franc-maçonnerie : Sassou Nguesso confirmé à la tête de la GLC par le grand maître de la Grande Loge du Sénégal (GLS), Armand Agbogba

    Auréolé du statut de doyen des chefs d’état africains francs-maçons ( LC nº622), Denis Sassou Nguesso a été confirmé le 25 octobre à la tête de la Grande Loge du Congo (GLC). La cérémonie, qui s’est déroulée de 9 heures à 16 heures, a vu défiler quelque 300 invités, dont la plupart des grands maîtres des grandes loges africaines (Bénin, Gabon, Togo, Niger, Cameroun, Côte d’Ivoire, France, Prince of Hall Texas, Madagascar, Ghana…). Les représentants de la Grande Loge du Liberia n’ont pas pu se rendre à Brazzaville en raison de l’épidémie d’Ebola. La Grande Loge du Togo affichait la plus forte délégation, avec 47 membres.

    Temple à 4 milliards F CFA – La cérémonie s’est tenue dans la Maison des maçons que le président congolais avait pris soin d’inaugurer la veille. Les premiers travaux de cet édifice composé de deux bâtiments et situé près du marché du Plateau, à Brazzaville, avaient été entamés en 2006. D’un coût de plus de 4 milliards F CFA, ils ont été supervisés par les ministres Jean-Jacques Bouya (grands travaux) et Emile Ouosso (équipement et travaux publics). Ce dernier, membre de la GLC et assistant grand maître chargé des affaires intérieures, était secondé par Vincent Gomes , chargé des affaires extérieures. L’un des deux blocs du bâtiment, qui compte huit temples au total, a été construit par la Chine.

    Invités africains – Le président congolais a été confirmé à la tête de la GLC par le grand maître de la Grande Loge du Sénégal (GLS), Armand Agbogba , qui l’avait initié à la maçonnerie dans les années 80. Parmi les invités figuraient des personnalités comme le ministre ivoirien de l’intérieur et de la sécurité, Hamed Bakayoko , ou l’ancien premier ministre centrafricain, Anicet-Georges Dologuélé . Cette cérémonie a également été l’occasion pour la GLC de tenir son assemblée générale, au cours de laquelle le président tchadien Idris Deby – physiquement absent – a été confirmé comme premier député grand maître. L’ex-président centrafricain François Bozizé a également été élevé à ce grade.
    Epidémie d’Ebola oblige, avant de pénétrer dans le saint des saints, tous les frères ont dû se faire prendre la température et se laver les mains avec une solution hydro-alcoolique.

    Africa Intelligence

  8. Kouakou dit :

    Comme d’autres peuples dans ce monde. Les africains doivent faire confiance aux africains. Surtout ne jamais compter sur les autres peuples. Les africains ne doivent plus se faire berner par ses discours mielleux qui viennent des experts soit disant occidentaux. Les africains doivent définitivement comprendre que les occidentaux mènent une guerre sans mercie a tous les niveaux contre eux. Cheik Anta Diop a son époque avait dit lors d’une réunion que, si les africains passent leur temps a s’entretuer et a ne pas travailler dur, l’histoire risque de se répéter car nous finirons par être enchaînés à nouveau.
    Donc, nous devrons rester souder et travailler la main dans la main pour faire barrage a ce scénario

  9. Isidore AYA de Makoua dit :

    Danger public africain, congolais et de la race noire: Du nord au sud Congo, Sassou Nguesso a abusivement tué et somaliser les congolais…

    Anthropologie, société, philosophie, civilisation et nouvelles synthèses…

    Denis Sassou Nguesso est un forcené qui n’a plus rien à perdre sauf que pour protéger sa vie et les intérêts confiscatoires des deniers publics congolais alloués illégitimement par ses nombreux enfants adultérins, par sa famille ou par son clan au pouvoir et dignitaires Nord/sud congolais au pouvoir depuis presque 34 ans de dictature hors-série africaine ou congolaise.

    Denis Sassou Nguesso est comme un terroriste avec lequel les négociations en vue du processus d’alternance politique juste, fiable et transparente ou plutôt de civilisation nouvelle sont du temps perdu pour 99% d’entre nous ou du peuple souverain congolais.

    Sassou Nguesso est dans la signification du des-humanisme, de la de-civilisation, de la honte, du déshonneur et de la haute trahison sur différentes échelles congolaises et africaines..

  10. TANDOUHAVA dit :

    Que Mr.Jean-Marie BOCKEL commence par militer pour l’abandon du FCFA en Afrique.

    Cela prouvera aux Africains que son discourt n’est pas une entourloupe.
    En tout cas les panafricains ne se font plus d’illusion sur la vrai nature de la France.

  11. CONGOLAIS-FRANçAIS dit :

    La jeunesse africaine à la différence de celle d’antan est instruite ouverte au monde via les réseaux sociaux notamment et surtout issue des mêmes écoles que l’élite européenne aux affaires dans leurs pays respectifs. Par conséquent, elle est prête et capable de conduire le destin du berceau de l’humanité. Nous n’avons aucune leçon à recevoir de personne sur le développement de notre continent, encore moins du sénateur BOCKEL. En effet, qu’à t-il fait et dit d’autre, lui qui se soucie tellement de la jeunesse africaine, après son éviction exigée par Bongo? Pourquoi ne monte t-il pas au créneau sur les procédures des BMA engagées dans son pays contre les dictateurs africains, à qui son Etat, patrie des droits de l’homme continue de dérouler le tapis rouge? Quid des violations des droits humains. M. BOCKEL ne s’offusque pas non plus que plus de la moitié de la population congolaise vit en dessous du seuil de la pauvreté alors le pays est immensément riche et 1% de la population (plutôt la famille et le clan présidentiels ) détient 99% de cette richesse. Si vous débarrassez de ces monstres que vous avez placé là pour vos propres intérêts, le continent se développera par la volonté et le travail de ses filles et fils et sa jeunesse n’ira pas mourir à Lampedusa. Le président HOLLANDE conditionne la livraison à la Russie des porte-avions, au respect de l’intégrité territoriale de l’Ukraine que POUTINE viole. Pourquoi n’agirait t-il pas autant à l’égard des dictateurs africains? La France doit exercer son droit d’ingérence sur les affaires africaines en étant du côté du peuple. Toute intervention de quelque nature que se soit devra être exclusivement au bénéfice du peuple. A chaque fois que les intérêts et les droits humains fondamentaux de la population sont bafoués, la patrie des droits de l’homme doit agir. C’est la seule et unique aide dont la jeunesse africaine a besoin. Le reste, c’est de la littérature de café, monsieur le sénateur BOCKEL.

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